La comparaison de ce Van Gogh de Maurice Pialat avec La Vie passionnée de Vincent van Gogh réalisé par Vincente Minnelli ne peut être évitée. Là où le réalisateur américain opère une véritable démonstration du génie du peintre, Maurice Pialat se contente de décrire les derniers jours de l'artiste, sans qu'aucun indice quant à sa postérité ne soit révélé.
Ce choix artistique est plutôt intéressant et a le mérite de nous permettre de découvrir un artiste dont la préoccupation première n'était clairement pas de marquer son époque à travers son art mais bien plus de se libérer de toutes ces chaînes qui l'entravaient dans sa vie quotidienne. On s'aperçoit ainsi que toute sa vie, Vincent Van Gogh a été interrompu pendant son travail par les femmes qui l'appelaient pour manger. S'en suit un discours misogyne qui sied finalement assez bien au personnage.
Pourtant, si les relations entre Vincent et sa famille sont assez intéressantes à étudier, la découverte de ses difficultés paradoxales avec les femmes est bien plus captivante. Maurice Pialat sait parfaitement filmer les corps et il faut bien admettre que cela nous aide grandement à apprécier le film. Alexandra London et Jacques Dutronc sont vraiment sublimes, leur présence devant la caméra illumine la pellicule.
On ne compte plus les scènes marquantes qui viennent s'accumuler comme les tableaux rangés maladroitement dans un atelier austère ou un appartement mal rangé. L'humour n'est pas absent de cette fresque picturale, alors même que le spectateur se sent mal à l'aise à l'idée de sourire dans ces instants. Certaines bouffées d'air frais que l'on accueille avec plaisir nous sont offertes, à l'image de ce magnifique bal en plein extérieur parfaitement mis en scène.
Là où la démarche devient plus vaine, c'est au moment où le spectateur s'aperçoit qu'à l'image d'Andreï Tarkovski avec son Andrei Roublev, Maurice Pialat en vient à se comparer à Van Gogh lui-même (la main qui peint pendant la scène d'ouverture est bien celle du réalisateur). Quand on connaît l'estime du réalisateur français pour son art, qu'il considérait comme inférieur à la littérature et la peinture, ou encore le fait que celui-ci était lui-même peintre amateur, il est difficile de ne pas voir en ce Van Gogh une sorte d'auto-thérapie quelle que peu vaniteuse d'un peintre raté.
Il est finalement assez regrettable que Maurice Pialat ne soit pas capable de faire abstraction de ses frustrations de peintre amateur puisqu'en tant que cinéaste, c'est une bien belle œuvre que celui-ci nous offre.