Valse avec Bachir par MorgothG
Tel un amnésique, Ari Folman doit rassembler les histoires des personnes qu'il a pu côtoyer pour se rappeler sa propre expérience pendant la guerre au Liban. Perturbé par un souvenir étrange, irréel, où lui et quelques uns de ses camarades se baignent nus dans la mer, sur une plage de Beyrouth, le réalisateur n'hésitera pas à voyager pour comprendre la raison de ce vide qui a pris place sur son expérience militaire.
Lorsque l'on regarde Valse avec Bachir, on est rapidement assaillie par la musique, tantôt classique, tantôt joyeuse, tantôt représentative de la jeunesse des années 80 qui voulait se libérer et s'amuser avec la musique occidentale. Je n'ai pas souvenirs d'un long moment sans musique dans ce film, qui accompagne parfaitement les images. Max Richter a opté pour la diversité, parfois en accentuant le burlesque de certaines situations grâce à la mélodie.
Le film en soi n'a rien de drôle, on suit le chemin de jeunes israéliens partant au combat, comme leur père avait pu le faire une décennie auparavant. Et pourtant nous rions, pour certains situations absurdes ("Tu pries, et tu tires"), d'un porno quelque peu étrange, de scènes de guerre pourtant horribles.
Nous sommes comme ce jeune soldat, dont l'histoire est conté par la psychiatre que va voir Ari, nous voyons la guerre à travers un appareil photo, nous ne pouvons pas être choqués, pas être touchés par ce qui se passe, nous sommes à la fois présents, et absents. Nous pouvons donc rire et admirer sans excès. Mais comme ce jeune soldat, notre appareil va se briser, et toutes nos désillusions avec.
Et c'est là que le génie de Folman et Richter intervient, durant tout le film nous sommes étouffés par la musique, ce n'est qu'au moment où le réalisateur entre dans les camps, et qu'une partie de son souvenir prend son sens que nous sommes nous mêmes touchés par cette guerre : notre appareil se brise. Nous voyons ces mères arriver vers nous, comme dans le rêve, nous les entendons pleurer, et leur détresse prend la place de la musique. Plus un son, nous voyons le vrai massacre de Sabra et Chatila, un silence pesant s'installe, agrémenté d'un battement lent et régulier qui nous ferait presque sentir coupables, nous prenons consciences de ce qui s'est réellement passé pendant tout le film, toutes les horreurs que l'on a vu et pour lesquelles nous avons pu nous amuser.
Je garde donc un excellent souvenir de ce film ô combien touchant et incroyable. Le choix de faire ce film sous la forme d'un animé est admirablement justifié. Ari Folman nous livre sa propre expérience de la guerre, sans diaboliser son ennemi (d'ailleurs en a-t'il vraiment un ?), il nous raconte comment il a contre son grès contribué aux massacres.