Spider Man a de la concurrence
Quand j'ai acheté Gravity Rush, je partais avec l'idée que j'allais jouer à un bon jeu, voire à un très bon jeu. Ce à quoi je ne m'attendais pas en revanche, c'est qu'il allait être aussi plaisant et addictif. Gravity Rush, c'est un peu LE jeu de la Vita, celui qui sait habilement utiliser les fonctionnalités et les atouts de la consoles pour les rendre ludiques et les mettre au service d'une ergonomie novatrice et pertinente.
Le principe le plus vendeur de Gravity rush est son gameplay, indéniablement atypique. En effet, le jeu promet au joueur de contrôler la gravité et l'orienter dans n'importe quel sens. Il devait donc être possible de tomber vers le ciel ou encore de marcher sur les murs. Vous savez quoi ? Le jeu tient toutes ses promesses ! Il ne fait pas les choses à moitié. Mise à part les limites de la ville, rien ne nous arrête dans nos déplacements. On va où bon nous semble, que ce soit à pied ou en tombant.
Oui, c'est une des features les plus appréciables de ce jeu. On ne vole pas, on chute dans le sens que l'on choisit. Une simple pression de la gâchette R suffit pour inverser la gravité. Ensuite, on appuie sur deuxième fois sur R pour stopper notre chute et orienter la gravité avec le stick gauche. A nous la voltige au dessus des toits et même sous la ville (qui repose sur des pilier). La liberté est totale, et les sensations bien présentes. Quel pied de voyager dans ce jeu ! Contrairement à pas mal d'open-world, qui deviennent vite fastidieux avec des aller-retours incessants, Gravity Rush arrive à rendre les déplacements jouissifs et rapides. Pas de circulation de piétons et de bagnoles à gérer, pas de véhicules poussifs ou de grandes lignes droites interminables ! Une bouffée d'air frais !
Pour couronner le tout, la ville est très jolie. En partant de choix artistiques simples, Gravity Rush a réussi à rendre ses environnements attrayants. La ville se décompose en quatre parties principales. une zone industrielle, une zone d'habitations réservée aux classes moyennes, une zone de commerces et de loisirs et enfin une dernière qui correspond au centre-ville, avec ses immeubles immenses et modernes. On peut même ajouter deux autres environnements, tout aussi beaux et agréables à parcourir. Faites le calcul : un mode de déplacement super agréable allié à un univers travaillé et dépaysant. Vous allez adorer vous balader, même sans raison précise.
Après, même si le jeu est très beau, il souffre de certaines limites techniques relativement visibles. L'aliasing d'abord est assez féroce. C'est surtout évident sur les personnages, notamment Kat. Heureusement, ce constat est contrebalancé par des animations de toute beauté qui retranscrive à la fois toute la grâce de la très belles héroïne et les effets de la gravité sur son corps qui se tord dans tous les sens pendant les chutes. Les animations de Kat ont même un intérêt dans le gameplay : le sens dans lequel tombent ses cheveux indique la direction de la gravité. Les développeurs ont également pensé à masquer la faible profondeur de champ en utilisant le style artistique du jeu. En effet, tout le jeu est en cell shading, c'est-à-dire que les environnements comme les personnages ont un contour noir qui leur donne un aspect bande dessinée. La Team Siren en a profité pour donner du cachet à la profondeur de champ : quand on s'éloigne ne ne voit plus que les contours des bâtiments, comme sur croquis et quand on se rapproche, la ville se redessine progressivement. Une très bonne idée qui montre la volonté de l'équipe de développement de faire de Gravity Rush un jeu à la fois techniquement et esthétiquement intéressant.
Et vous savez quoi ? Les balades en villes bénéficient même de thèmes musicaux magnifiques. En effet, la bande-son a bénéficié du talent de compositeurs consciencieux qui savent bien qu'une ambiance dépend en grande partie du combo gameplay + musique. Les mélodies sont divines et on passe par de nombreux styles de musiques, selon les situations et les lieux. La ville devient encore plus pittoresque et les combats encore plus épiques !
