Des rues, des ruines, une ville à l'agonie. Protecteur de l'impératrice, elle est assassinée sous vos yeux, et sa fille enlevée. Ceux qui ont fait le job se sont éclipsés avec le vent, disparus en un éclair. On vous croit coupable et vous met aux arrêts. De mystérieux alliés, convaincus de votre innocence, vous font parvenir la clé de votre cellule et une lame. Des Loyalistes, allergiques aux mensonges et furieux que le pouvoir soit désormais aux mains d'un pourri, faute d'être entre celles de l'héritière. La petite Emily. Il vous faut la retrouver. Pour cela, il faut trouver les bonnes personnes, interroger les réticents, frapper aux portes, vous armer. Et ne pas craindre le surnaturel, votre plus précieux allié.
L'envie de crier au plagiat s'estompe aussi vite qu'elle est venue. Un héros cagoulé qui court sur les toits pour déjouer un complot ? Même ses novices penseront immédiatement à Assassin's Creed. Un personnage ambidextre dont une main manie les armes et l'autre des pouvoirs d'invocation ? Mettez un aquarium devant votre téloche et hop, c'est Bioshock. Les créateurs veulent donc se frotter à une date récente du FPS, rien que ça. Sauf que non, conneries. Il ne faut pas les blâmer mais se réjouir : le génial Bioshock a déjà fait école. Le gameplay est similaire mais faire à l'identique ne veut pas dire faire aussi bien. Notion plus qu'acquise : Dishonored a compris la leçon et l'applique, il ne la récite pas.
Du coup, il s'émancipe très vite de son modèle. Malgré un goût également marqué pour l'élégance rétro-futuriste, lui plonge dans le passé, dans des intrigues de cour qui se fomentent en haut lieu alors que les masses agonisent sous les assauts de la peste. Désormais bras de la vengeance, vous allez de haut en bas sur l'échelle sociale, infiltrant manoirs et maisons de passe mais côtoyant des bandits, une vieille folle et un mentor venu d'ailleurs. Les rats, eux, font un festin des cadavres et s'attaquent aux bien-portants. Tuer ses ennemis ou les esquiver discrètement, on peut réussir ou échouer les deux. Ramper dans les égouts, cavaler sur les toits ou raser le bitume. Là aussi, à vous de trancher. Quel que soit le chemin, l'ivresse est immense.
Prodige rythmique, Dishonored prend un malin plaisir à nous donner envie de tout essayer, l'action et l'infiltration. L'attente est aussi délicieuse que les combats sont furieux, dynamiques et violents. Portant un masque métallique, on se retrouve happé par une espèce de monde ouvert en mode mineur : sans être illimité, il semble toujours receler un recoin inexploré, conséquence d'une direction artistique éblouissante. Teinté de fantastique, Dishonored porte haut son sens du décorum et de la liberté d'action. Proposant une batterie d'améliorations et d'armes, l'aventure cherche et atteint l'efficacité maximale permise par une trame simple et solide. Vous voilà grandi, la silhouette spectrale et le geste surhumain. Anti-héros, au sens premier du terme. Déshonoré mais fier.