On peut généralement juger de la qualité globale d'un jeu à sa séquence d'introduction. Dantesque et grandiose, sombre et effrayante, furieuse et sanglante ; peu importe le registre, si cette fameuse cinématique ouvrant le jeu vous plonge d'entrée dans ce nouvel univers dès les premiers instants, ce peut-être le prémisse d'un jeu qui vous marquera à coup sûr. Ça n'a jamais été aussi vrai avec Fallout, dont la célèbre introduction bercée par une douce ballade des Ink Spots, a marqué une génération de joueurs.

Difficile de juger de la qualité d'un jeu comme Fallout, à l'ère des consoles new-gen et des RPG 'grand public' ? Pas forcément si l'on tient compte des standards graphiques et techniques de l'époque. Une chose est sûre : seuls les adeptes des jeux de rôles old-school et les nostalgiques pourront s'y (re)plonger 14 ans après sa sortie. Les autres, habitués aux graphismes en haute-résolution et aux gameplays simplifiés, n'y verront qu'un fatras de pixels.

Il est vrai qu'il a vieilli, ce Fallout. Les graphismes en 3D isométrique rappellent de prime abord Diablo 2. Le registre est cependant tout autre : l'univers post-apocalyptique du jeu, composé de déserts sans fin, de bases souterraines irradiées, de cités en ruines, de bidonvilles asséchés et de bâtiments décrépits, est tout ce qui reste de la civilisation humaine autrefois glorieuse. Les rétines les plus sensibles pourraient s'irriter de ces paysages parfois à la limite du grossier et de ces personnages peu détaillés, mais l'ensemble garde un côté vieillot assez séduisant. Fallout est certes techniquement dépassé, mais son univers dévasté conserve ce charme triste et cette poésie morne d'un monde dévasté par la folie de la guerre.

Sans plus en dévoiler sur l'histoire, votre personnage est abandonné dans cet univers inconnu où tout lui est hostile : des créatures sauvages aux esclavagistes véreux, en passant par les monstres mutants et les goules du désert. 'Abandonné' est un sort plutôt plaisant pour le joueur, qui aura tout le loisir d'explorer ce monde en se déplaçant librement sur la carte. Durant ces phases de voyage, votre personnage est représenté par un curseur, et vous êtes libre d'aller où vous voulez : rejoindrez-vous directement la ville que vous apercevez au loin, ou dévoilerez-vous ce coin d'ombre inexploré de la carte ? Le choix vous appartient, bien que ces terres arides puissent vous réserver quelques surprises. Ainsi, au cours de vos voyages il n'est pas rare que vous croisiez la route de caravaniers pacifiques, d'ermites solitaires, de bandits de grand chemin ou de créatures errantes... ces événements hasardeux apportent un côté aléatoire bien sympathique à ces déplacements sur la carte.

En rejoignant des villes, vous pourrez alors converser avec quantité de PNJ. Certains vous apporteront des informations, ou peuvent vous donner des quêtes. D'autres sont des commerçants : ils vous fourniront en nourriture, en médicaments, en livres et en armes. Enfin, certains peuvent même se joindre à vous. Ils feront alors partie de votre groupe de combat.

Les combats, justement constituent une importante part du jeu. Chaque protagoniste, allié ou ennemi, dépense chacun son tour ses points d'action (ou PA), ce qui lui permet d'attaquer, de se déplacer, ou d'utiliser un objet. Les tactiques sont variées et, si au début du jeu les combats se résumeront à des coups de couteau maladroits jusqu'à ce que la cible trépasse, ils se corseront au fil du temps. Il vous faudra choisir la bonne arme, gérer vos munitions, savoir se placer hors de portée des ennemis et composer avec vos alliés. A ce titre, il est d'ailleurs dommage qu'on ne puisse diriger ceux-ci au moins pendant les combats : ce qui est peu commode quand l'un d'eux tire dans le tas alors que vous êtes dans sa ligne de mire et vous blesse. Pour le reste, les combats sont assez 'réalistes', très proches des affrontements dans les jeux de rôle papier : les personnages peuvent être projetés au sol, peuvent fuir, être blessés, se servir du décor pour se protéger, etc.

Chaque issue de combat sera le prétexte à un gain d'expérience. Au fil de ce gain, vous monterez en niveau, et pourrez orienter votre personnage vers la manière de jouer qui vous convient le mieux. Si les statistiques de base choisies en début de partie (force, endurance, intelligence, etc.) ne sont pas modifiables, vous déterminerez en revanches les 'talents' de votre avatar. Sera-t-il doué avec les armes à feu ou plutôt au corps à corps ? Sera-t-il capable de crocheter les serrures ou de se déplacer furtivement ? Sera-t-il doué en informatique, en mécanique ou en médecine ? Les choix sont nombreux, bien que l'on notera que certains talents sont très secondaires là où d'autres sont indispensables.

Bref, Fallout est un modèle d'immersion, même pour aujourd'hui. La personnalisation de l'avatar est large, au niveau de ses caractéristiques mais également de son alignement (bien qu'il soit peu intéressant de jouer un bad guy quand on commence le jeu, puisque cela vous empêche d'accéder à certaines quêtes.) L'ambiance graphique et sonore reflète parfaitement un monde à l'agonie, où chacun tente tant bien que mal de s'en sortir. Sa difficulté relative, son univers violent et sa grande liberté en font donc un jeu à réserver aux avertis. Quelques points noirs viennent également tâcher le tableau : une maniabilité un peu lourde (inventaire peu ergonomique, peu de visibilité dans les endroits exigus, déplacements fastidieux notamment quand des alliés viennent se planter dans le cadre d'une porte sans vouloir en partir, etc.), un manque de quêtes annexes et de PNJ secondaires, pas de guildes au choix, peu de spécialisations disponibles au final, une difficulté proche du zéro néant dès lors qu'on est suffisamment puissant (comme c'est malheureusement le cas dans de nombreux RPG)...

Mais ces défauts n'en font pas moins de Fallout un jeu visionnaire dans sa conception, qui ne manquera pas de ravir tous les rôlistes de la première heure, les amateurs de RPG en quête d'univers originaux et les adeptes d'univers sombres et réalistes. Une perle rare.
Testy
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les jeux trop darkdeathshadowofthenight et Les scénarios qui déboîtent la patate

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le 7 sept. 2011

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