critique originale parue sur chronicart.com
De retour pour un cinquième épisode, Les chevaliers de Baphomet annonce le grand retour du point'n click en 2014, mené sous l'impulsion première de Tim Schafer, fort du succès de sa campagne Kickstarter pour développer un jeu dans la veine de ses Monkey Island et Grim Fandango. De Tex Murphy à Gabriel Knight en passant par Dreamfall, les grandes séries du genre refont ainsi surface pour de nouveaux épisodes, toutes financées par le biais du célèbre site de crowdfunding et de joueurs dont on aura su toucher la nostalgie. Etant parvenu à récolter le double des fonds nécessaires à son développement (plus de 800 000 $), Baphomet (Broken Sword) ne déroge pas à la règle: Oubliés les épisodes 3 et 4 qui avaient fait évoluer la série vers la 3D et plus d'action, Baphomet 5 revient sur le gameplay des deux premiers épisodes de la série, faisant succéder les plans fixes et la recherche d'objets à combiner de façon adéquate, le tout sur fond de complot historique.
Reste qu'en dépit d'une exécution impeccable et fidèle à l'humour gentillet de la série, il faut bien dire que les mécaniques de Baphomet paraissent aujourd'hui empruntées et triviales. Ici, un policier bloque l'entrée d'une scène de crime: il faut alors lui offrir une tasse de café pour déclencher chez lui une envie pressante. Pus loin encore, ramasser une pizza pour imiter une tache de sang avec la sauce tomate et distraire un inspecteur incompétent... Si à n'en pas douter, les fans ayant financé le jeu en auront pour leur argent, le problème est qu'au fond, l'intrigue n'avance essentiellement qu'à renforts de ce genre d'actions, motivées par des personnages folkloriques et limités. Engoncé dans de vieux habits inoffensifs, Baphomet 5 ne pèse alors que trop peu si l'on considère tout ce qui a été fait depuis: la dimension morale des jeux de Telltale Games (The Walking Dead, The Wolf Among Us), l'esthétique des Layton, la variété d'un Sherlock Holmes, le sens du rythme d'un Phoenix Wright ou encore la sensibilité des jeux de Dave Gilbert pour ne citer qu'eux. Car contrairement à ce que pourrait laisser penser ce retour des grands point'n click passés, le genre était en vérité bien loin d'être mort jusqu'à maintenant: simplement, il avait quitté le devant de la scène pour se réinventer, et ce parfois de la plus belle des manières.