Dans le jeu vidéo il y a souvent de beaux gâchis. Des titres qui passent à la trappe par incompétence, manque de communication ou juste pas de chance dans un contexte peu favorable. Grandia cumule malheureusement tout ces critères tout en étant un jeu particulièrement aboutit techniquement et artistiquement. Grandia est un jeu développé "artisanalement" à la manière "vielle école". Plusieurs année de développement ont été nécessaire pour aboutir au projet final puisque le jeu fut commencé aux tous débuts de la Saturn. Le résultat ? L'un des titres Saturn les plus peaufiné techniquement, il démontre avec élégance les capacités de la machine en matière de mélange 2D et 3D. Cela, allié à un design steampunk tout à fait sympa mélangé avec les classiques gimmick manga de l'époque sans doute inspirés de Nadia.
La modélisation du jeu est un mélange de décors 3D posé sur un "sol" en 2D, le tout se marie très bien et donne un aspect singulier avec de très jolis effets tel que : cycles de couleur, distorsions et de jolies transparences. L'animation est très fluide et bien mise en avant grâce à certains plans très cinéma qui donnent au jeu une belle dynamique dans sa mise en scène. La 3D joue ici un rôle important, Grandia est surement le jeu le mieux modélisé de la console. Pas un poil de texture floue ou pixélisée. Les couleurs sont bien choisies et l'architecture des bâtiments et des vaisseaux particulièrement inspirée. On est très loin de la modélisation grossière des Shining Force, Daytona et autre Tomb Raider. Même Radiant Silvergun qui ne tape pas dans le même registre (+ en 2D), n'arrive pas à la cheville de Grandia au niveau de la 3D.
Les différents environnements du jeu sont présentés de manière classieuse, et l'intro provoque invariablement la même réaction chez le joueur : "ca commence bien !". Mais au delà de ces graphismes et de cette modélisation léchée, il y a la BO. Les musiques de Grandia sont toutes lues en streaming, pas de piste audio et donc pas de blanc à la fin d'un morceau. Les développeurs auraient pu utiliser le synthétiseur de la Saturn et ses capacités hors norme, mais ils ont opté pour un juste milieu. La technique du streaming est plus facile à mettre en place que la musique en temps réel gérée par un synthé et beaucoup moins limitée que les simples pistes audio CD. Dites-vous bien que les thèmes du jeu sont aussi réussis que les graphismes. La musique de Grandia est à l'image du design : steampunk. Elle mixe habilement instruments traditionnels et synthés, complètement dans le ton du mélange médiéval-science fiction. La BO de Grandia est tout simplement excellente, rythmée et totalement cohérente avec l'univers du jeu que ce soit durant le ingame ou les phases de cinématique. La fin du jeu étant du même acabit, c'est a dire une récompense pour les heures passées à jouer.
En effet, comme tout RPG qui se respecte, Grandia nous raconte une histoire. Certes, un peu téléphonée mais fabuleusement mise en scène. Les cut scene 3D sont déjà d'une qualité remarquable, mais les cinématiques en synthèses sont au niveau de celles d'une PSX, ce qui est très rare sur Saturn. Cela démontre en même temps ce que la console à dans le ventre, mais aussi que de nombreux développeurs ne l'ont jamais exploitée. Du début à la fin le jeu est ponctué d'envolées narratives, qui sans être très originales, sont toutefois très bien amenées et intégrées dans le jeu. L'un des points culminants étant le passage du mur... et la difficulté qui s'en suis... heureusement le gameplay est bien pensé.
Le système de jeu mélange magie et frappe, il est classique mais assez profond et sans faute. Point intéressant, vos magies ont des niveaux et pour les faire grimper en puissance vous devez les utiliser. Certaines se combinent pour donner naissance à de nouveaux pouvoirs. Le système de combat est en temps réel au tour par tour, complètement à l'opposé des Final Fantasy de l'époque. Ce système apporte parfois un stress qui n'est pas désagréable après coup. Le jeu n'est pas spécialement difficile, puisqu'il est jouable en japonais et l'histoire est assez simple pour être comprise sans le texte.
La version Saturn, qui est le jeu d'origine, à été localisée aux US et puis en Europe sur la PSX. Cela permettra aux retardataires de faire le jeu en franglais... hum, oui le portage PSX est une catastrophe d'incompétence. D'une part la belle 3D Saturn se retrouve ici transformé en vomis de pixel avec une modélisation digne d'un mauvais décors de nanar. Pire, le doublage anglais est digne d'un film de fesses et cerise sur le doubitchou la version PAL propose le doublage français par dessus le doublage anglais. Un amateurisme que même un débutant ne ferait pas. Il faut prendre en compte que Grandia ne fonctionnera pas correctement sur les Saturn PAL en 50hz, les cinématiques seront détériorés au niveau du son et/ou de la synchronisation audio. Donc, à faire uniquement sur une Saturn 60hz. Grandia a pâti des mauvaises ventes de la Saturn en occident et n'est jamais sorti du Japon. Le jeu a sans doute été porté à la va-vite. Du coup la PSX a héritée d'une version bâtarde en plus d'insulter le travail fournis par les développeurs de la version Saturn. D'ailleurs, si l'on regarde les notes SC sur ce titre, elles sont issues de la version PSX et certaines critiques taillent sans prendre en compte la version Saturn. A noter que la moyenne du jeu est assez élevé alors que la plupart a joué à la version la moins bonne.
Si l'on fait abstraction du portage moisi de la version PSX, Grandia est une réussite en tout points, un jeu cohérent autant dans sa réalisation technique que dans son univers. Dommage qu'il soit aussi peu connu des joueurs, parce qu'une telle exécution se devait d'être récompensée. Il y a tellement de mauvais jeux qui sont largement plus diffusés alors que celui-ci est resté quasi confidentiel. Qu'a cela ne tienne, sur ce coup les absents ont toujours tord. Surtout quand ils ratent la belle histoire teinté de SF et de fantastique racontée par Grandia.