Comme souvent, Quentin Dupieux a une idée géniale, qui se tiendrait parfaitement sur un moyen-métrage mais qu'il étire artificiellement pour pouvoir passer dans le circuit cinéma. Sa nouvelle proposition surprend à nouveau, délaisse l'absurdité de ces dernières œuvres pour sonder un aspect plus existentialiste et le besoin de reconnaissance. Yannick démarre ainsi sur un déclencheur fort et plutôt hilarant : qui un jour ne s'est pas senti piégé devant une pièce de théâtre nulle, avec une furieuse envie de tout faire arrêter, tout en regrettant profondément ne pas avoir pu être diverti ? Sur ces prémices, le réalisateur mélange humour noir, drame social et comédies de gestes, mais également une réelle réflexion sur l'art et le rapport entre l'œuvre et l'audience, les « qualifications » de l’artiste, les codes de bienséance, le mépris de classe, la perte du respect et les pulsions d’hommes modernes confrontés à un monde désenchanté.

Yannick est franchement hilarant sur sa première partie. Cependant, le film hésite parfois trop entre la comédie et des éléments plus dramatiques ce qui le rend un peu bancal, notamment quand il perd le principe de surprise si cher au réalisateur. Ainsi le pétage de plomb de Paul Rivière va trop loin (heureusement il est court), probablement car c'est aussi le moins surprenant, collant beaucoup trop au persona que s'est forgé Pio Marmaï.

On retrouve avec ce film les mêmes défauts que dans d'autres films de Dupieux, malgré une durée encore raccourcie à seulement 1 h et 4 min : un début extrêmement fort et une fin relativement faible, comme si le réalisateur avait fini par se désintéresser du sort de ces personnages. Le résultat arrive encore à surprendre, ici par le changement de registre de Dupieux : Yannick pose une réflexion bien plus réaliste sur la société moderne. Si le film finit de manière un peu faiblarde, le propos résonne, ce qui en fait un film bien plus engagé et militant que les précédentes propositions du cinéaste, en particulier dans la relation entre spectateurs et créateurs, et dans le besoin de reconnaissance qui prouve à la fois les comédiens envers leur public et le public en tant qu'individu et non comme masse passive.

AlicePerron1
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le 11 août 2023

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Alice Perron

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