J'ai lutté longtemps contre un ami, un fan un peu trop hardcore de Hollow Knight, pour ne pas acheter ce jeu, et il y a peu de bataille que je sois aussi heureux d'avoir perdu.
Dans ce MetroidVania indépendant, on incarne un petit scarabée (ou perce-oreille, selon les sources) devant faire des trucs qui reviennent pratiquement tous à spoiler. C'est un jeu génial, laissez moi vous détailler le pourquoi du comment.
Quelque chose, pour commencer, de plaisant avec ce jeu, c'est sa versatilité. C'est incroyable comme le jeu peut faire apparaître à la fois des moments hilarants, riches en émotion, épiques et plein d'autres choses en étant en soit diablement peu communicatif ! Hollow Knight se forge un petit univers dans lequel on peinera à sortir.
Et cette grande versatilité est servie par la patte graphique et sonore du jeu. Graphiquement, le jeu a un petit aspect cartoon qui colle bien à l'aspect insectoïde et enchanteresque du jeu, le rendant presque... mignon. Presque. Car hormis cela, le jeu s’octroie le droit d'être très sombre dans son aspect. Les teintes de couleur, ou la lumière sont très caméléon, et portent, selon les zones et les moments du jeux, différentes ambiances, plus ou moins accueillantes et plus ou moins inaccueillantes de facto. La musique fait la même chose en étant très expressive, et en plus, vraiment somptueuse. Là où les graphismes peuvent laisser des réserves, car pour porter les principaux enjeux de Hollow Knight, ils ne sont pas tout indiqués, et là où n'importe quoi dans ce jeu peut déplaire à certaines classes de joueurs, personne ne peut rester froid devant l'OST du jeu. Un petit chef-d’œuvre, à nous en faire verser une larme. Oui, c'est une histoire vraie, et oui, j'assume totalement. Donc oui, là dessus, le jeu est cohérent et réussi.
Point de vue lore et scénario, pour rester dans le ton de l'ambiance générale, j'ai plus de réserves. Le jeu se couvre sous un thème un peu générique mais pas inintéressant (je ne spoile pas), mais le vrai sel de la narration d'Hollow Knight se base sur le simple fait qu'on incarne un insecte qui doit abattre d'autres insectes. Une petite originalité qui ne s'arrête pas à ce simple fait : dans une mesure que je ne saurais déterminer exactement, des tonnes de détails à propos de cet aspect baignent chaque particules du lore. D'un point de vue bestiaire, map, dialogues et j'en passe, le choix d'une société insectoïde est assumé jusqu'au bout par les développeurs et utilisé comme une force. D'autres poncifs sont aussi intéressants, et comme précisé plus tôt très versatiles, mais mes réserves se trouvent dans la mise en scène de la narration. Hollow Knight fait le choix du jeu mystérieux et secret qui parsème sa trame de vagues indices comme un jeu de piste. Le fameux truc de prendre l'élément basique du scénario d'un jeu, et d'en faire aussi bien une quête qu'une récompense. Mais ça ne marche pas. C'est quelque chose de populaire, qui marche, et qui était même parfait pour le propos du jeu. Mais c'est trop vague, et le côté "récompense" de cette mécanique de gameplay n'est pas au rendez-vous. Hollow Knight est donc ce que j'appelle un jeu à wiki, un jeu qui n'est complet dans son expérience que prolongé par des recherches sur son wiki.
Et cet aspect est prolongé par un autre point : la densité du jeu. C'est son plus gros défaut et sa plus grande qualité : le jeu est tellement vaste. C'est un MetroidVania avec 4 DLC, mais même là, on ne peut que difficilement s'attendre à autant. On a toujours quelque chose à faire, et c'est toujours amusant, aucune quête trop chiante ou virant un peu trop au Fedex, c'est toujours fun. Mais là, ce n'est pas "beaucoup", c'est trop, et trop caché. Donc, pour continuer de s'amuser sur le jeu, on va sur le wiki, inexorablement.
