À l'occasion du dernier film de tonton/papa/papi Spielberg, je me suis dit que c'était enfin l'occasion de visionner ce film culte du cinéma américain. Quand j'étais au lycée, notre prof d'histoire nous avait montré l'une des premières scènes du film, celle où les deux gangs s'opposent et dansent dans les rues. À l'époque, le film m'avait paru tellement niais et kitsch... mais de l'eau à passer sous les ponts, et des films ont été vu depuis. Notamment deux chef-d'œuvres, Chantons sous la pluie et La La Land (ou encore Moulin Rouge, Drôle de Frimousse ou Un Américain à Paris, relevants d'un niveau inférieur selon moi, mais toujours intéressants).
La première heure du film est absolument monumentale en terme de cinéma ! On pourrait passer des heures à analyser chaque plan et à répertorier toutes les bonnes idées mises à l'écran : les lumières et la photographie, le travail fait sur les ombres et sur les couleurs, toutes les magnifiques fulgurances de cadrage et de mouvements de caméra pour capter les mouvements des chorégraphies, ainsi que plein d'autres idées qui vont aider à appuyer la narration... incroyable ! Au vu d'un tel perfectionnisme, ce film a dû être la réunion d'une bande de maniacs ! C'est pas compliqué, il y a au moins une bonne idée dans chaque plan. Ça n'arrête pas.
Après, on est dans une comédie musicale, les personnages sont ce qu'ils sont, c'est-à-dire des archétypes typiques des films de la fin des années 50 ou du tout début des années 60 dans le cinéma hollywoodien... On est en présence de bons petits stéréotypes, de personnages aux traits tellement appuyés qu'ils sont lisibles dès leurs premiers instants à l'écran. C'est assez symptomatique des films de cette époque, et absolument pas propre à ce film... Alors, passons outre. Mais attention ! Les personnages n'en restent pas moins attachants. Cucul en apparence, certes... mais attachants.
Les acteurs, sont tous exceptionnels. Oui, ce style de jeu a beaucoup vieilli. Il est très théâtral, très expressif et bien souvent dans l'excès. Mais là encore c'était générale dans ce type de films à l'époque. Si certains reproches aux Roméo et Juliette de ce film d'être trop lisses, trop propres et de manquer de chair, ils représentent selon moi à merveille la pureté de l'amour. Mais sinon oui... comme le reste des acteurs, ils sont quand même un peu cucu.
Par contre attention, l'aspect cucul de ce film en est bien souvent qu'une fine surface. Il n'y a qu'à écouter les textes des scènes entre portoricains sur le toit, ou la seine avec l'agent Krupke pour comprendre très vite que le film dénonce aussi énormément ! Pour tout vous dire, ça m'a rappelé la chanson de Lou Reed Walk on the Wild Side : cette manière, en arborant la cool attitude et un petit sourire, de traiter des sujets tels que la prostitution la drogue, le viol, les meurtres...
Alors oui, dans son dernier acte, l'histoire bascule quelques peu dans "les pouvoirs infinis de l'Amour"... Mais prudence à ne pas se laisser prendre au piège et à se dire "oh là là on est vraiment dans un film américain où tout est bien qui finit bien". Le film va réussir à se dépatouiller pour retomber sur ses pattes et rappeler que, comme l'a dit un personnage très très très secondaire à un moment du film, nous sommes dans une tragédie.
Il me semble que ce film mérite amplement son statut de grand classique. Il est à visionner absolument - tout en se rappelant qu'il date quand même de 1961 voir même d'encore plus tôt si l'on pense à la pièce de Broadway. C'est à nous de revoir notre grille de lecture et nos codes lors du visionnage. Et cet effort il faut le faire, car quelle claque !