J'aime assez ce que j'ai pu voir de de Oliveira, j'ai dû voir trois de ses nombreux films parmi ses derniers, mais celui-ci passe difficilement. Alors il n'est pas ennuyant (bien que si je n'avais pas fait la sieste avant, c'est sûr que j'aurai dormi tout le long), mais le procédé me gêne car il peine à créer quelque chose de beau, de vrai et de puissant.
Si lorsque j'ai entendu parler de ce film je trouvais le projet de faire un film pour ne le diffuser qu'après sa mort très intéressant, faire un film pour l'au-delà pour ce déluge qu'il y a après nous, ça m'a aussi très vite semblé assez absurde parce que qu'est-ce-qu'on en a à faire de ce qu'il y a après, une fois qu'on est mort ? Camus avait d'ailleurs bien montré l'absurdité de ce genre d'envie, de volonté, d'espoir de reconnaissance post mortem...
Mais mine de rien ça reste très difficile à juger car je déduis que de Oliveira ne voulait pas le montrer de son vivant par pudeur, car ça devait être personnel pour lui et subir des critiques sur un film comme ça, c'est subir des critiques sur qui on est (bien que je pense que ça soit toujours le cas). D'ailleurs il me semble que sa femme le dit très bien, on ne peut pas différencier l'homme de l'artiste.
Sa femme qui a j'ai l'impression la seule scène avec un peu de beauté, de poésie, où il se passe quelque chose, on la voit, elle qui s'est sacrifiée pour que son mari puisse faire du cinéma entrain de s'occuper de ses fleurs... Puis s'enchaînent les photos d'elle jeune, où elle était belle. C'est peut-être le seul moment du film que je trouve un peu libre, où il se passe quelque chose.
Le reste du film est très froid et mécanique, à la fois dans ce qui est dit, que dans les images. Et limite j'avais envie que Alain Cavalier filme ça, qu'il soit là entrain de chercher la petite anecdote autour d'un cadre de photo un peu cassé... Quelque chose de non préparé en somme, quelque chose qui vient habiter ces images et les rendre réellement touchante.
On voit que de Oliveira a du mal à se tenir, qu'il est déjà très âge, mais qu'il a la forme et ça serait touchant de le voir ainsi si ce qu'il disait n'était pas si "banal". Le seul moment où vraiment on va apprendre quelque chose sur ce qu'il pense, sur ce qu'il croit, c'est lorsqu'il va parler de la mort, de la souffrance, de la pureté, de la virginité. Et oui c'est intéressant.
Sinon même lorsqu'il parle du fascisme au Portugal, du fait qu'il ait été arrêté il n'arrive jamais à me faire rentrer dans son histoire, c'est sa propre vie et il y semble extérieur. Et je n'ai rien contre la sobriété mais il faut que dans le cadre il y ait quelque chose qui vive, un regard, une émotion, que la froideur amène une émotion, un questionnement, bref quelque chose. Là ce n'est pas le cas.
Alors j'en verrai sans doute d'autres des films de de Oliveira, mais celui-ci me laisse un arrière goût amer en bouche, on aurait pu faire bien plus avec le même sujet.