Pour finir, le point essentiel du jeu au final, c'est son gameplay, et pour ça, on a deux axes très importants :
-L'exploration. Un très très franc succès du jeu, rythmé en permanence par la découverte : la découverte de musique et d'esthétique, la découverte d'ennemis et de boss, la découverte de capacités, la découverte d'objectifs, la découverte de chemins, et j'en passe. Le jeu s'en trouve donc très addictif, à cause de ça, mais aussi de ce qui en suit quand c'est bien réalisé (et ici ça l'est) : le syndrome de BOTW, c'est-à-dire de faire un truc, de tomber sur autre chose donc d'interrompre sa première tâche, mais pour faire cette seconde chose il te faut un objet, en allant le chercher tu tombes sur un boss, etc... ça ne s'arrête jamais, et j'ai très vite dû arrêter de compter le nombre de fois dans mon aventure où je me suis dis "aller, je finis ça, et ensuite, promis, j'arrête" pour au final jouer plusieurs heures de plus. Et la map est faite pour, car étant une map de MetroidVania, elle doit te donner une impression de liberté tout en sachant exactement où tu vas, et ici, bon sang, c'est réalisé avec brio, et perfectionne une aventure déjà impeccable. Cependant, tout ça, la liberté, l'exploration, tout ça est affaibli par quelque chose : les fameux allers-retour. Le Nid-Profond, je te regarde. Le voyage rapide n'est pas gentil dans Hollow Knight, alors que la map est très vaste. On se retrouve alors à faire constamment la navette entre les objectifs et points d'intérêts, et si c'est évidemment un parti pris, et un parti pris cohérent avec la densité du jeu, car il nous pousse à fouiller et refouiller et rerefouiller les mêmes endroits, c'est aussi un parti pris restrictif qui coupe avec la liberté si bien maniée du jeu. Et le rend aussi, c'est vrai, inutilement laborieux et étouffant. Oui, je me suis déjà senti claustrophobe dans Hollow Knight, et ça en dit aussi long sur le jeu... que sur le joueur. Et pour finir là dessus, la map ne fonctionne pas comme tout MetroidVania, la map se mérite, et ça, beaucoup l'ont détesté, mais personnellement, je trouve ces moments à errer dans l'espoir de déverrouiller sa map très puissants, et très raccords avec le propos du jeu.
-Le combat. Très très bien fichu lui aussi, avec sûrement la chose la plus appréciée sur Hollow Knight, le fameux répondant des contrôles. Notre perso fait ce qu'on lui demande, il le fait vite et il le fait bien. Ça et le fait que le jeu n'est jamais injuste, très salaud mais jamais injuste, et on a ce sentiment agréable que quand on perd, on a été nul et c'est tout, rien n'a beuggé, rien n'a échappé à notre conscience, on n'a juste pas été à la hauteur, tant pis, on recommence. Recommencer, justement, parlons difficulté. J'ai vu passer tous les noms d'oiseaux sur le défi que le jeu présente, allant parfois jusqu'à utiliser le fameux mot interdit "Souls Like". Que ce soit clair, pour moi, le jeu n'est pas si diabolique que ça. La difficulté est gratifiante, poussant à l'apprentissage des paternes, mais ils sont loin d'être rudes à apprendre, ces paternes, et en général, il ne faudra pas plus de 5 essais pour vaincre un boss. Un boss... principal. Car oui, ce que je décris là est vrai pour qui souhaite finir le jeu en ligne droite, mais les quêtes annexes, elles, elles font désinstaller le jeu. Après avoir cassé son bureau. Deux fois. RdCG, je ne te remercie pas. Mais ces quêtes et ces boss restent malins et gratifiants, et permettent à chaque tranche de joueur d'avoir son occasion de galérer à un moment. Et si ces boss marchent, ils se basent tout de même un peu tous sur les mêmes idées, mais pas assez pour que ce soit répétitif, donc ça marche parfaitement, et ils se réinventent tous tout de même un peu. Et nous dans cette histoire, on a les armes pour battre les boss de différentes façons, que ce soit via les charmes, ces collectibles personnalisant à souhait nos possibilités de gameplay, et qui sont très nombreux à être viables, ou via nos capacités de base, toutes simples mais très bien faites, offrant une flopée de réaction possibles aux assauts des adversaires. Mais les boss ne font pas tout, le bestiaire plus général est brillant, et très loin d'être dénué de défi à offrir, les minis-jeux et quêtes annexes offrent quelque chose de très différents en terme de combat, et les séquences de plateforme tirent très bien parti de la géniale physique du jeu, qui use de ce "répondant" dans les contrôles avec beaucoup d'originalité et d'intelligence, même si cela, il vaut mieux le jouer pour le comprendre.
Pour conclure, Hollow Knight est une pépite, réalisé par des développeurs brillants qui savent exactement ce qu'ils font. Difficile d'en sortir, tant il est complet et tant tout ce qu'il a à proposer donne envie, mais hélas, il en fait un peu trop, et ses idées peuvent pénaliser le jeu : on ressent alors l'aspect "passion" des devs, qui ont fait un jeu à leur image, quitte à rendre le dit jeu très fermé. Mais il reste un classique de l'indépendant, et croyez-moi, il vous le faut dans votre bibliothèque.