En parlant de combats, sachez que Gravity Rush est aussi un jeu d'action et qu'il conviendra de régulièrement péter la gueule à divers monstres au design douteux. Il est possible de les combattre au sol, ou de privilégier les combats aériens, bien plus dévastateurs, mais aussi bien plus bordéliques. Et c'est ici qu'on touche aux limites du concept de Gravity Rush. Les combats sont tout sauf palpitants. Et encore, s'ils étaient lisibles, ça irait, mais dans les faits, ils sont surtout bien bordéliques et mettent en relief les tares du gameplay.
Il faut bien l'avouer, le concept de la gravité fonctionne plutôt bien la plupart du temps. Mais la caméra vient trop souvent casser notre plaisir en partant dans tous les sens et en nous faisant perdre nos repères. C'est encore plus vrai durant les combats, où il suffit que tous les ennemis aient des attaques à longue portée pour que la pauvre Kat se retrouve dans une tournante de projectiles qui viennent de mobs hors-champs. C'est parfaitement frustrant ! De plus, les combats aériens peuvent poser un sérieux problème dans le sens où les ennemis sont souvent mobiles et peuvent esquiver les attaques. On passe donc notre temps à bouger dans tous les sens et à replacer la caméra qui se barre on-ne-sait-où. Déjà que c'est pas palpitant, ça en devient agaçant. D'ailleurs, vers la fin du jeu, on passe notre temps à combattre des ennemis. C'est pas rigolo !
Voilà donc les limites ludiques de Gravity Rush. Il repose sur le diptyque plateforme/combat, mais n'a pas réussi à l'équilibrer. Les phases de plateforme couplées à une recherche de gemmes d'upgrades sont stimulantes et réellement amusantes. Les combats ne sont vraiment pas fun et peuvent même gâcher le plaisir du joueur en traînant en longueur.
Cet écueil remet gravement en question l'intérêt du jeu sur le long terme. Mis à part le scénario principal, il n'y a pas grand-chose à faire. On peut rechercher des gemmes, mais on les trouve assez facilement, et on peut débloquer des défis, qui proposent un peu de challenge (assez inexistant le reste du temps) et de faire péter les high-scores. Si certains sont assez intéressants, ils tournent vite en rond. Certains sont même super relous car ils obligent le joueur à utiliser les fonctions gyroscopiques du jeu qui ont été mal programmées. Cela partait d'une intention, mais en pratique, c'est une horreur à contrôler. Dommage pour un jeu au gameplay aussi bien foutu.
Que dire de plus ? Ah oui le scénario ! On l'oublie facilement celui-là ! Il n'est pour ainsi dire pas très intéressant. Pourtant, encore une fois, ça partait avec de bonnes idées, mais en fait non. Les personnages sont creux, les enjeux très convenus et la narration méga-lente. La fin est d'ailleurs très décevante puisqu'elle n'est là que pour faire le raccord avec un hypothétique deuxième épisode. Résultat ? On n'en sait pas plus à la fin qu'au début. Petite note positive tout de même : les dialogues sont bien écrit et parsemés d'humour. Néanmoins, j'ai été très déçu du scénario. Heureusement, l'histoire dans les jeux vidéo n'est que secondaire et Gravity Rush est u jeu plus qu'honnête avec le consommateur.
En effet, si vous possédez une Vita vous vous devez d'acheter ce jeu, vous en aurez pour votre argent. Il est beau, prenant, et son gameplay est aussi novateur que bien conçu. Il exploite habilement les avantages de la Vita et justifie même l'achat de cette console. Je vous le dis tout net : Gravity Rush me redonne espoir en l'avenir de jeu vidéo. Les éditeurs savent encore prendre des risques et proposer des expériences différentes et inédites. Gravity Rush, c'est un jeu qui nous rappelle que le jeu vidéo c'est un art, l'art de l'interactivité numérique. J'ai été touché par la bonne volonté de la Team Siren qui a tout fait pour faire plaisir au joueur mais en gardant son intégrité créative. Ce genre d'oeuvre se fait de plus en plus rare et mérite d'être saluée. Gravity Rush, ce n'est pas un jeu parfait, mais c'est un jeu sincère dans sa démarche artistique et c'est en cela qu'il est meilleur que la grande majorité des jeux actuels qui cherchent à placer le jeu vidéo dans le cadre de l'art contemporain, alors que le jeu vidéo est un art qui doit rester indépendant des conventions artistiques, afin d'échapper à son statut d'industrie qui commence à le rattraper et à ternir son image d'espace de liberté créative.