S'il y a bien une chose qu'on retiendra, c'est que Leigh Whannell a compris comment réinventer des personnages aussi iconiques. En passant par le facteur humain avant tout. The Invisible Man marquait de jolis points en construisant le récit de son héroïne en miroir des victimes bien réelles de relations toxiques. Wolf Man part lui sur la crainte de reproduire un schéma basé sur la force et/ou la violence. Ce qui rend le personnage de Blake (Christopher Abbott, très bien) d'autant plus touchant et tragique, puisque cette volonté est mise à l'épreuve suite à une blessure qui le destine à devenir une créature...indéfinie. La modestie du budget n'empêche en rien Whannell de tenir son intrigue -1h35 sans gras ni temps mort- et d'affoler le trouillomètre à plusieurs moments. Comme pour son précédent long-métrage, la peur nait d'une mise en scène qui tire parti de cette économie de moyens pour créer une ambiance pesante en misant beaucoup sur les sons. Mieux, le réalisateur se réapproprie certains codes du film de loup-garou pour surprendre. Il file la métaphore d'une maladie qui détériore les rapports au sein de la famille, en montrant comment la mutation altère les sens du mari et rend la survie de sa femme et de sa fille encore plus incertaine. De fait, on passe de la tendresse à l'épouvante sans même s'en rendre compte. Ce qui en soi est déjà plus que bien.
Si le script de Whannell ne manque pas d'idées pour rafraichir certaines légendes, il a par contre plus de mal pour traiter correctement Charlotte, qui semble éteinte pendant une moitié du film. C'est un peu dommage car le couple formé par elle et Blake ouvraient des perspectives intéressantes au début. Il faut également composer avec des dialogues martelant le sujet principal, comme s'il risquait de nous échapper entre deux séquences. La partie body-horror est correcte, mais ça ne va ne très loin non plus. On est pas chez John Landis ou David Cronenberg. Enfin, et c'était évidemment une grosse attente, un design de la bête franchement pas terrible. Compte tenu du budget serré, le travail sur les prothèses et le maquillage est réussi mais sur l'apparence, on est plus proche du Wolf de Mike Nichols que du Wolfman de Joe Johnston qui avait pour lui un monstre ahurissant de sauvagerie. Wolf Man est donc une petite surprise qui bénéficie du talent de son réalisateur pour créer des atmosphères oppressantes et pâtit de ses failles en tant scénariste. Pour sa renaissance, Le Loup Garou attendra. Mais là, il n'était pas loin de sortir du bois.