On est en mars 2021 et ça doit faire maintenant quatre ans que je suis l'heureux possesseur de ce dernier épisode en date de la célèbre saga de course de karting estampée de l'univers Mario...
Quatre ans et j'y joue encore de temps en temps.
Mieux que ça : quatre ans et j'y prends encore un vrai plaisir.


Dire ça, pour moi, ce n'est pas rien.
J'ai beau remonter très loin dans ma longue expérience de joueur, je ne connais finalement que très peu de jeux de course - voire même d'un point de vue plus large de jeux de sport - avec lesquels j'ai connu une telle longévité dans le plaisir.
En gros les jeux capables de ça je ne les compte que sur les doigts d'une seule main et la moitié de ces doigts renvoient à d'autres épisodes de "Mario Kart".


Si je précise tout ça d'entrée, c'est bien évidemment pour qu'on comprenne bien le sens de ma note.
Car 9/10 chez moi ça reste une excellente note... Mais pour un "Mario Kart" ce serait presque une note sanction.
Car oui, quand bien même cet épisode "8 Deluxe" reste un petit bijou en soi, j'avoue qu'il me frustre malgré tout grandement car non seulement je trouve qu'il tend à faire patauger la saga sur certains points mais en plus je considère même qu'il a tendance à la faire régresser sur d'autres.


Alors bien évidemment loin de moi l'idée de vouloir critiquer le gameplay de cet opus que je trouve tout bonnement irréprochable.
Malgré tout il faudra régulièrement vérifier que la conduite assistée n'est pas enclenchée par défaut pour éviter de se faire pourrir ses parties, mais passé ce détail là, cet opus "8 Deluxe" bénéficie de tous les avantages du portage vers une machine plus puissante (cette remarque restant bien évidemment toute relative avec la Switch).


La physique des véhicules est encore plus subtile, les commandes encore plus précises.
Ça atteint un tel niveau que j'ai vraiment du mal à imaginer comment la saga pourrait encore gagner du terrain sur cet aspect.
Ça répond toujours au doigt et à l'oeil. Quand on se plante à "Mario Kart" c'est de notre faute (ou de celle des autres) mais jamais celle du jeu.
Aussi jouer et rejouer à "Mario Kart" - et notamment à cet épisode-ci - c'est sans cesse peaufiner son art du pilotage avec une vraie sensation de progression.
Il faut dire qu'une fois de plus les circuits sont très bien pensés, variés dans leurs approches et optimisés au mieux pour qu'ils nous obligent à une attention de tous les instants.
(Bon et puis pour le coup, me concernant, cet épisode fait mouche sur quasiment tous ses choix de reprise de circuits historiques. Moi rien que pour le "Parc Baby", "l'autodrome" et le "circuit Yoshi" j'applaudis des deux mains.)
Ajoutez à cela l'arrivée d'un mode 200cc qui nous invite carrément à jouer autrement (en découvrant notamment qu'il existe une touche "frein" dans "Mario Kart") et le tour aura été fait - je pense - des indéniables qualités de ce huitième opus.


Mais bon voilà, arrivent inévitablement les points qui fâchent ; ceux qui me crispent voire même qui commencent à m'agacer grandement.
Parce que bon, c'est quand même bien rageant qu'un jeu d'un tel niveau se prenne les pieds sur des détails aussi navrants.


Bien évidement - et on va tout de suite se lancer là-dedans par le point noir qui fait sûrement le plus consensus - on va parler de la fameuse (putain de) carapace bleue.
Alors - ne croyez pas - je suis loin d'être contre le principe, bien au contraire.
Je ne fais pas partie de ces puristes qui considèrent que le concept même de carapace bleue est une sorte d'attentat fait à l'égard des talents de pilotage.
A l'inverse j'aurais même tendance à considérer qu'elle est un bel outil pour faire en sorte que tout le monde soit impliqué pleinement dans la logique d'une course de "Mario Kart" : c'est-à-dire des courses dans lesquelles on doit savoir piloter ET se battre.
Parce que l'air de rien elle est quand même assez confortable la place de premier sans carapace bleue. N'ayant qu'un seul front à gérer (l'arrière) le premier est donc forcément moins exposé aux attaques du peloton et peut donc très facilement s'envoler loin de tout conflit.
En cela donc, la carapace bleue rééquilibre à mon sens très bien le jeu et fait en sorte que chaque course de "Mario Kart" reste une course de "Mario Kart", jusqu'au bout, tout le temps, et surtout pour tout le monde.


