Killzone
6.5
Killzone

Jeu de Guerilla Games et Sony Interactive Entertainment (2004PlayStation 2)

Killzone, c'est un jeu qui n'a pas eu de bol. Alors qu'au départ ce n'était qu'un petit FPS sympa avec des bonnes idées plein sa besace, il est soudain devenu, à cause d'une campagne marketing et d'un délire journalistique, le "Halo-killer". Très vite, tout s'est emballé, Sony en a profité pour mettre en avant cet avantage et susciter l'impatience des joueurs. D'un côté, nous avions les fans de Halo, indignés de voir qu'un jeu avait le potentiel pour entâcher le prestige de leur jeu favoris, et de l'autre les possesseurs de PS2 heureux d'avoir enfin une exclusivité FPS qui tienne la route sur leur machine. Inutile de vous rappeler qui a été déçu et qui a été rassuré.

En effet, le jeu de Gerrilla Games était bien loin de faire de la moindre concurrence à Halo. Pourtant, ce jeu avait le potentiel pour devenir une alternative à la série de Bungie, surtout que les deux oeuvraient sur le terrain de la science fiction. A l'instar de Halo, Killzone bénéficie d'une identité visuelle puissante et séduisante.

Killzone décide d'ailleurs de nous en mettre plein la vue dès sa cinématiques d'intro. Véritable objet de culte pour les fans, cette courte mais intense cinématique représente à elle seule tout ce qui fait le charme de l'univers de Killzone. Les références à l'Allemagne nazie, les helghasts et leurs yeux rouges flippants, les grosses pétoires bien bruyantes et imprécises, la brutalité des combats, le tout sur un thème musical épique. Voilà, vous entrez dans Killzone et vous n'en reviendrez pas en un seul morceau.

Dès les premières minutes de gameplay, le jeu nous place dans une zone dévastée, aux arbres calcinés et jonchée de cadavres et de cratères d'obus. Il faut repousser les ennemis qui s'avancent en nombre conséquent vers notre couverture de fortune. Une chose est certaine à ce moment : Killzone essaye de construire une ambiance à la fois épique et lourde, nous faire vivre des morceaux de bravoures dans des terres désolées. Et c'est ce qu'il parvient à faire tout au long de sa courte campagne. Killzone avait été à sa sortie récompensé pour sa direction artistique exemplaire et il le mérite. Sans chercher à aller dans le tape-à-l'oeil comme le font ses successeurs, Killzone arrive avec des moyens simples à nous faire vivre une expérience grisante, où l'on progresse à travers des environnements variés et criants de réalisme. Les décors restent majoritairement industriels, mais on a droit à quelques environnements plus organiques tels que des marais, une forêt ou des montagnes enneigées. Quoi qu'il en soit, l'ambiance est bien là et le charme opère. Le joueur est maintenu constamment sous pression, écrasé par la violence qui se dégage de chaque décor. Mais le character design des ennemis n'est pas en reste ! Leur uniforme les rend vraiment impressionnants. Leur casque est directement inspiré de ceux de l'armée allemande de la Seconde Guerre mondiale, tandis que leurs yeux rouges et leur masque à oxygène renvoient plutôt à certains classiques SF. Il en existe plusieurs types et tous sauront vous effrayer avec leur regard inexpressif.

Mais pour créer une ambiance, le plus important ce ne sont pas les graphismes mais plutôt le gameplay. Et justement, Killzone nous gratifie d'une jouabilité, certes imparfaite, mais quand même assez intéressante. Le gameplay de Killzone se caractérise en premier lieu par une certaine lourdeur. En effet, on avance lentement, le sprint est limité par une jauge d'endurance et on ne peut sauter qu'aux endroits prévus à cet effet par le biais d'une action contextuelle. On peut clairement identifier l'objectif des développeurs : casser le dynamisme inhérent au genre FPS pour se rapprocher d'un certain réalisme et ainsi améliorer l'immersion. En théorie, le réalisme dans le jeu vidéo n'est pas forcément synonyme d'immersion, mais dans le cas de Killzone, cela fonctionne parfaitement. Il en est de même pour les armes dont l'utilisation requiert une certaine maîtrise tant elles sont imprécises et difficiles à manier.

Pour rester dans le domaine des armes, Killzone propose aussi une gamme de flingues tous plus cool les uns que les autres. Si leur design anguleux leur confère déjà un charme certain, leur principal atout réside en la présence de modes de tirs secondaires. Certaines armes possèdent un mode de tir alternatif qui permet au joueur de s'adapter à toutes les situations en un clin d'oeil sans avoir à transporter une multitude d'armes. Par exemple, le fusil d'assaut helghast a un shotgun directement intégré sous le canon. Il suffit d'appuyer sur R2 pour tirer une cartouche, ce qui est très pratique en cas de combat rapproché. Idem pour le fusil d'assaut de l'ISA qui transporte un lance-grenades. C'est une excellente idée qui apporte un peu de variété au gameplay et bouscule un peu les conventions du FPS grand public. Certaines armes sont même assez déroutantes les premiers temps, comme c'est le cas pour le fusil à lunette, qui demande une dextérité à la manette assez étonnante pour un jeu grand public. Apparemment, c'était une astuce pour éviter les abus en multi. Pas con ! Enfin, j'ai bien envie de vous parler des grenades qui elles aussi ont bénéficié d'un traitement spécial. Elles sont équipées d'un minuteur qui une fois arrivé à son maximum fait exploser la grenade. Cela permet de lancer la grenade pile au moment voulu sans avoir recours à une interface quelconque. Un pas de plus vers le réalisme.

