Dans cette critique, je vais surtout m'attarder sur le contenu de la quête principale (MSQ) parce qu'autrement mon texte serait trop long et pénible à rédiger. Mais contrairement à une doxa commune au sein de la communauté du jeu, le jeu n'a pas que sa quête principale, son contenu PVE est excellent et mérite attention, alors si vous êtes joueurs, essayez au moins les extreme et le savage.
Il sera aussi question de la MSQ depuis la 2.0, et non pas celle d'Endwalker seule. Par ailleurs, mon approche est très globale, je considère le jeu comme un grand tout qu'il faut prendre du début à la fin. C'est pour cela que je choisi de parler ce qui se joue progressivement plutôt que de répéter en boucle les mêmes choses à propos de chaque extension, ou une liste +/- point par point.
Je vais tenter d'expliquer pourquoi FFXIV propose une aventure merveilleuse qu'il serait dommage de ne pas faire, pour les fans de JRPG et surtout les fans de FF.
XIV est l'opus le plus PS1 dans l'âme que vous puissiez trouver aujourd'hui. Si j'admets que ma formule n'a aucun sens, elle cherche surtout à exprimer mon ressenti. Il y'a ce petit truc indescriptible, commun aux meilleurs opus, qui passionne les fans de la licence. Pour ma part, je n'ai jamais autant aimé un FF depuis le IX. La poésie, le grandiose, le sens de l'épique, l'impression d'évoluer dans un univers merveilleux, sur ces aspects, XIV n'a pas à rougir de ses aînés, ce dernier est abouti sur bien des aspects. Si chacun a ses préférences, j'éviterais de relancer un énième débat sur le meilleur FF en montrant plutôt ce que XIV possède que les autres n'ont pas : une grande épopée de 400h. Les ambitions du jeu changent l'implication du joueur. Ce FF a des retombées émotionnelles bien plus intenses que les autres jeu de sa série.
XIV part d'une base très simple. Vous êtes un aventurier parcourant les contrées d'Eorzea (le continent imaginaire ou se déroule l'action du jeu). Au début du jeu, vous arrivez dans l'une des trois grandes cités-états selon la classe de votre personnages (Gridania et ses forêts, Uldah et ses déserts, Limsa et ses océans) en espérant vous taillez une réputation. Au fil des petites requêtes qui s'enchainent à base de "va donner x à y" "va tuer 5 moustiques", votre personnage se taille une petite réputation locale. Finalement, il va se faire remarquer par les "Scions of the Seventh Dawn" ou "Les héritiers de la septième aube" en français, un groupe de jeunes gens qui surveille Eorzea pour prévoir les risques et catastrophes potentielles. Leur dirigeante, Minfilia, les définit comme "We are the Scions of the Seventh Dawn, an order that transcends political boundaries. Our single objective is the preservation of the future of Eorzea.". Les scions révèlent que votre personnage est le guerrier de la lumière, élu par Hydaelyn, la déesse mère d'Eorzea, représentée par un grand cristal. Avec vos nouveaux camarades, votre personnage, guerrier légendaire à en devenir, va devoir apporter la paix à Eorzea.
Il est important à mon sens de reformuler ce postulat, très vite oublié pour de bonnes et mauvaises raisons plus tard dans le jeu. Fondamentalement dans FFXIV, il sera question d'apporter la paix, quelque soit l'extension. Dans A Realm Reborn, les personnages vont surveiller l'activité des primordiaux(les invocations des anciens FF type Titan Ifrit Shiva....) pour les empêcher de détruire le monde,
dans Heavensward :
il faut mettre fin à une guerre millénaire entre les dragons et les hommes.
dans Stormblood
Il faut mener une révolution et libérer un peuple d'un grand méchant empire
dans Shadowbringers
Il faut sauver tout un monde d'une catastrophe qui risque de le détruire
l'idée culmine avec Endwalker
ou il faut carrément empêcher une apocalypse qui pèse sur tout Eorzea
Chaque extension peut être résumée de la façon suivante : apporter la paix dans x endroit avec ses camarades. La structure de chaque arc ne trahit donc pas ce qu'est votre personnage à la base, un aventurier. La narration est propice à l'idée même de l'aventure, puisqu'il s'agira à chaque fois de découvrir de nouvelles terres, des nouvelles têtes, de nouveaux adversaires, avec en prime son lot de péripéties à foison. Cette formule marche très bien, car le jeu a le sens de l'aventure. Il sait quand il faut baisser la tension, l'augmenter, rester dans l'errance, enchainer l'action, mais qu'importe, à chaque passage, XIV sait comment se rendre marquant (dans un sens relatif) avec un élément particulier.
Toutefois il faut bien garder en tête l'aspect crescendo du jeu, car XIV est en effet extrêmement hétérogène. XIV demande un grand investissement et beaucoup de patience avant de réellement l'apprécier, sous condition d'y adhérer.
