« Whiplash » est exceptionnel. Et à plus d’un titre. Pour un premier film, « Whiplash » peut se vanter de toucher la perfection. Damien Chazelle mérite tous les louanges qui lui ont été adressés, ainsi que les récompenses qui lui ont été décernées. Quatorze prix dont le meilleur acteur dans un second rôle aux Oscars, Grand Prix et Prix du public à Deauville tout comme à Sundance, plus des récompenses techniques en terme de montage et de son... on peut dire que c’est le jackpot pour le très jeune réalisateur américain.
Comme quoi à qui fait un film avec son cœur sur un sujet qui le touche personnellement tout réussi, et le monde ne peut que s’incliner.
Damien Chazelle ne manque pas de talent. Pour un premier film écrit et réalisé, on constate une vraie personnalité, autant dans les contrastes de couleurs que dans les plans de caméra. Le film vibre au son des instruments, la caméra s’épanouit en même temps que les sons. Visuellement, c’est superbe !
Mais pour être percutant, un film se doit aussi de posséder un casting irréprochable. Et le casting réuni ici est un casting coup de cœur, des acteurs qui ont fait leurs preuves, mais qui sont loin d’avoir atteint le summum de leur carrière hollywoodienne.
Il y a Miles Teller, l’agréable surprise. Le jeune homme perd la tête à claques qu’on lui connaissait de « Projet X » et de « Divergente » pour se révéler jeune homme sensible, passionné, acharné. Acharné voire même désespéré du fait de la rage de son mentor, le terrible Terence Fletcher.
Certains diront que J.K Simmons interprète du J.K Simmons, c’est-à-dire un homme de poigne, un homme aveuglé par sa colère. Pourtant, Fletcher a un petit quelque chose en plus qui fascine. Que cache cet homme, quelle raison secrète explique sa haine envers ses élèves, jamais considérés comme ses égaux, jamais dignes du moindre compliment ? Jusqu’au bout le professeur restera difficile à cerner, jusqu’à l’ultime confrontation des hommes.
Quelque part entre le rapport de force qui se joue entre le musicien et le chef d’orchestre, se situe la petite dose de fraîcheur féminine. Nicole, la petite amie d’Andrew, magnifiquement interprétée par la naturelle Melissa Benoist, est l’un des meilleurs personnages féminins de l’année. Ce n’est pas une femme complexe et torturée, pas une bombasse sans cervelle comme on en voit trop souvent. Rien de tout ça. C’est une jeune femme comme vous, comme moi, comme on en connait tous. Un personnage parfaitement humain que j’ai personnellement adoré.
L’alchimie évidente entre les acteurs et leurs personnages, tout comme entre les interprètes entre eux, fait que l’on s’attache énormément à ces êtres fictifs. Les péripéties traversées par Andrew prennent aux tripes, bien qu’il n’y ait pas d’enjeu majeur à cette histoire.
Cependant, et malgré le charisme de ses héros, la vraie héroïne du film est la musique. La façon dont la passion du rythme pousse tous et chacun à se dépasser pour atteindre l’excellence de son art. À ce titre, il se trouve que la batterie dont Andrew joue est l’un des instruments véhiculant le mieux les émotions du musicien. Toute la rage et la colère d’Andrew, mais aussi dans de rares occasions sa joie, sont parfaitement retransmis par la puissance de la musique.
Des premiers accords à l’ultime confrontation bourrée d’émotion où toute la frustration et la tension s’évacuent, « Whiplash » vous prend sans jamais vous relâcher. C’est une œuvre révoltante, bouleversante, qui ne laisse pas indemne. On ressort de la salle chaviré et ému, du jazz plein les oreilles, des larmes plein les yeux et du rêve plein le cœur.