Après avoir scénarisé les très bons Sicario et Comancheria, Taylor Sheridan saute le pas et passe derrière la caméra pour son deuxième long-métrage.
Dans Wind River, il se lance pour la première fois dans un film d'enquête policière. La trame, bien que simple, permet au réalisateur de prendre le temps de poser une ambiance ainsi que de développer son personnage principal : la nature.
Un chasseur des hautes montagnes du Wyoming, incarné très justement par Jeremy Renner, accepte d'aider une jeune bleue du FBI tout droit venue de Vegas (Elisabeth Olsen). Le choc entre les deux cultures ne sera pas que thermique...
En effet, pleine de bonnes intentions et idéaliste, la fliquette ne va pas tarder à déchanter : dans les montagnes rocheuses, et surtout en hiver, le seul moyen de survivre est d'apprendre à cohabiter avec le climat et de vivre au gré de ses humeurs.
Lorsqu'il est question de survie, le naturel de l'homme revient au galop. L'espèce humaine est animale : la notion de société est remplacée par celle d'individu, et chacun essaie comme il peut de tirer son épingle du jeu.
Traité comme un western, ce film de traque ne fait aucune concession et reprend un bon nombre de codes inhérents au genre, notamment la thématique de la justice privée.
Capturées avec un étonnant réalisme, les hautes contrées du Wyoming offrent une superbe photographie, sublimée par le score de l'excellent duo Nick Cave-Warren Ellis.
La question de la condition des indiens, traitée en toile de fond, pose cependant un constat alarmant : coincés entre culture ancestrale oubliée et assimilation excessive, les habitants de la réserve de Wind River, ou plutôt tous les amérindiens, semblent ne garder de leur héritage tribal que l'attachement à la terre natale, tout en intériorisant pleinement les dérives les plus sombres d'une société mondialisée (drogue, musique commerciale). Malgré tout, ces derniers conservent une fierté impressionnante, que Sheridan retranscrit avec un humour assez cynique.
La performance de Jon Bernthal (aka The Punisher), bien qu'anecdotique, s'impose comme l'une des scènes les plus marquantes de l'année par sa tension.
Car Wind River est un véritable thriller, et même si le rythme est assez lent, la tension est palpable du début à la fin grâce à un superbe travail d'ambiance.
Certains reprocheront au film un dénouement trop simple et moralement discutable, ou encore l'omniprésence d'une ambiance trop larmoyante exacerbée par une musique indéniablement mélodramatique. Compréhensible.
Mais l'œuvre de Sheridan est profondément ancrée dans le réel, et jamais le réalisateur ne se pose en juge. Bien au contraire, c'est avec une précision clinique qu'il dissèque les méandres de la nature humaine. Le résultat est sans appel : dans un environnement où la loi du plus fort règne, l'humain revient à un état sauvage, qu'il s'agisse de sa survie ou de l'assise de son pouvoir.
Pessimiste... ou réaliste?