Annoncé en 2014 à la Gamescom, c'est 3 ans plus tard que nous pouvons poser nos mains sur Hellblade : Senua's Sacrifice. Au menu, la promesse d'un jeu indépendant mais point de pixel art ici, on parle de AAA indie. Et aux commandes, c'est Ninja Theory notamment connu pour le reboot de Devil May Cry en 2013.
HELA ELLE L'A (TOUTOULOUU TOUTOULOUUU)
A bord d'une barque, une femme vêtue de peaux de bêtes et autres vêtements rudimentaire, avance lentement dans un paysage à la fois naturel mais menaçant quelque part... Cette femme c'est Senua, guerrière Celte entreprenant une quête désespérée afin de ramener son défunt compagnon à la vie. C'est en possession du crane de ce dernier (Les Celtes pensaient que l'âme des défunt restaient dans leurs cranes) qu'elle part braver les épreuves qui lui permettront d'obtenir audience auprès de Hel (ou Hela) : Déesse des Morts.
LAS VIKING PARANO
Mais attention, contrairement aux héroïnes habituelles, Senua n'a rien d'une Lara Croft ou d'une Bayonetta. Point de sarcasme ni même d'assurance outre mesure car la jeune femme est atteinte de trouble mentaux... En proie à la folie, de nombreuses voix n'auront de cesses de tourmenter, commenter, rabaisser, railler, féliciter, conseiller, ou encore rire de chacune des actions que vous ferez. Autant de messages contradictoires qui contribuent à vivre également ces troubles mal connus de psychoses mentale.
Car parlons en du travail sur l'audio : peu de musique vous accompagneront lors de votre périple, ici c'est les bruitages qui font absolument tout. Des bruits naturels, oui, mais également ces fichus voix aux doublages enregistrés avec un talent rarement vu (les doublages sont en anglais et les sous titres en Français).
La démence s'accompagnera également d'apparitions visuelles fortes, venant renforcer tout l'aspect audio du titre.
YOU'RE TALKING TO ME ?
Techniquement, le jeu en impose. Surtout quand on pense qu'il ne s'agit pas d'un jeu à gros budget (ni à petit mais tout de même). Le jeu se paie le luxe de rivaliser avec les grands et d'afficher des effets de lumières percutant, bien aidé par une direction artistique tout en justesse. Mention spéciale pour Senua dont la motion capture est bluffantes, félicitation à Melina Juergens pour son motion acting.
En plus de cela, le jeu jouit d'une mise en scène de haute volée avec des angles très bien conçus, notamment le recours à ces plans ou l’héroïne semble s'adresser directement au joueur, nous donnant l'impression de pénétrer son esprit et ses pensées torturées.
Les décors, eux sont peut être un peu moins marquants.
Un point noir tout de même sur la caméra in game, fixée très prés du personnage et qui m'aura donné un peu mal aux yeux tout du long. Ce choix se justifie probablement par le fait qu'une caméra proche permet d'afficher un spectre moins large et donc moins de détails en même temps.
VALHALLA
En terme de Gameplay, le jeu alterne phase d'exploration (linéaire, vous n'avez pas 36 chemins) et phase de combats. Ces dernières sont plutôt bien rendue visuellement mais sont assez binaire manette en main, explication : Senua dispose de plusieurs coups à savoir, coup léger, coup lourd, blocage, esquive et attaque sautée (c'est comme les pommes de terres sautées mais en attaque).
Et chaque ennemi aura sa petite technique, le bon enchaînement pour en venir à bout. La ou l’ennemi de base se prendra n'importe quel coup, ceux aux boucliers auront besoin d'une attaque sauté afin de mettre à mal leur défense et asséner ensuite un coup etc... Sympa, ça fait le boulot sans réinventer la roue.
Durant les phases d'exploration vous aurez à résoudre quelques énigmes. Souvent à retrouver des formes ou symboles précis dans le décor afin de déverrouiller les runes correspondantes qui bloque une porte. Certaine seront un peu plus retorse, non pas à cause de leurs difficultés mais à cause d'un level design qui, à 2 ou 3 reprises, n'a pas toujours été bien pensé.
RAGNAROK
L'histoire du jeu sera nébuleuse sur toute la première moitié du titre mais tendra à s'éclaircir dans la seconde. On y apprendra notamment le passé de Senua, son histoire et les personnes ayant eu une influence majeure sur son développement. Le résultat est très intéressant. Sachez tout de même que la narration est assez cryptique et énigmatique notamment à cause d'un véritable choeur de commentateurs / narrateurs mélangeant référence mythologique et phrasés philosophique. Déstabilisant au départ mais tout à fait digeste une fois dans l'ambiance.
OUI MAIS POURQUOI LA VALKYRIE... RIE ?
Hellblade est un jeu qui se vit avant tout. En tant que pure objet vidéo-ludique, il n'est pas spécial, ni même jouissif manette en main. Il ne brillera pas pour son ingéniosité ou son intelligence de conception. Mais en tant qu'aventure c'est tout autre chose. En choisissant de dépeindre les troubles mentaux sur fond d'histoire d'amour perdu, Ninja Theory prend à contre pied les thématiques archi-rabâchées du média et nous offre une fable noire, baignant dans la mythologie scandinave et qui n'épargne rien à son héroïne inoubliable. On en ressort secoué, éprouvé, mais aussi satisfait de ces 7 ou 8 heures qui nous auront fait vivre quelque chose de vraiment pas banal.
Imparfait mais terriblement marquant.