Dans un monde où une grande partie de l’humanité vit dans des métropoles, quelques initiés exploitent les passages dissimulés pour percer les secrets de la ville. Dans notre 21ème siècle adoré, certains appellent ça de l’Urbex et l’exposent allègrement sur leur compte Instagram. Mais dans Deus Ex, cette infiltration urbaine est une sorte de puzzle géant dont les pièces sont disséminées aux quatre coins de la ville et n’attendent que vous pour se dévoiler. Chaque rebord de fenêtre, bouche d’aération, porte ou plaque d’égout est propice à la découverte de nouveaux documents et informations ainsi que de passages permettant d’aller toujours plus loin dans l’exploration et la compréhension de l’univers du jeu.


Je ne peux décemment pas cacher mon affection pour ce genre de FPS qui combine des mécaniques d’infiltration souple et de shoot avec un level design riche. Je m’y complais facilement tant j’ai l’impression de devoir faire preuve de créativité pour trouver les meilleurs moyens de contourner les obstacles... Dans le cas de Deus Ex son univers lui permet de justifier des augmentations qui prennent la forme de compétences à débloquer. Du fantôme au défourailleur, fatal ou non létal, je me suis facilement pris pour un agent secret imposant sa propre vision de la justice en exploitant les moindres failles de sa ville. Tout cela dans un contexte de fortes tensions mondiales entre organiques et augmentés dont Prague, théâtre de nos opérations, est très représentative.


Cet aspect très local de l’aventure permet de voir de manière flagrante l’aggravation des discriminations envers les augmentés, notamment en entrecoupant les quêtes et pérégrinations dans la ville par des interventions dans des lieux éloignés. Ces excursions sont justifiées par le scénario qui, dans la continuité de Human Revolution, nous met sur les traces d’un groupe terroriste pro Augmentés aux méthodes peu orthodoxes. Les différentes missions secondaires ainsi que l’exploration libre du joueur permettent de brosser un tableau plutôt complet des différents phénomènes que peuvent provoquer de tel périodes politiquement troubles : médias underground, abus policiers, faux papiers, déportation etc. Malheureusement l’écriture reste dans son ensemble assez peu profonde et il est assez difficile de dégager un propos clair et engagé alors que l’univers qu’elle décrit est éminament politique et rappelle des périodes sombres de l’histoire humaine.


A ce contexte de rejet d’une partie de la population vient s’ajouter la menace fantôme des Illuminati et des grandes puissances corporatistes, souvent évoqué dans les dialogues mais auxquelles on ne se confronte jamais réellement. Je me suis du coup retrouvé un peu gêné quand la mort du chef des terroristes, un vieux soldat aux améliorations poussiéreuses, a signé la fin du jeu. Quid de tout le reste ? L’enjeu de cet épisode se voit encore plus amoindri par celui de l’opus précédent dont la fin comprenait une catastrophe mondiale où tout les augmentés avait perdu le contrôle d’eux-mêmes et perpétué des massacres, engendrant mort et traumatisme. On se retrouve donc coupé dans son élan en s’attendant à une dernière envolée dramatique qui ferait office de twist de fin. Mais non. Rien du tout. D’autant que je n’avais même pas encore vu d’intérêt à essayer la plupart des nouvelles compétences que proposait cet épisode tant je me débrouillais bien sans. Le bec dans l’eau, j’ai assisté au grand récap’ de fin en cinématique, impuissant.


Malgré le fait que la partie exploration urbaine soit selon moi, une réussite notamment en terme de narration je ne recommanderais probablement pas Deus Ex : Mankind Divided. Ses éléments de level design restent quand même trop génériques d’autant que je n’ai pas vraiment pu constater de vrais nouveautés en terme de mécaniques par rapport à l’opus précédent. Malgré une Prague futuriste assez convaincante, il manque au titre une originalité et une force de caractère pour être une œuvre dystopique vraiment marquante.

Orak
6
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le 22 avr. 2019

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