Voici, pour ceux qui en doutaient, la preuve que le réalisme est loin d'être synonyme d'immersion. Victoria en souffre : le film s'offre un scénario certes relativement plausible, mais c'est presque facile, tant les dialogues sont intentionnellement banals. L'authenticité se paie donc de grosses longueurs et de personnages ébauchés sans grande conviction.
Victoria est esquissée en trois coups de crayon : une espagnole fraîchement arrivée à Berlin, qui voulait être pianiste, et qui dit oui deux fois (une fois à l'invitation d'Allemands à faire la fête avec eux, une autre à un sale job dont elle ne sait presque rien). Ses compères s'arrêteront, eux, à "tchatcheur", "violent", "joyeux luron", et "malade".
La prouesse technique est évidente, et ne s'arrête pas là : Sebastian Schipper et son chef op, Sturla Brandth Grøvlen, photographient superbement bien la descente aux enfers aux aurores berlinoises.
Mais ça ne suffit pas à donner de l'épaisseur à un film dont le style, l'ambiance et le déroulé - quinze minutes pour démarrer, puis une horreur qui progresse par à-coups d'adrénaline, éliminant les personnages dans un ordre analogue - rappellent furieusement REC. Ce dernier sacrifiait son réalisme au profit d'un rythme absolument impeccable, quand Victoria s'accroche un peu trop sérieusement à son exercice de style.
Résultat, le film est correct mais on ne rentre jamais complètement dedans.