A Realm Reborn a cet énorme défaut de ne pas savoir retranscrire le sens de l'aventure et des responsabilités à cause de son quest design bancal et mal pensé. Le jeu souffre à ce stade d'être les restes de la catastrophique 1.0. Ainsi, il faudra être patient à travers la souffrance que le jeu impose. Le principal problème étant que partout, l'on se présente comme un guerrier de la lumière, et les personnages nous accréditant comme "Champion of Eorzea", nos actions consistent en l'exécution de quêtes des pires MMO des années 2000 à base de livraisons et autres. Toutefois, le world design est très cohérent, les transitions entre chaque zones se font sans remarquer la différence sur la DA, donnant l'impression d'évoluer dans un réel tout, sous fond de bonne musique. La dessus, le jeu hérite bien de FFXII. Les personnes charmés par cet enrobage auront moins de mal à traverser la 2.0.
Toutefois, tout n'est pas à jeter. Avec le recul sur le reste du jeu, ARR introduit un tas d'éléments qui vont être très bien utilisés par la suite. Cette entreprise commence à la fin de la 2.0 et se poursuit tout au long du jeu. Toutes les quêtes servant de transition vers Heavensward, vont, en réalité, introduire subtilement les intrigues des autres extensions. Cela donne l'impression de vivre dans un monde cohérent, ou chaque élément finit par avoir une incidence sur les autres, avec des visages qui apparaissent et reviennent plus tard, des parallèles qui se dessinent, des intrigues qui commencent explicitement avant d'être mises en suspens. J'ai donc réévalué ARR quand j'ai vu que ce qui commence dans cet instant du jeu a ses conséquences sur la suite de l'histoire. L'exemple le plus impressionnant est sans aucun doute la série "Tour de crystal", au départ n'étant qu'une simple quête annexe, celle-ci est devenue obligatoire au vu de son importance cruciale 200h et quelques plus tard.
Ce procédé de construction du monde participe grandement au sentiment de voyage. Voyager, c'est aussi découvrir des cultures et nouveaux visages. Que dire si ce n'est que XIV entreprends très bien de ce côté-ci. Chaque zone réserve son lot de nouvelles découvertes, et le jeu est assez bon pour marquer chaque tribus, personnages, avec des traits caractéristiques uniques que l'on ne retrouve pas chez les autres acteurs du jeu, qu'ils soient physiques, culturels, architecturaux ou linguistiques. L'exotisme et le dépaysement sont au rendez-vous, deux ingrédients clés pour rendre une aventure marquante. Toutefois, le jeu a un énorme problème pour impliquer son joueur dans la géopolitique du jeu. Cette dernière est très bâclée à coup d'exposés scolaires de la part de certains personnages, pire encore lorsque le jeu décide juste de namedrop. De plus, la géopolitique la plus importante se fait toujours hors écran, et le jeu peine beaucoup à faire vivre aux joueurs des changements qui ne vont guère le toucher. Par ailleurs, la géopolitique inexistante de Shadowbringers me fait presque croire que le jeu a compris qu'il est bien plus efficace quand il n'est rien d'autre qu'un concentré d'aventures dans des contrées lointaines. Néanmoins, un certain arc 82-83 d'Endwalker est particulièrement réussi à propos du point que je viens critiquer ici, car le jeu fait un réel effort pour nous impliquer dans les intrigues locales, la réalité du terrain est réellement vécue.
En définitive, le jeu propose un univers très merveilleux, attachant, qui sait se rendre unique et singuliers avec les nombreux concepts de fantasy qu'il invente, reprends et utilise à son échelle.
Les voyages mémorables sont souvent ceux qui marquent un avant et un après. XIV montrent que les choses ont changé à travers son casting. D'une part, cela s'effectue à travers les visages familiers qui reviennent. Les personnages qui reviennent amènent toujours avec eux cette familiarité rappelant les moments passés avec eux dans certains arcs. D'autre part, l'impression d'avoir fait un bout de chemin s'incarne directement à travers le cast principal, les Scions. Entre le début et la fin ils ne sont plus du tout les mêmes. Toutes les rencontres, les péripéties, les moments de doute, de tristesse, de joie, de remises en question, font réellement changer les personnages. Il faut le dire, que cette idée culmine particulièrement avec Shadowbringers et Endwalker, les deux dernières extensions ou le jeu décide (enfin) de se recentrer sur les Scions. Le jeu sur le long terme finit par appuyer l'importance du voyage pour le simple voyage, pour les effets bénéfiques que l'on tire sur le plan personnel. C'est bateau certes, mais en sortant d'Endwalker, ça en devient limite émouvant, de voir une telle déclaration d'amour à l'aventure. Alphinaud est certainement le meilleur exemple du personnage qui a parcouru un sacré chemin depuis le début de l'aventure. Il passe d'une tête à claque arrogante à une longue remise en question qui s'effectue sur le vécu du reste de l'aventure. Thancred aussi a fait beaucoup de progrès tout au long de Shadowbringers. C'est en prenant le temps de montrer un changement qui s'effectue pendant des centaines d'heures que le joueur est impliqué dans les personnages du jeu. A force de les cotoyer depuis A realm reborn, on vit tant de choses à leur côté, qu'il est très difficile de ne pas les aimer pour la personne adhérant à la proposition du jeu. Chacun brillera (ou l'opposé) au moins une fois dans le jeu. Ce long investissement permet des scènes en émotions fortes durant Endwalker.
