Saga culte pour les joueurs Xbox et en particulier aux États-Unis où les opus ont régulièrement tutoyé les sommets des charts tout en permettant d’écouler nombre de consoles estampillées Microsoft, Halo jouit d’une réputation plus que flatteuse.
La découvrir de nos jours garantit a minima de se confronter à une légende du first person shooter sur console. Et tant qu’à faire, autant se faire plaisir en optant pour une Master Chief Collection qui reprend les quatre premiers jeux, dont la version Anniversary du premier volet, Halo : Combat Evolved, sortie en 2011 pour souffler dignement les dix bougies de ce jeu fondateur.
Alors on enfile sa combinaison de Spartan, on vérifie le nombre de chargeurs à disposition et on revoit ses exigences graphiques à la baisse, car l’heure est venue d’exhumer toute une saga devenue mythique.


Et vient le premier choc, celui du constat du travail remarquable réalisé par 343 Industries (qui a succédé à Bungie aux manettes de la série) pour la version Anniversary. D’une simple pression sur un bouton, il est possible d’alterner entre rendu graphique de 2001 et de 2011. Symbole d’une refonte graphique remarquable, le jeu ne jure pas en 2019, à tout le moins dans sa configuration optimale sur écran 4K depuis une Xbox One X.
Par ailleurs, cette petite option permet d’illustrer le gap graphique entre la génération de la Xbox et celle de la Xbox 360.
Petit bémol, toutefois, cette décision n’étant pas sans conséquences sur le level design ; elle a en effet contraint 343 Industries à reproduire le plus fidèlement possible les niveaux tels que Bungie les avait conçus à l’époque. Pas de surprise, pas de prise de risque. On y reviendra.


Sans doute difficile à imaginer pour certains, mais Halo : CE constituait une prouesse graphique à sa sortie. Il faut dire que la direction artistique à base de couleurs pétaradantes et fluorescentes, qui peut ne pas plaire, est suffisamment singulière pour donner immédiatement une identité à la série, en totale rupture avec les jeux d’action et de tir gris et monotones de l’époque. Et la Xbox en avait suffisamment sous le capot pour faire baver d’envie tous les consoleux de l’époque, qu’ils soient sur PS2, Dreamcast ou N64.


La découverte du jeu aujourd’hui est d’ailleurs assez révélatrice d’un jeu révolutionnaire en son temps, tant on se rend compte de la très relative évolution de l’intelligence artificielle depuis 2001. Bien sûr, il y a des contre-exemples, mais alors qu’il est encore fréquent de jouer à des FPS ball-trap avec des ennemis prévisibles et statiques, où on aligne des headshots sans trop se forcer, Halo : CE s’était efforcé de proposer des ennemis mobiles et plutôt malins. Qu’ils tentent des pushs latéraux ou de déloger le joueur avec une grenade, voire de se faufiler en fufu pour nous backstabber, les ennemis ne sont pas juste des faire-valoir prêts à crever sans vendre chèrement leur peau. Et en plus, certains d’entre eux sont vraiment drôles : les grognards sont du genre francs et virulents à cinq mais trouillards et geignards dès qu’on dégomme quelques-uns de leurs copains.
Au final, seul le côté archétypal de chaque classe ennemie peut décevoir. Un ennemi à bouclier reste caché derrière sa protection au loin pour mitrailler le joueur, plutôt que de tenter des avancées. De même, un gros balèze à lance-roquettes avance en tirant sans jamais songer à battre en retraite quand sa vie fond à vue d’œil.
Encore plus cons, les parasites ne se posent aucune question et rushent le joueur dès qu’ils perçoivent sa présence.
Reste que les affrontements sont souvent tendus et que les covenants ne se laissent pas faire. Il convient de relativiser cette remarque, ne sachant pas trop si la version Anniversary a apporté des modifications ou si le jeu original comportait déjà une telle IA. Si un lecteur de cette critique a l’info, ça m’intéresse de l’avoir en commentaire.
Les dernières missions, en solo, proposent un challenge rappelant à quel point les jeux sont devenus faciles de nos jours. Sans être trop ardu, certains passages nécessiteront plusieurs tentatives pour être réussis et ça fait du bien de sentir un petit peu de résistance. N’imaginez pas non plus un jeu difficile, il est juste bien dosé pour proposer un minimum de résistance en mode normal.


