Un seul plan, un film bouleversant

Avec Victoria, "thriller en temps réel" largement récompensé aux Lola 2015 (équivalents des Oscars en Allemagne), Sebastian Schipper signe ce qu'on appelle un film à concept. Et quel concept ! Puisque qu'il n'est constitué que d'un unique plan-séquence de 2h20 (un plan-séquence consistant à tourner une scène en une seule prise et sans montage). Un véritable défi technique qui n'est pas sans nous rappeler La Corde d'Alfred Hitchcock ou plus récemment Birdman. Mais contrairement au film d'Alejandro González Inárritu (que j'aime beaucoup par ailleurs) qui était un faux plan-séquence esthétiquement sublime, Victoria est filmé caméra à l'épaule, sans trucages ni coupures, ce qui renforce l'immersion du spectateur. On relève cependant quelques petites erreurs inévitables dues à ce choix de réalisation : La caméra tremble beaucoup, les cadrages et la mise au point sont hasardeux et le rythme est parfois assez lent... Mais peu importe, il faut tout de même saluer la performance inouïe des acteurs et de l'opérateur steadicam (mentionné en premier dans le générique de fin) qui n'avaient pas le droit à l’erreur, au risque d'interrompre le tournage et de tout recommencer.


Au-delà de la prouesse technique, Sebastian Schipper nous propose une histoire plutôt classique (c'est même un peu long au début), mais qui devient de plus en plus prenante et bouleversante, alternant entre moments romantiques et des scènes haletantes de braquages ou de poursuites. Les personnages, qui au départ paraissaient un peu louches, et un peu bourrés surtout, vont s’avérer extrêmement attachants (ils sont touchants, drôles, courageux, solidaires...). On doit notamment cela à l’excellente interprétation des comédiens. Parmi eux, Laia Costa et Frederick Lau, qui tiennent les rôles principaux, ou encore les très prometteurs Franz Rogowski et Burak Yiğit.


Malgré quelques bémols, Victoria, pari fou de Sebastian Schipper, est impressionnant de maîtrise. Un film romantique qui vire au thriller poignant, servi par un quatuor d'acteurs épatants. À la fin, le jour se lève, il est 7h56 et nous sommes complètement chamboulés.


L'article sur mon blog

Amaury-F
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2015

Créée

le 7 juil. 2015

Critique lue 472 fois

Amaury-F

Écrit par

Critique lue 472 fois

D'autres avis sur Victoria

Victoria
Veather
10

Victoria Sonne juste.

Avertissement : dans la rédaction qui va suivre je raconte un peu ma vie. Donc, si pour toi la critique doit se limiter à l’œuvre concernée, si le simple fait quelqu'un parle de lui pour mieux...

le 30 juin 2015

78 j'aime

39

Victoria
Sergent_Pepper
6

Panic in the moonlight

Ce serait évidemment une erreur que de réduire ce film à son principal argument de vente, à savoir qu’il est constitué d’un unique plan séquence de deux heures et quart. Si l’on s’en tenait à cette...

le 18 janv. 2016

54 j'aime

3

Victoria
mymp
3

L'aube est triste hélas ! et j'ai vu tous les maux

À quoi reconnaît-on un branleur ? Un branleur, c’est celui qui met sa musique de merde à fond dans sa bagnole, ou qui porte des lunettes de soleil à l’intérieur ou quand il n’y en a plus (de soleil)...

Par

le 27 juin 2015

49 j'aime

23

Du même critique

Juste la fin du monde
Amaury-F
10

Une leçon de mise en scène

Objectivement, Juste la fin du monde est brillant à de nombreux niveaux. Quelle maîtrise, quelle inventivité ! Il n'y a pas à dire, tout semble chorégraphié au millimètre près. Pourtant, force est de...

le 17 sept. 2016

25 j'aime

1

Brice 3
Amaury-F
7

Du nawak jouissif et décomplexé

Alors que Brice de Nice premier du nom ne me laissais pas un excellent souvenir, le cinéaste James Huth et l'acteur oscarisé Jean Dujardin décident cette année de réanimer ce phénomène...

le 21 oct. 2016

23 j'aime

2

Toni Erdmann
Amaury-F
3

L'hallucination collective de Cannes

Alors, que vaut finalement cette « palme du public et de la presse » ? Ne faisons pas durer le suspense plus longtemps : J'ai du mal à m'en remettre tant ma consternation fut grande. On en ressort...

le 18 août 2016

18 j'aime

8