Quand on remet les choses dans le contexte, on réalise à quel point Vice-Versa est un film important dans l'histoire de Pixar. On ressortait quand même d'une grosse période de disette créative, ballotée entre les suites inutiles (Cars 2, Monstres Academy) et les propositions désincarnées (Rebelle). Tous les espoirs d'un rebond artistique reposait sur les épaules d'un film se déroulant...dans l'inconscient d'une enfant de 11 ans. Pour relancer le charme, on a vu plus séduisant comme pitch, surtout concernant un film pour toute la famille...Quoique ?
Du concept freudien (une tour de contrôle gère nos émotions), le studio d'Emeryville délivre une magnifique parabole sur la crise d'adolescence. Toujours aussi inventifs, les magiciens de l'animation façonne le petit monde intérieur de Riley (l'héroïne) en plusieurs parcs à thème, tous reliés à un centre des émotions où 4 zigotos (Joie, Tristesse, Dégoût et Colère) tentent de faire régner l'équilibre. Une fois encore, le récit métaphorique est parfaitement intelligible par les différents publics, d'autant que Pixar applique son concept à plusieurs personnages. Le film n'essaie pas de biaiser avec son sujet, ni d'en occulter les instants les moins plaisants (préparez vos mouchoirs). Son récit s'axe autour de l'idée de résilience, d'accepter nos émotions contraires puisqu'elles sont indissociables les unes des autres, faisant de nous des êtres complexes.
Oui, l'heure n'est pas vraiment à la marrade, bien que Vice-Versa contiennent son flot de gags et de représentations théoriques ahurissantes (les rêves réaménagés en plateau de cinéma, les émotions qui passent en abstrait). Après plusieurs années d'engourdissement, Pixar retrouve la vivacité et la poésie qui illuminait ses meilleurs longs. Et de poursuivre la teinte plus mélancolique d'un Toy Story 3, qui invitait ses créateurs à quitter l'antichambre de l'enfance pour explorer de nouveaux territoires. Ce quinzième film entérine ce changement de cap, dans les larmes et la joie. Quelque part, ce que Pixar a toujours su nous offrir. Une page se tourne, une nouvelle s'écrit. On en est qu'au début, et c'est déjà un plaisir.