Le début de Vincent doit mourir s'apparente à un voyage vers absurde, une plongée dans un univers Kafkaien . Vincent, citoyen lambda, voit un jour son quotidien bouleversé lorsqu'à plusieurs reprises il se fait agresser violement par des collègues, stagiaires, voisins, adultes ou enfants qui sont soudainement animés d'une haine furieuse à son endroit, sans qu'eux mêmes ne comprennent tout à fait pourquoi, un simple regard de la victime suffirait à déclencher la pulsion meurtrière.
Partant de ce postulat, Stéphan Castang réalise un objet étrange, abandonnant bien trop vite l'absurde pour dresser par la métaphore, un état des lieux pessimiste de notre civilisation. Une civilisation dont l'humanité régresse peu à peu, retournant à son animalité en ces temps de crises sanitaire, climatique, et diplomatiques.
Vincent découvre bientôt qu'il n'est pas un cas unique, d'autres comme lui, victimes de cette sauvagerie se sont regroupés au sein dune de confrérie virtuelle, mais en dehors de Joachim, un autre membre et de Margaux (serveuse dans un Snack à Saint-Michel-Chef-Chef où Vincent s'est réfugié), l'homme est enfermé dans une vie de terreur et de solitude.
" Les autres" ne forment qu'une masse impersonnelle, bestiale et dangereuse, la représentation de cette horde emprunte d'ailleurs beaucoup à l'imagerie des film de zombies. Le climat est anxiogène, et la mise en scène retranscrit parfaitement le sentiment d'impuissance ressenti face à une violence de masse incontrôlable et inexplicable. Pour autant, le film ne s'engage pas totalement sur le chemin de la critique sociologique ni pleinement dans la voie du fantastique. Les contours restent flous, certains séquences donnent le sentiment que le film hésite entre un retour à la satire
l'obligation pour Vincent de menotter Margaux
par exemple a tout du running gag, mais l'aspect burlesque est gommé par le climat d'angoisse permanent. Il en va de même de
la romance
qui peine à s'inscrire avec cohérence dans un récit dont les enjeux semblent être ailleurs ou de l'absence de contexte et de la volonté de ne pas donner d'origine ni de réel point de départ à ces irruptions soudaines de violence qui au final déroutent car elles font naître un caractère surnaturel qui n'est pas exploité par la suite.
Bref ce Vincent... est un projet original, attachant, mais trop insaisissable qui donne le sentiment de ne pas aller assez loin dans sa logique ou tout du moins dans une de ses logiques.