Quand on regarde son chemin parcouru depuis « Toy Story » en 1995, la carrière du studio Pixar a quelque chose de profondément admirable. Inventifs, intemporels, universels, leurs longs-métrages sont porteurs d’émotions puissantes, et la capacité de renouvellement du studio laisse sans voix. Pourtant, les thèmes abordés ne changent jamais fondamentalement, mais les scénaristes arrivent toujours à leur donner une nouvelle dimension. Et si la thématique de l’enfance est présente dans chacun de leurs films, leur dernière production « Vice-Versa » en retranscrit l’essence même.
En fin psychanalystes, les scénaristes de Pixar ont donc imaginés ce qui gouvernait nos réactions, nos souvenirs, nos rêves, bref : nos émotions. Et ils l’ont résumé en bien peu de chose, cinq personnages, à l’intérieur de nos têtes : Colère, Dégoût, Peur, Tristesse et leur leader, Joie. Car oui, dans la période de l’enfance, c’est principalement la joie qui nous anime, et c’est aussi le cas Riley, une jeune fille de 11 ans qui va pourtant voir ses émotions se dérégler lors de son déménagement à San Francisco. D’une manière bougrement intelligente, Pixar développe donc la perte de repère d’une pré-adolescente qui voit le monde qu’elle connaissait s’écrouler autour d’elle. Tout cela en montrant principalement les déboires de ses émotions, qui vont tout faire pour tenter de remettre leur protégé sur le droit chemin, celui du bonheur. Dit ainsi, cela peut paraître simpliste et même un peu réducteur. Il n’en est pourtant rien : en explorant aussi bien le monde des souvenirs que des rêves, sans oublier l’abîme des souvenirs oubliés, Pixar construit une fresque psychologique d’une authenticité profonde.
Avec ce monde onirique en perpétuelle évolution, le studio veut montrer que les valeurs d’un être humain ne sont jamais gravés dans le marbre, et la disparition de certains pans de notre vie, aussi douloureuse soit-elle, est nécessaire. Un propos donc plus touffu et nuancé qu’il n’y paraît. Accompagné heureusement du savoir-faire des studios, avec une qualité d’animation toujours repoussée et impressionnante, et des gags en veux-tu en voilà pour soutenir l’attention du spectateur. Le déroulement du récit trouve parfois ses limites lorsque les personnages veulent atteindre une certaine destination mais sont constamment empêchés par des rebondissements qui bloquent un peu la progression des évènements. Qu’importe, le film est d’une inventivité à toutes épreuves, et provoque de très nombreux éclats de rires sincères.
L’attente fut longue (licenciements de la part de Disney obligent, il n’y a pas eu de Pixar l’année dernière) mais est largement comblée. « Vice-Versa » s’impose comme un film d’animation à la fois hilarant et touchant, qui propose en seconde lecture une réflexion sur la psychologie humaine fichtrement réjouissante et décomplexée, mais qui n’a rien d’écervelée. Certainement la meilleure production Pixar depuis « Toy Story 3 ».
Ma critique du film "Les Indestructibles" :
http://www.senscritique.com/film/Les_Indestructibles/critique/37481198