En plein dans la mode du rétro qui bat son plein depuis quelques années, DUSK vient faire de l’œil à tout les nostalgiques de la bonne époque du fast-FPS en proposant une expérience tout droit sortie des années '90.
Le First Person Shooter étant en perpétuelle évolution depuis sa création il y a maintenant presque trois décennies, force est de constater que les titres récents n'ont plus grand chose à voir avec les précurseurs du genre, laissant donc une communauté de joueurs en manque de vraies nouveautés à se mettre sous la dent. Et contrairement à bon nombre de développeurs opportunistes qui vendent leurs jeux en promettant de raviver la flamme d'antan, les gars de chez New Blood Interactive respectent leur promesse.
Initié en 2015 par un certain David Szymanski, le projet de développement du jeu se fit en plusieurs étapes et le premier épisode fut disponible en pré-commande dès l'été 2017, suivit par le second en accès anticipé en janvier 2018. Le jeu fut finalement sorti en version release en décembre 2018, une fois le troisième épisode et le mode solo terminés.
A peine la partie commencée, le jeu nous lance de plein fouet dans l'aventure, sans même nous avoir donné le temps de nous préparer, comme pour nous rappeler qu'autrefois les jeux ne se donnaient guère la peine de prendre le joueur par la main. Dites donc adieu aux longs didacticiels, les systèmes de couverture, les ironsights, la vie qui se régénère automatiquement, les scènes entièrement scriptées et toutes les autres caractéristiques des shooters modernes ...
Ici, ce sont les compétences du joueurs qui sont mises en avants et principalement sa capacité à viser, esquiver et se déplacer rapidement. Un retour aux fondamentaux qui rappel directement les sensations de jeux nerveuses de titres comme Quake ou Unreal, les deux célèbres représentants du fast-FPS.
De fait, le design du jeu montre qu'il a été pensé pour être joué rapidement, les développeurs invitent même au speedrun en ajoutant un objectif bonus qui demande de finir chaque niveau dans un temps imparti. On retrouve également des techniques qui feront plaisir aux anciens, comme le rocket-jump ou le crouch-sliding, qui viennent pimenter un gameplay déjà solide.
Outre le panel de mouvements, un bon FPS ne serait rien sans un arsenal varié dans lequel on retrouve les grands classiques du genre : allant de la simple paire de faucilles au lance-roquettes dit "lance-rivets", en passant par les inévitables shotguns ou mitrailleuses. On a même le droit au "super shotgun" en hommage à DOOM II, et une épée magique qui rappel un peu Hexen. Que des pétoires bien connues, malheureusement, et on aurait aimé un peu plus d'originalité de ce côté là. Comme dans les jeux de l'époque, chaque instrument de mort à son propre feeling et sa propre utilité à travers le jeu, le but étant de savoir changer intelligemment de l'un à l'autre en fonction de la situation. Les armes sont également distribués au fur et à mesure de la progression du jeu, permettant une montée en puissance de votre avatar en même temps que la difficulté augmente.
Rien de bien nouveau en vérité, c'est un système qui à fait ses preuves et que l'on retrouve dans de très nombreux jeux, mais qui s'est tout de même raréfié avec l'apparition des FPS "de guerre" dans un style plus réaliste.
Toutes ces armes serviront bien sûr à défourailler vos ennemis et à ce niveau là, DUSK ne déçoit pas et propose un bestiaire varié, qui évolue sans cesse au fil de l'aventure, en plus d'avoir un design bien inspiré dans un style horrifique très marqué. Seuls les boss sont peut-être un peu en retrait par rapport au reste et font plus office de "sacs à points de vies" que de véritable combats mémorable. Fort heureusement, cette tendance tend à être corrigée au fil des épisodes et le boss final est plutôt réussi.
