Leigh Whannell s'est fait remarquer en 2020 avec son Invisible Man, relecture de la figure de l'Homme Invisible, l'un des classiques des Universal Monsters, en lui apportant une vision plus moderne évoquant la toxicité masculine.
Logique d'un producteur bas du front quand il y a succès : "Bah il a réussi avec un des monstres alors on n'a qu'à lui en filer un autre et ça va marcher !" Mais oui, pensez donc, La Momie de Stephen Sommers c'était un super bon film, pourquoi on filerait pas carrément tout le roster Universal au monsieur pour qu'il fasse Van Hells~
Ah merde.
Comparaison peu flatteuse, j'en conviens, mais qui illustre bien un problème de l'industrie du divertissement actuelle qui consiste à vouloir copier-coller le moindre succès populaire pour s'éviter à tout prix d'avoir à réfléchir.
Qu'on se comprenne bien, dans l'idée utiliser la figure du Loup-garou pour évoquer la toxicité masculine, la transmission de la violence et la façon dont elle contamine toute une famille, c'est loin d'être déconnant, et le film en lui-même n'est pas particulièrement honteux, surtout en comparaison des croutes de Blumhouse de l'année dernière, à savoir l'immonde Nightswim et l’infâme Imaginary.
Sauf que le film n'ose jamais y aller à fond avec son concept de départ. Au lieu de nous montrer un père de famille profondément marqué par l'éducation stricte de son propre paternel qui va avoir des répercussions sur ses rapports familiaux et pourquoi pas en faire un homme violent qui essaye de s'améliorer, Whannell se contente du minimum syndical, à savoir un gentil papa qui est toujours là pour sa fille malgré son douloureux passé et que la contamination du loup-garou va changer en bête. D'un possible drame familial dont la figure du loup-garou se ferait une extension et une amplification monstrueuse, on se retrouve avec un film d'épouvante très classique avec papa qui se change petit à petit en homme-loup et terrorise sa famille. Vous avez vu la bande-annonce, vous aurez déjà deviné la fin.
Ce lissage narratif va de pair avec l'autre gros problème du film : Son absence visible de moyens. Pas seulement financiers mais également créatifs, car le tout se centre sur un lieu unique dont la spatialisation n'est jamais exploitée à des fins horrifiques, les scènes d'attaques sont tout à la fois trop courtes et pas assez graphiques (c'est un loup-garou, que diable !!). Oui, c'est intéressant d'avoir un film de loup-garou qui se centre principalement sur une lente transformation physique et psychique du contaminé, mais passée la moitié du film, on tombe dans un classicisme de courses-poursuites très basiques et de scènes émotionnelles qu'on voit venir à des kilomètres. S'ajoute à ça le problème des designs des garous. Je comprends qu'on veuille rendre hommage au design d'homme-bête du film de 1941, mais là c'est quand même très moche. Dans sa démarche de relecture terre-à-terre, Wolf Man abandonne toute velléité trop fantastique : Aucun rapport à la pleine lune, pas de balle en argent, exit les grosses bêbêtes massives à la Hurlements, la malédiction traitée comme un virus... Ce qui d'ailleurs amène le seul moment involontairement nanar du film :
Je veux bien qu'on ne soit pas sur une histoire de loup-garou classique, mais tu vas pas me faire croire que dans cette version, Papa-garou est incapable d'écarter les dents du piège à ours à mains nues ! Sinon c'est juste un homme normal avec plein de poils et des crocs et dans ce cas-là pourquoi on en aurait aussi peur ?
En fait il n'y a qu'une seule idée de réalisation un peu intéressante, à savoir un travelling circulaire entre deux personnages qui se font face nous permettant d'avoir les points de vue du papa-garou et de celle qui lui parle, pour montrer que la déshumanisation du premier rend impossible la communication entre les deux. C'est une bonne idée. La seule idée de réalisation du film, et comme Whannell n'a que ça pour vaguement nous faire croire qu'il a bossé derrière la caméra, il la réutilise au moins 4 fois dans le film pour à chaque fois nous re-raconter la même chose ! C'est vous dire la pauvreté intellectuelle qui a motivé la création de ce métrage.
Bref, Wolf Man sent à des kilomètres le film d'exploitation d'un juteux filon. Il n'est jamais désagréable à regarder ni spécialement mal fichu, mais il se repose entièrement sur son idée de départ, ne sait pas quoi en faire et va donc se réfugier dans un classicisme formel et narratif navrant. Avec les bases acquises on peut toujours faire un film sympa, mais en allant un peu plus loin on aurait pu avoir un bon film, ce que Wolf Man échoue à être tant l'implacable machinerie Blumhouse le formate et le contraint à n'être rien de plus qu'un film d'horreur lambda.