1. Un train file à travers l’Asie centrale. La neige accompagne sa marche funèbre de son ballet incessant. A l’intérieur, sous les lustres luxueux, au milieu des coupes de champagnes et des visages masqués de chacun, un homme. Habillé d’une une figure de chien, il semble perdu. Alpagué par un être déguisé en squelette il explique qu’il n’a aucune idée sur la façon dont il est arrivé là. : il devrait être à Rome. Une femme cherchant son mari les interrompt: elle aussi devrait être chez elle. “I feel like I -we- should not be here”, intervient un docteur. Pour autant, ils sont bien là pour une raison. Et c’est ce que chacun s’efforce de découvrir, en nous expliquant son histoire.


Le jeu prend donc la forme de 3 flashbacks chronologiques: l’homme débute, la femme enchaîne et le docteur clos. Le genre d’histoire qu’on s’attend à trouver dans un train qui ne mène qu'à nulle part. Sauf qu’ici, personne n’a choisit de monter dans le train. Et de même, personne n’aura choisit son histoire.


Concrètement, le jeu prend la forme d’un point’n’click à l’isométrique en pixel art. Les 3 tableaux se traversent en un peu moins d’une heure et demi, soit une petite demi-heure par histoire, sachant que la première est plus courte. Mais ici, on est loin du mélange bien dosé énigme / humour qui fait l’esprit et le sel des point’n’click traditionnels. Il est plus question de désespoir et de tristesse, de destinées tragiques et étouffantes.


Si la première histoire est sympathique, elle reste assez courte et oubliable. C’est bien lors de la 2e histoire que le jeu atteint son paroxysme: en liant la situation de la femme que l’on incarne à son gameplay, le jeu se transcende en une véritable expérience traumatique. La dernière histoire n’est pas non plus en reste: on y suit le voyage presque lovecraftien d’un médecin à la recherche du savoir.


Si les énigmes ne sont pas les plus intéressantes lors de la première histoire, elles montent en niveau (n'étant malgré tout jamais vraiment complexes) et atteignent même quelques fulgurances sur certains passages, notamment dans la manière de lier le propos du jeu et son histoire à l'énigme. Par ailleurs, l’habillage du jeu est une vraie réussite: le pixel art y est excellent, les animations au poil, la DA n’est pas moins bonne, et le sound design supporte très bien l’ensemble.


Pour conclure, s’il est certes doté d’un habillage esthétique et sonore oscillant entre l’excellent et l’incroyable, le jeu tire d’abord sa force de son excellente écriture: on ne peut décrocher des histoires de ces individus aux destinées funestes. Mais le jeu va encore plus loin lorsqu’il réussit à transcender certains passages en liant son gameplay et son propos; il s’agit dans ces passages d’une expérience inoubliable, à ne pas manquer (d’autant plus que l’œuvre est entièrement gratuite).

Otozno
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le 30 août 2021

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