L'homme au masque de fer et aux boules en acier trempé
Pour moi, Dishonored est l'une de mes meilleures expériences solo de cette année. N'ayant joué à aucun Thief, je ne peux que le comparer au premier Deus Ex, le système de dialogue et l'intrigue en moins, les combats pêchus en plus. Nos missions s'accomplissent sur des cartes ouvertes, avec des objectifs secondaires à découvrir et à terminer (ou non d'ailleurs, tout dépend de la voie que vous empruntez et de la cause que vous souhaitez défendre), on trouve pléthore de textes et d'enregistrements audio détaillant l'histoire du jeu, des avis de recherche à la description des saisons, des spéculations sur l'Outsider au découpage de baleines vivantes... et même la transition en bateau entre les missions.
L'ambiance du jeu est originale, géniale et prenante. Une ambiance que les gardes cassent un peu à force de répéter les mêmes répliques, mais la direction artistique n'en est pas moins superbe, avec des décors mêlant bâtiments anciens et technologie futuriste, et la trame sonore est toujours là pour nous entraîner ou nous stresser, dans ce monde mélancolique ravagé par la peste et la folie.
Le mystère plane autour de l'Outsider, ce personnage énigmatique et omniscient qui semble jouer avec les destins qu'il contrôle, impatient de découvrir la tournure des événements. La fracture entre les deux styles d'architecture (bâtiments et barricades) n'a donc pas été la seule chose à me rappeler Half-Life 2. Et si Dishonored n'est pas une révolution technique, la qualité de ses graphismes compense largement. On éprouve aussi un certain plaisir à découvrir les conséquences de nos actes passés en revenant régulièrement dans certaines zones, même si situations inattendues et remords sont assez rares.
J'ai déjà terminé le jeu en mode difficile, et si je ne suis pas parvenu à obtenir tous les succès que je voulais (je me suis rendu compte un peu trop tard qu'assommer un type en train de pisser devant un précipice n'est pas forcément une bonne idée lorsqu'on essaye de ne tuer personne), je n'ai néanmoins pas rencontré grande résistance en misant sur la discrétion : les ennemis sont des robots qui suivent des tracés et qui s'en éloignent rarement (ils réagissent tout de même parfois en partant à la recherche de leurs collègues disparus) qui ne lèvent jamais la tête et qui ne voient rien à plus de quinze mètres, ou presque. De plus, les niveaux sont un peu trop bien organisés : là où un couloir semble difficile à traverser, un faux-plafond sera là pour vous sauver, la téléportation et l'arrêt du temps facilitant davantage les choses. Enfin, le fait de vous accroupir, ou de vous trouver derrière un objet du décor "transparant" vous permet quasiment de tout observer sans crainte d'être vu.
Cela dit, il s'agit d'un parti pris des développeurs. A vous de vous imposer vos défis, ou de relever ceux proposés par l'intermédiaire des succès. J'ai pu tâter du glaive entre deux accès de rage berzerk, et les combats m'ont semblé valoir le détour. Rôdeurs et guerriers y trouveront leur compte.
J'ai tout de même eu du mal à me sentir impliqué dans l'histoire et à m'identifier au héros, probablement à cause du fait qu'il soit muet. Cela dit, je pense que ce n'était pas l'objectif d'Arkane. Au final, j'ai davantage éprouvé de la compassion pour les pauvres infectés que pour les personnages principaux (ce qui n'est pas très étonnant en fin de compte, dans un cadre aussi sombre que celui-ci).
On se réunit ce soir avec du whisky et des cigares ? J'n'en ai jamais douté.