Damien Chazelle n'aura pas attendu longtemps avant d'asséner un uppercut au cinéma. Whiplash n'est que son deuxième film et semble pourtant avoir été réalisé avec l'expérience d'un cinéaste s'étant déjà trouvé. Et c'est en grande partie de là que l'œuvre tire sa force.
Dans les mains de beaucoup d'autres, ce duel entre le prof de Jazz tyrannique et l'élève obstiné aurait résulté en un film divertissant mais anecdotique. Mais Chazelle offre à son film des contours de thriller (la précision des plans rappellent Fincher) et une ambiance unique qui le propulse hors des sentiers battus. Débarrassé de toutes les scories qu'on retrouve trop souvent dans ce type d'histoires (empathie excessive et bons sentiments), Whiplash est un vrai grand huit qui réussit la prouesse de transcender son sujet initial.
Car ici, il n'est pas uniquement question de musique. Mais de passion et de ce qu'on est prêt à sacrifier (ou pas) en son nom. Il y a également cette notion de dépassement de soi ou des autres (le passage à l'âge adulte évidemment), la résolution Œdipienne, et la place de l'héritage (les références à Miles Davis). Chazelle vise l'universel par le biais de l'intimiste et atteint des sommets de maestria avec son final littéralement orgasmique (un sens du montage "physique" prodigieux).
Dix minutes, sans parole et où pourtant tout est dit, qui mettent KO. Dix minutes plus intenses et dévastatrices qu'une année de blockbusters pyromanes, et je pèse mes mots.
Miles Teller fait un sans-faute dans le peau d'Andrew, et J.K Simmons compose un inoubliable Terrence Fletcher (qui évoque le "délicieux" sergent Hartman de Full Metal Jacket). Culte.