Progressivement, le jeu va donner du sens au terme d'épopée. Si le terme est d'abord désuet pendant les livraisons subies d'ARR, la suite va être une montée constante en puissance. Progressivement, les actions de notre personnage vont devenir héroïques, puis mythologiques, les menaces ne font que gagner en pouvoir. La montée en crescendo devient jouissive. D'un simple aventurier perdu dans une guilde nous devenons une légende. XIV arrive à rendre un personnage muet et sans personnalité intéressant, tâche qui semblait impossible au début du jeu. En effet, ce travail est entamé d'abord avec les quêtes optionnelles du chevalier noir, puis lors de Shadowbringers et Endwalker. Le jeu pousse jusqu'au bout sa manie d'héroïser son guerrier de la lumière, et dressera tout plein de parallèles intéressants avec des personnages que l'on croise. Mais au final, le jeu n'oublie pas qu'à la base on joue un simple humain qui voulait partir à l'aventure. Tout en modestie, notre personnage révèle une certaine mélancolie à travers ses interactions pendant Endwalker. Notre personnage ressent des choses, a ses envies, certains choix de réponses sont marquants tant ils révèlent son état, ma préférée étant sans doute celle qui sert de titre à cette critique, arrivant bien tard dans Endwalker
We will find our way, Venat. Ou encore "That, I can't deny".
Le jeu opère un joli petit tour à rendre attachant notre guerrier de la lumière, lui aussi évolue tout au long.
Il faut donc voir XIV dans sa globalité, comme un long voyage vécu avec un casting attachant qui progressivement deviendra de plus en plus attachant. C'est pour cela que ce Final Fantasy demande bien plus d'investissement que n'importe quel autre opus de la série, et c'est aussi pour cette occasion qu'il laisse une marque bien plus forte qu'avec ses prédécesseurs. De même pour le scénario, ce n'est qu'en terminant la 5.0 que le jeu donne des éléments globaux qui permettent de donner du sens au scénario. Bien sûr, Endwalker pousse cette idée encore plus loin et de façon presque inattendu.
Derrière toute l'action, les scènes shonen, les scènes d'épique qui s'enchainent, se cachent en fait un jeu intimiste et touchant à son sortir, et XIV a parfaitement conscience de cela en vue des scènes qu'il propose à la toute fin d'Endwalker, deux exemples me viennent en tête, bien sûr ne lisez pas à moins d'avoir fini
Le premier étant le sacrifice de Graha à la fin, ou il demande de lui promettre qu'on visitera plein de contrées ensemble. La deuxième étant une série de cinématiques, avant de décoller pour Ultima Thule, ou le WoL va discuter avec chacun des Scions à Sharlayan pour leur demander ce qu'ils pensent jusqu'à présent, et discuter éventuellement de plans qu'ils ont après avoir sauvé le monde. Le jeu s'émancipe presque de l'épopée héroïque pour s'attarder sur l'après, c'est beau.
Rare sont les histoires qui captent la sensation de vivre la fin de quelque chose. XIV est propulsée par Endwalker, la consécration de tout ce qui est raconté depuis le début du jeu. L'extension canalise une constante mélancolie car nous vivons les 35 dernières heures d'une grande épopée, ce sentiment de fin indescriptible, et pourtant si puissant. Le jeu reste humble, il n'en fait ni trop, ni assez. XIV ne tombe pas dans certains poncifs du grand final (attention je ne dis pas qu'il n'en utilise pas), ou bien il n'a pas la prétention arrogante de faire une Avengers. Non, le jeu arrive à se recentrer sur une histoire intimiste alors que dans son cadre, les enjeux n'ont jamais été aussi grave et important. Soulignons également le travail de Masayoshi Soken, sans qui l'émotion du grand final n'aurait jamais été possible.
Ce Final Fantasy est abouti, difficile d'être fan de la licence et de ne pas l'aimer. Il a une place bien méritée parmi les meilleurs opus de sa série, un hommage à ce qui a fait sa gloire, sans empiéter les autres opus. Son équipe, passionnée, à tirer de la licence une essence, exaltée dans cet opus sonnant comme un cadeau pour les fans. Il est en quelque sorte l'aboutissement de tout ce qu'a été la licence depuis ses débuts, FFI compris. XIV est un hymne à l'aventure, une lettre d'amour à Final Fantasy.