Au sein d'un hôpital psychiatrique, Bolognini ambitionne de dénoncer la frontière arbitrairement tracée entres les aliénés et les sains d'esprit, de relativiser la démence des uns par rapport à la normalité des autres. C'est une démarche intellectuelle commune et un peu artificielle car il est bien évident que la norme se caractérise souvent, elle aussi, par des comportements et des instincts insensés; perversité sexuelle, névroses en tout genre et, par ironie, engagement fasciste, sont parmi les arguments qui témoignent en faveur du propos du cinéaste.
Pour autant, Bolognini se consacre peu aux fous "déclarés"; il traque, dans une atmosphère sombre et glacée, pénétrée par un malaise indicible, les faiblesses du personnel de l'institution et, particulièrement, celles de son médecin en chef. Et, en définitive, le film n'est rien d'autre qu'un pensum austère. Bolognini ne s'intéresse pas vraiment à l'univers des malades mentaux. Son approche est grave mais sans sincérité ni humanité. Comme le souligne une photographie dont le formalisme affecté et précieux -fréquent chez le cinéaste- semble garder ses distances par rapport à l'âpreté de la société marginale des aliénés.