Très lié avec Du Soleil pour les Gueux dont il reprend les personnages et développe le monde fictif, Voici Venu le temps est donc peuplé de différentes sortes de guerriers, de bergers d'ounayes (animaux mangeurs vivant du sang de leurs maîtres) et autres "professions" venus d'univers ludiques ou simplement de ce léger décalage du regard qui fait tout le sel de la vision de Guiraudie.
Il y ajoute aussi ouvertement les rapports homosexuels, absents de Du Soleil pour les Gueux, mais à sa manière, c'est-à-dire sans esprit de corps (si l'on peut dire) et encore moins de revendication - ce dont on le remerciera. Même si j'aurais trouvé préférable que notre héros-guerrier hésitât entre deux femmes pour la portée de l'histoire et sa "chevalerie" décalée, on accordera aux hésitations de coeur de Fougou (...) quelque chose de vital et traduit en mouvement d'allers-retour chers à son auteur dans les paysages du Sud-Ouest de la France (ou peut-être même Sud-Est).
Sans en avoir la prétention déclarée et lourde, c'est bien d'un western de type rocambolesque dont il s'agit là. D'un monde avec d'autres lois, d'autres organisations qui est soudain pris d'un mal terrible: vouloir changer les choses. Un monde très lointain et très proche à la fois qui est comme une paire de lunettes posé sur le nôtre, de ces lunettes qui font apparaître en déshabillant et décillant.
Moins réjouissant peut-être que Du Soleil pour les Gueux, l'histoire est cependant suffisammant rocambolesque et les dialogues toujours aussi savoureusement à distance, comme écrits à vol d'oiseau, mais un oiseau qui se pose souvent à terre pour prendre un verre et rire un bon coup, sans lourdeur.