Ce film d'horreur français est audacieux à bien des égards... Déjà, pour un film de genre, sur la thématique des animaux, gros défi que de rivaliser avec toutes les prods américaines. Les effets spéciaux sont convainquants, les musiques fonctionnent, l'ambiance d'angoisse parfaitement installée, et sans tomber dans le jump scare débile dont les prods outre atlantique nous abreuvent pour combler le vide abyssal du scénar. Audacieux aussi parce qu'il installe son histoire dans une cité. Pourquoi c'est audacieux? Parce que c'est ce qui permet de tisser la satire sociale qui se joue réellement dans le film: qui est la vermine? Les araignées venimeuses qui se sont reproduites à grande vitesse dans la tour, ou les habitants eux-mêmes? Livrés à eux-mêmes avant même l'attaque arachnéique (le début du film nous montre des fuites d'eau, des lumières défaillantes, absence d'ascenseur, couloirs sombres et malodorants... clichés du film d'horreur mais surtout quotidien désespéré des banlieusards), puis cloitrés comme des rats pour éviter la contagion d'araignées dans le beau monde, les habitants sont réduits au même stade que les araignées: des indésirables. Loin du regard du pouvoir, gazés, brimés puis tabassés par la police. Aucun risque à prendre. Qu'ils meurent en silence. C'est le message puissant d'une fable horrifique a priori bien faite et divertissante: le titre lui-même n'est pas anodin, le terme est utilisé par les discours rances qui enveniment les plateaux télé pour désigner la population des cités, rongée par la religion et les trafics de drogue. Clichés que le film prend à contre pied, puisqu'il montre des gens soudés malgré le quotidien précaire, déterminés à lutter contre les clichés qu'on leur accole, mais aussi contre le sort qu'on leur a fixé, sort que même les araignées semblent comprendre, puisqu'elles finissent par épargner les héros, contrairement aux hordes de filcs venus commettre une ultime bavure. On peut évidemment lier cette histoire de contagion à la période Covid, durant laquelle les banlieusards, enfermés dans leur tour, plus éloignée des services publics, hôpitaux, médecins, superettes que le reste de la population, a subi le plus lourd tribut de la pandémie...