Dishonored
7.6
Dishonored

Jeu de Arkane Studios et Bethesda Softworks (2012PC)

Bac à sable sans challenge ou comment finir le jeu en very hard à poil avec son blink et son couteau

J'ai tellement attendu ce jeu. Encore une fois je me suis fait rouler... Dishonored est loin d'être un mauvais jeu, mais force est de reconnaître après l'avoir fini que, malgré des forces évidentes, ce jeu est loin d'être un chef d'oeuvre en raison d'énormes soucis de conception et d'équilibrage.


Ce qui saute aux yeux, c'est la direction artistique éblouissante. Techniquement parlant, on ne reconnait pas le moteur Unreal. Exit les textures plastiques, exit le bump mapping excessif, les post-proc dégueux... Dans Dishonored, tout est beau, conçu avec soin, à l'image des textures entièrement fait main, à l'ancienne. En créant cet univers, les développeurs ont fait preuve d'un souci du détail proprement hallucinant : personnage, vêtements, mobilier, design des armes et des technologies, architecture, affiches, tentures de plafond (!), tout est pensé, intégré dans un univers dystopique un peu clownesque sur les bords. Tout semble à sa place, créant un réel sentiment d'attachement à cet univers particulier.


En se baladant un peu, on prend vite la mesure de l'architecture des maps. Elles sont un peu petites, on ne peut pas vraiment se perdre avec 2-3 zones clés par map, mais grandiose dans leur réalisation. Ce sont de vrais gruyères, il y a des passages de partout, dans tous les sens : sur les côtés, en dessus, en dessous... avec des accès dissimulés de manière beaucoup plus subtile que dans d'autres jeux du genre (comme le dernier Deus Ex et ses grilles d'aération surbrillantes à tous les coins de mur). Surtout, le jeu enterre tout ce qui se faisait avant en terme de verticalité dans un univers réaliste. Dishonored risque fort de devenir un cas d'école, un modèle du genre. A aucun moment on ne ressent les contraintes du niveau, pourtant en réfléchissant un peu on se rend compte de tous ces éléments qui nous indique une direction, qui nous attire, nous indique un danger. Une performance assez exceptionnelle qui révèle, encore une fois, tout le talent d'Arkane en la matière.


Ceci dit, le jeu reste construit de manière maladroite sur de trop nombreux points rédhibitoires...


A commencer par le scénario : tellement cousu de fil blanc, tellement rien derrière, que la forte volonté de narration devient irritante, et ce dès les premières minutes de jeu avec un héros qui reste silencieux quand on assassine la personne qu'il protège sous ses yeux, silencieux toujours quand on l'accuse à tort. L'histoire se montre vraiment pénible à suivre, du tout début à la toute fin. Elle manque d'éléments mystérieux, de profondeur, de thématiques fortes. On ne se pose jamais vraiment de questions. On sait déjà tout. Depuis le début. Heureusement, il n'y a pas trop de cutscènes et on peut se raccrocher à l'immersion dans l'univers qui pour le coup est réussie.


L'exploration est mal récompensée (hormis DA et bouquins, mais rien qui nécessite un détour durant les runs suivants). On trouve toujours les mêmes objets et au final on croule sous l'argent/runes/charmes. Ce qui veut dire que si on explore beaucoup, on peut débloquer quasiment tout le panel de sorts/amélioration, ce qui n'a aucun sens en terme d'équilibrage. En plus, les charmes sont aléatoires, on ne trouve jamais les mêmes au même endroit, ce qui veut aussi dire qu'on ne peut pas planifier un run/build.


De toute manière, qu'importe les pouvoirs/améliorations, ils ne servent à rien. Rien. Le fait que le jeu puisse se terminer en moins de 5h dans le mode de difficulté le plus difficile avec un personnage armé de son seul couteau et du blink de base sans améliorations/pouvoirs indique clairement un gros problème d'équilibrage à mon sens. Contrairement à Deus Ex (le seul, l'unique), on n'a jamais envie/besoin de débloquer un skill pour se faciliter la tâche via de nouveaux accès ou pour obtenir des outils qui nous aide réellement. Non, dans Dishonored le blink de base suffit à contourner toutes (toutes !) les difficultés et le couteau de base permet de tuer tous les ennemis en un coup. Au final, les pouvoirs/armes/améliorations sont juste là pour faire des trucs fun qui n'impactent jamais le jeu.
C'est vraiment pour moi le défaut majeur de Dishonored : il n'y a jamais de challenge, on est jamais mis face à des situations qui semblent perdues, des situations que l'on doit résoudre par la réflexion et/ou le skill. Non, on peut tout passer facilement avec le blink et le couteau, la difficulté ne provenant que des défis tordus que s'impose le joueur de lui-même (ce qu'aucun joueur sain d'esprit ne fait jamais, s'il y a une faille il rentre dedans, c'est pourquoi quand on fait un jeu on veille à virer ce genre de martingale).
Bref, hyper déçu par le côté bac à sable, le côté héros surpuissant jamais en danger, ce gameplay sans tension. Je ne m'attendais pas du tout à ça (et curieusement Bethesda n'a jamais communiqué à ce sujet). Après le jeu est plutôt fun, les pouvoirs sont marrants à tester, mais ils ne servent vraiment à rien.

Créée

le 13 oct. 2012

Critique lue 892 fois

11 j'aime

Anark23

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