Vincent, citadin au quotidien bien établi, travaillant dans un bureau, se déplaçant à vélo, ayant un mode de vie confortable, se voit, du jour au lendemain, la victime d'agressivité physique effrénée de la part de différentes personnes de son entourage... sans raison...
Voilà le postulat de ce Vincent doit mourir. Postulat faisant que ce qui devrait être la plus banale interaction devient synonyme d'angoisse, de tension. Dans la première moitié, comme le protagoniste, obligé de s'isoler à la campagne, loin de tout, on pense qu'il y a des règles précises et immuables à suivre pour éviter le pire, dont la principale est d'éviter de croiser le moindre regard (d'ailleurs, pourquoi il ne tente pas de porter des lunettes de soleil à ce moment-là ?). Mais tout semble très vite encore plus déréglé. Là, encore, sans la plus petite parcelle d'explication.
Le fait de ne jamais saisir quoi que ce soit et celui de comprendre que n'importe qui peut devenir une victime ou un bourreau, d'un instant à l'autre, renforcent l'aspect apocalyptique du récit et de l'atmosphère, tout en rendant aussi le tout parfois assez imprévisible. Même s'il faut relativiser ce point, car il y a quelques étapes attendues du film de survival, comme la traversée de paysages de guerre civile ou encore la parabole des uniques représentants de l'humanité, le discours de fond décliniste sur une société dans laquelle la violence devient de plus en plus le seul langage.
Reste que là où le spectateur risque réellement d'être surpris, c'est dans le ton employé. En effet, si le récit et l'atmosphère sont apocalyptiques, l'humour, souvent noir, de temps en temps absurde, fait régulièrement acte de présence. On se surprend même, quelquefois, à éclater de rire (notamment lors des séquences au commissariat ou quand notre malheureux se bat, au corps à corps, avec deux enfants dans le hall de son immeuble ou avec un facteur, dans une grosse étendue de merde... ouais, il vaut mieux s'abstenir de manger en visionnant le film !).
Et dans les ténèbres, il y a quelques raies de lumières.
D'abord, il est toujours bon d'avoir un adorable et fidèle compagnon à quatre pattes, dénué de toute bêtise humaine (deuxième meilleur acteur chien de l'année, après celui d'Anatomie d'une chute !). Ensuite, il y a l'Amour avec un grand A.
L'alchimie entre le charismatique Karim Leklou, parfait en monsieur-tout-le-monde qui assiste au fracassement de son monde et du monde en général, et la sublime Vimala Pons (rayonnante, donc pas de trop, et dont la présence du personnage relance, lors de la seconde moitié, avec efficacité, une intrigue qui aurait pu faire du surplace autrement !), inoubliable en femme d'un caractère peu conventionnel, s'adaptant très vite aux plus dangereuses situations, sachant ce qu'elle veut et agissant pour l'obtenir... bref, l'alchimie entre les deux, interprètes et personnages, fait des merveilles. On s'y attache sans mal (ils sont touchants ensemble !) et on a envie de les suivre jusqu'au bout, en leur souhaitant le meilleur (ou, vu les circonstances, le moins pire !).
C'est aussi le premier long-métrage de son réalisateur, Stéphan Castang. C'est un début plus que prometteur...