Mais là où Killzone était censé se démarquer, c'était sur le terrain de l'IA. En effet, Sony avait présenté l'intelligence artificielle helghast comme étant révolutionnaire. Bon, comme toujours quand on parle de FPS, il y a un fossé entre ce qui a été annoncé et le résultat manette en main. Même si les ennemis ne sont pas totalement crétins, ils ne font pas toujours que des choses logiques. En fait, leur comportement est assez inconstant. Ils savent faire le minimum syndical, à savoir se mettre à couvert et tirer avec précision. Après, ils savent gérer les situations de deux manières : défensive ou offensive. Ils peuvent très bien avancer vers nous shotgun à la main pour nous forcer à reculer, ou bien rester à couvert pour nous empêcher de lever la tête... dans le but de couvrir leurs camarades. Oui, ils savent agir en équipe, s'entraider et communiquer. C'est pas mal du tout ! Sauf que comme je l'ai dit, tout ne se passe pas toujours comme prévu. Il arrive qu'un helghast se mette à faire un tir de couverture... alors qu'on vient de tuer tous ses potes (forever alone style). Ou ils ne nous voient pas alors qu'on est juste à côté d'eux. Ou encore des fois ils oublient de se mettre à couvert et se jettent sur les grenades. Enfin bref, du grand classique dans les FPS. En gros, si l'IA de Killzone est quand même assez performante, elle est loin d'être aussi réussie que ce que Sony avait fièrement annoncé.

Pour terminer ce test, j'aimerais aborder le scénario et la narration. L'histoire d'abord est assez intéressante. Bien entendu, on est loin d'un Bioshock ou d'un Portal, mais tout de même, Killzone parvient à planter un background séduisant, en utilisant une imagerie historique et connue de la majorité des joueurs ainsi qu'une vision du conflit moins manichéenne que ce que l'on peut voir habituellement dans la plupart des FPS. Pour vous résumer vite fait la trame, il s'agit d'une guerre qui oppose deux colonies spatiales de la Terre : Vecta et Helghan. Le peuple helghast a été lâchement abandonné par le Terre aux griffes de leur planète alors que celle-ci les tuait à petit feu par son climat inaproprié aux humains sur le long terme. Après s'être adaptés, les heghasts se sont rendu compte qu'après une longue convalescence, ils étaient devenus plus résistants que les humains normaux. C'est ce moment précis qu'a choisi Visari pour s'ériger en leader de toute la nation et y régner en dictateur. Il en profite pour instaurer un culte de sa personnalité et cultive la haine du peuple helghast envers la Terre. Il lève donc une gigantesque armée et part envahir la première planète contrôlée par la Terre : Vecta. Comme vous avez pu le remarquer, Killzone est un point Godwin à lui tout seul. Mais on remarque surtout que dans ce récit, il n'y a ni "méchant" ni "gentil". La vengeance et la haine sont au coeur de la série Killzone, mais c'est bien dans le premier que le conflit parait le plus absurde. Et des shooters qui font réfléchir les joueurs sur le sens de la guerre, il y en a très peu. On ne peut donc que saluer l'effort fourni par les scénaristes de Guerrilla Games.

Ensuite, pour ce qui est de la narration, elle sert plutôt bien le gameplay. La progression est cohérente et amène son lot de moments épiques, à l'image de ce débarquement sur une plage qu'il s'agit de repousser coûte que coûte. De plus, au fil de l'aventure, on trouve des coéquipiers que l'on pourra ensuite jouer durant la campagne. Chaque personnage a ses forces et faiblesses, à vous de les exploiter et de trouver celui qui vous convient le mieux. En tout cas, rien de tel pour augmenter la durée de vie !

J'imagine que vous devez vous dire que finalement, Killzone est très bon et qu'il dépasse peut-être même Halo. Malheureusement, il souffre de graves soucis d'ordre technique qui viennent littéralement ruiner sa jouabilité. Je pense que Killzone était bien trop gourmand pour la PS2 et qu'il est victime, à la manière de Shadow of the Colossus, de ses ambitions. Première constatation : il rame à mort. Tout devient saccadé et il suffit que l'action gagne en intensité pour avoir droit à des ralentissements de fou et des minis freezes. De la même manière, l'aliasing et le clipping font mal aux yeux. C'est vraiment dommage, mais cette faiblesse technique a des répercussions sur l'ensemble du jeu qui devient sérieusement pénible à jouer. La visée, déjà pas évidente à la base, devient ignoble et les déplacements laborieux. C'est suffisant pour lui faire perdre définitivement sa place de Halo-Killer. D'autres problèmes viennent alourdir le cahier des charges, comme la présence de bugs assez moches et l'absence totale de musique durant la campagne.

Pour faire écho au début de mon test, Killzone a manqué de chance. S'il n'avait pas été attendu au tournant par les joueurs et la presse, il aurait été sûrement mieux considéré car moins ambitieux. Seulement, Sony plaçait trop d'espoir en ce FPS et cela lui a été fatal. Néanmoins, Killzone est quand même une expérience intéressante. Sans être extraordinaire, il s'est imposé comme une exclusivité FPS solide de la PS2, aux côtés du démentiel Black. D'ailleurs, sur certains aspects, il arrive même à dépasser Halo ou au moins à proposer une alternative d'égale qualité. Un jeu bien sympathique, début d'une série désormais culte qui continue de faire son bonhomme de chemin et à faire une discrète concurrence aux autres grands FPS (notamment avec un excellent épisode sur PS Vita, Killzone Mercenary, que je vous conseille chaudement).
TheOctagon
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Créée

le 11 oct. 2013

Modifiée

le 24 mai 2014

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