A la manière de DOOM (1994), la campagne solo est divisée en trois chapitres de dix niveaux qui peuvent être joués indépendamment, bien qu'ils aient une continuité au niveau du scénario et une difficulté exponentielle. Il convient donc de commencer l'aventure par le premier épisode afin conserver une certaine logique, même si ce découpage permet une rejouabilité plus simple pour les complétistes.
Le premier épisode fait presque office de tutoriel qui permet de se faire la main sur les mécaniques du jeu et les différentes armes, avec un level-design plutôt simple et une difficulté accessible.
Les joueurs en quête de challenge devront patienter jusqu'au second épisode avant de pouvoir commencer à mettre leur skill à l'épreuve.
Bien que la progression se fasse toujours à la manière de DOOM, c'est à dire en explorant le niveau pour trouver les trois clés de couleurs (bleu, rouge et jaune) qui vous permettront d'ouvrir de nouvelles portes jusqu'à atteindre la fin, une fois rendu au second chapitre on constate que les développeurs ont une bien meilleure maîtrise de la construction des niveaux. C'est même à partir de ce moment que le jeu brille pleinement et met un avant un level-design créatif, qui ne se contente pas de reprendre les mécaniques de ses prédécesseurs. De l'aveu même de Szymanski, son travail a été fortement influencé par John Romero, le célèbre level-designer de Doom et de Quake dont le style non-linéaire se ressent grandement dans DUSK.
Les environnements gagnent donc en complexité et en taille à partir de l'épisode 2 et on voit également apparaître une plus grande verticalité dans les niveaux, ce qui vient ajouter des possibilités d'exploration supplémentaire. Certains passages du jeu s'avèrent être vraiment innovants, mais je ne souhaite pas en dévoiler davantage au risque de spoiler. Cependant, c'est véritablement à partir de l'épisode 3 que viendra l'apothéose et que le jeu montrera le meilleur de lui-même. Du coup, en comparaison, le premier épisode parait bien inférieur ...
Mais cet épisode permet de poser l'ambiance, et avec ses villages de campagne lugubre sur fond de secte mystique, à mi-chemins entre Resident Evil 4 et Texas Chainsaw Massacre, on a la preuve que DUSK n'est pas simplement un simulateur de meurtre old-school, mais bel et bien un jeu qui tente de proposer son propre univers à travers une succession d'hommages et de clin d’œils réussis. L'épisode 2 tranche totalement avec le début du jeu et propose des environnements industriels qui semblent être en décrépitude. L'un des niveaux m'a même rappelé Amnesia : A Machine for Pig... Quant à lui, David Szymanski cite Stalker (le film, et un peu du jeu) comme la source d'inspiration de cette section du jeu et l'on comprend pourquoi en arrivant vers la fin de cet épisode tant le clin d’œil est évident. Enfin, l'épisode 3 opte pour un univers plus gothique, voir Lovecraftien, qui rappellera davantage Quake ou Hexen.
Le scénario étant en retrait avec l'absence de cinématiques, de documents à lire ou de quelconque dialogues, ce sont surtout les éléments visuels qui vont permettront de comprendre ce qui se trame dans DUSK. En faisant attention aux mots inscrits en lettres de sang sur les murs, en analysant les décors et leur cohérence, et en reliant avec le peu d'éléments que nous délivre cette satané voix qui résonne dans notre tête, il est possible de déduire un contexte global au jeu. Rien de bien transcendant, mais un petit plus agréable qui montre l'attention portée au développement. Aussi, la fin réserve un clin d’œil plutôt inattendu, dont je me garderai bien de gâcher la surprise ici.
Quant aux graphismes, ils sont totalement désuets face aux standards actuels, mais néanmoins fidèles aux jeux de l'époque, avec quand même quelques ajouts supplémentaires sympa comme des effets de lumières améliorés.La possibilité d'appliquer des filtres et de personnaliser son expérience rétro est également un ajout sympa, même si je conseille le rendu standard pour un premier run.