Niveau maniabilité, c’est vraiment du bonheur et il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les joueurs Xbox ont toujours soutenu que cette saga avait révolutionné le FPS sur nos consoles de salon. C’est fluide, précis et vraiment smooth. Enfin, c’est le cas pour les phases à pied !
Dès lors qu’il s’agit de conduire un warthog (gros 4x4 militaire), la maniabilité devient infernale et il est impossible d’être précis. Les fervents défenseurs diront qu’on finit par s’y faire, ce qui est partiellement vrai. Reste que Bungie s’est véritablement compliqué la vie sans que ça ne se justifie avec une conduite tout simplement contre-intuitive. À vous les joies des virages manqués, des crashs dans les rochers et des warthogs retournés parce qu’il est impossible d’être précis avec ces engins sans des heures et des heures d’expérimentation. Et malheureusement sur ce point, la version Anniversary n’a rien modifié.
Pour en finir sur ce point, carton rouge à la dernière séquence de jeu, juste infâme tant la maniabilité du véhicule est horrible en lieu confiné, mais en plus bourré d’obstacles et avec un chrono… L’idée de merde !
D’autant que 343 Industries n’a pas jugé opportun de toucher à la structure du jeu, jusqu’à ses check-points mal placés. Il manque une seconde pour monter dans le vaisseau (ne riez pas, ça m’est arrivé et les murs de l'appartement m'entendent encore) ? Ce n’est pas grave, on recommence toute cette séquence horrible. Alors bon gré mal gré, le joueur finit par réussir la séquence d'un coup et dans les temps, mais il garde forcément un mauvais souvenir de la fin du jeu.


Côté game design, ce premier opus de la saga est particulièrement sage, scolaire et fainéant. Le jeu est découpé en une dizaine de chapitres qui vont invariablement alterner entre phases en extérieur et en intérieur.
Les premières offrent à découvrir des zones assez vastes qui proposent parfois plusieurs cheminements possibles, même si l’on comprend rapidement qu’il faudra passer partout. Les secondes imposent en revanche de longues heures à arpenter des couloirs qui se ressemblent. Inutile de préciser que les premières sont les plus intéressantes.
Cette parfaite symétrie (à une ou deux exceptions près) a d’ailleurs pour effet de rendre la campagne de plus en plus lassante et les dernières missions pourront sembler longues, d’autant que le jeu recycle pas mal à la fois environnements et ennemis. À ce sujet, le niveau de la bibliothèque est un gigantesque foutage de gueule, tant l’on a l’impression de visiter de long en large et en travers les mêmes environnements répétés sur plusieurs étages.
Dommage donc que Bungie se soit imposé un tel schéma, redondant et offrant peu de place à l’originalité. Dommage également que la version Anniversary n’ait pas opté pour une amélioration du jeu, autre qu’esthétique.


D’un point de vue technique, c’est globalement propre. En dépit de quelques ralentissements durant des cinématiques et des textures qui tardent à s’afficher (très rare), c’est clean et fluide.
Notez tout de même qu’en dépit des années, le jeu n’est pas exempt de bugs. Recommencer une mission complète car un script a décidé de ne pas se déclencher est un « plaisir » que les joueurs modernes ont oublié… Rien de grave, mais un bug bloquant comme celui-là fait d’autant plus râler que le jeu est vieux.


Point de vue narration, le jeu accuse le coup et ce n’est pas toujours très clair. Les problèmes viennent parfois du mixage sonore qui est inconstant et entraîne des baisses conséquentes du volume des voix, ne favorisant pas toujours la compréhension. Mais globalement, on comprend et on traverse l’histoire avec plaisir.
En parlant de son, c’est peut-être le moment idéal pour saluer la grande qualité de l’OST avec des thèmes inoubliables qui renforcent grandement l’ambiance.


Au final, se faire Halo : CE si longtemps après sa sortie, en particulier dans les conditions offertes par la version Anniversary, constitue un plaisir réel où l’on mesure le coup de tonnerre qu’a été sa sortie dans le petit monde des FPS consoles il y a maintenant 18 ans.
Reste que les défauts intrinsèques du jeu et la partie technique pas irréprochable gâchent un peu le tableau. Mais il y a fort à parier qu’Halo 2 a su corriger ces problèmes. Car comme le conclut Master Chief en fin de jeu, ce n’est que le début.

FlibustierGrivois
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le 24 juin 2019

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