Un concept formidable, soutenu par une mise en scène inspirée de la part de Stanley Donen, qui retrouve sa muse Audrey Hepburn pour la troisième (et dernière) fois - après "Funny Face" et "Charade".
Bâti sur une narration non-linéaire, "Two For the Road" retrace la trajectoire d'un couple marié durant une douzaine d'années, à travers 4 périodes distinctes mais entremêlées, chacune correspondant à un séjour en France des deux conjoints.
"Two For the Road" s'avère une grande réussite sur le plan formel, à l'image de sa superbe photo très colorée, ainsi que son montage virtuose, jalonné de transitions astucieuses permettant de relier ou confronter habilement les différents segments.
Outre les couleurs (de plus en plus vives à mesure que le temps passe), le spectateur se repère aussi grâce aux véhicules et surtout grâce aux vêtements des deux héros, en particulier les tenues de plus en plus chères et glamour d'Audrey Hepburn, qui offre un véritable défilé de mode, depuis son combo sweat-jean-sneakers d'étudiante, jusqu'aux toilettes sophistiquées de l'épouse d'architecte à succès.
On sait que Donen dut se montrer persuasif pour convaincre la comédienne d'accepter un tel changement de look, elle qui arborait depuis longtemps un style intemporel incarné par Givenchy.
Ancré visuellement dans cette fin des années 60, le film incarne aussi les valeurs de cette période, entre émergence du mouvement hippie, libération sexuelle, contestation des valeurs dominantes et affirmation d'une nouvelle génération. On pense parfois au film "The Graduate" de Mike Nichols, tourné la même année et imprégné de valeurs similaires.
Parmi les quelques aspects qui m'ont dérangé, j'ai trouvé que l'humour avait parfois pris un coup de vieux, à l'image de cette famille Manchester, amusante mais trop "chargée" à mon goût.
Par ailleurs, le personnage du mari n'apparaît pas aussi charismatique et attachant que son épouse : peut-être la performance du britannique Albert Finney n'est-elle pas en cause, mais j'ai ressenti un net déséquilibre en faveur de sa compatriote Audrey Hepburn, absolument divine (bien plus séduisante que dans sa jeunesse, c'est mon avis).
Surtout, ma plus grosse déception réside dans le choix d'un happy end : j'ai été très surpris en le découvrant, tant "Two For the Road" semblait se prêter "naturellement" à une conclusion amère.
En dépit de cette concession malvenue, Stanley Donen signe un film remarquable, reflet de son époque, offrant à Audrey Hepburn l'un de ses plus beaux rôles. D'une rare pertinence, cette réflexion subtile sur la vie à deux bénéficie en prime de la partition inoubliable de Henry Mancini.