Tout le long du jeu, l'ambiance se voit sublimée par une bande-son composée par Andrew Hulshult, ancien de chez 3D Realms et un habitué des musique de FPS rétro, que je connaissais surtout pour son album IDKFA, dans lequel il remixait les musiques du DOOM original.
On retrouve bien la même pate que dans l'OST du jeu d'ID Software, mais à la différence qu'ici les musiques sont dynamiques et les pistes de guitare électrique un poil bourrin viendront surtout se lancer durant les phases de combats intenses. Une meilleure gestion des musiques, pour une meilleure ambiance, permettant de rendre la bande-son encore plus marquante lorsque les pistes plus atmosphériques viennent souligner la découverte d'un nouvel environnement, comme par exemple Beautiful Blasphemy, que j'ai trouvé vraiment mémorable.
Pour conclure, DUSK est bien plus qu'un jeu qui tente de jouer sur la nostalgie des joueurs ou qu'un simple hommage.De part sa parfaite compréhension des codes du FPS des années 90, l'équipe de New Blood Interactive se permet de pousser l'expérience encore plus loin, apportant de vraies nouveautés à un genre quasiment disparu.
J'ai quand même trouvé l'épisode 1 bien moins réussis par rapport au reste du jeu, et ma note aurait pu être plus élevée si le jeu avait été un poil plus constant ou plus long.
Le jeu n'ayant qu'une durée de vie d'environ 8 heures, pour un prix assez élevé, surtout si vous vous contentez de ne pas aller trop loin dans la complétion, le mode survie étant encore trop anecdotique pour vous faire tenir de longues heures... Cependant, les développeurs promettent de nombreux ajouts tels qu'un mode coopération, la prise en charge des mods via Steam Workshop et un mode multijoueur plus consistant. Ce sera sans doute un bon moyen de revenir réajuster la note si jamais ces promesses sont tenues.
Pour moi DUSK aura été une belle expérience nostalgique que je conseille vraiment à tous les amateurs de FPS rapide et nerveux à l'ancienne qui pourront y trouver leur dose de fun assuré.
Un jeu fait par des fans, pour des fans et qui prouve qu'il est encore possible de proposer de très bonnes expériences en utilisant les mécaniques et les graphismes de naguère.
Mise à jour 17/01/2021
Déjà deux ans depuis cette critique et ma première partie de DUSK, il était donc temps de revenir comme promis pour voir s'il convient de changer la note. Et la réponse est : OUI !
Certes, certaines promesses n'ont pas encore été tenues, comme la mise à jour du multijoueur ou le mode coopération Même si maintenant je préfère que Szymanski se focalise sur son nouveau jeu, Gloomwood, très prometteur.
(D'après les développeurs, tout ces nouveaux modes sortiront après que le SDK soit terminé, le jeu n'ayant pas été pensé pour jouer en coop, cela nécessite de réécrire une bonne partie du code).
En refaisant la campagne, beaucoup des points évoqués dans cette critique ne m'en sont paru que meilleur. Même le premier épisode, que je jugeais inférieur, et même si toujours le cas, m'a quand même régalé avec son atmosphère de film d'horreur.
Ce jeu a tellement de variété, d'excellent niveaux, de trouvailles de level-design et de fun... Et surtout cette ambiance démentiel qui tape toujours juste. J'ai aussi davantage apprécié l'univers du jeu, et, seconde partie oblige, la narration par bribes m'a paru plus clair. L'enchainement des niveaux et des situations m'a aussi paru plus logique ce qui a renforcé mon sentiment de jouer à un jeu très bien construit.
J'ai pu également faire les trois niveaux bonus, que j'avais raté lors ma première partie. Ils sont réussis et rallonge bien la durée de vie un peu courte du titre.
Pour avoir fait entre temps d'autres jeux de la même lignée, je trouve que DUSK reste le plus abouti et de loin le plus original des FPS "néo-rétro". Il mérite donc bien son 9/10 et sa place parmis mes shooters favoris. En fait j'ai déjà hâte de me refaire une partie !