Par contre à un moment donné, se bouffer deux voire trois carapaces bleues dans une même course, j'avoue que ça exaspère un brin .
Là on n'est plus dans du "Mario GP" mais davantage dans du "Mario DP".


Alors pourtant - certes - cet épisode a su rééquilibrer quelque peu le pouvoir "analhilateur" de la perfide bleue à l'encontre du premier.
D'abord on voit apparaître parmi les bonus jouables un klaxon qui, s'il est joué à temps, est susceptible de nous défaire d'une bleue en approche (...mais ça c'est à condition que vous sachiez garder un klaxon en main plus de dix secondes sans qu'un fantôme vous le pique !).
Et puis ensuite - autre mesure relativisant le martyr des premiers - les carapaces bleues dégomment désormais tous les pilotes qui se trouvent sur sa trajectoire.
Alors OK c'est pas mal et on pourrait s'en contenter...
...Sauf que - merde quoi - trois carapaces bleues c'est juste un scandale ! Même deux c'est déjà du scandale ! (Surtout quand tu te bouffes la seconde une fois que tu as bien galéré à récupérer la place que la première t'avait fait perdre !)
Pour régler ce problème là il aurait pourtant juste suffi de créer une immunité par course pour toute personne s'étant déjà bouffée une bleue. Non seulement ça aurait parfaitement équilibré les enjeux mais en plus ça aurait rajouté de la stratégie.
Ça aurait été un changement tout con, mais pour moi ça aurait totalement changé notre rapport à la course.
(...M'enfin bon : peut-être au prochain...)


Après c'est vrai que je m'étale longuement sur la carapace bleue alors que dans les faits ça reste pour moi un arbre qui en cache d'autres qui - de mon point de vue - sont de bien plus grosses attaques faites à l'art de conduire.


Moi par exemple, ce qui me choque le plus, c'est la disparition des chronos en championnat.
Non mais oh ! Y'a que moi que ça surprend là ?!
Un jeu de course sans chrono c'est un peu comme un jeu de foot sans comptage des buts quoi !
Combien de fois j'ai réalisé une course dantesque et j'ai voulu que le jeu me donne mon chrono mais NON ! Sitôt on a fini une course qu'on ne connaîtra ni son temps ni ses écarts ! Le tableau des points apparaît trois secondes à l'arrache et - Vite ! Vite ! Vite ! - course suivante !
Je ne comprends pas ce choix de la précipitation.
Que de pertes pour si peu de gain !
Tout ça me rend irrémédiablement nostalgique de cet esprit des premiers "Mario Kart" où, une fois fini une course, on constatait les dégâts qu'on avait fait derrière soi et où - surtout - on regardait ce que faisaient nos concurrents.
Rah mais ces moments où je voyais mon principal poursuivant se faire dépasser dans le dernier virage parce qu'il s'était pris la banane que j'avais déposé spécialement pour lui, mais qu'est-ce que ça participait au plaisir que je prenais en championnat !


De même, parmi les autres plaisirs disparus je note également celui qui consistait à essayer tous les pilotes pour jauger des différences de pilotage.
Alors certes, dans le tout premier "Mario Kart" l'offre était assez restreinte puisqu'au final on n'avait que huit pilotes disponibles pour seulement quatre styles de pilotage différents.
Mais là, dans cet épisode, c'est juste la foire à la saucisse.
41 personnages !
41 personnages dont on peut en plus modifier les compétences en jouant sur le kart utilisé, les roues et la voilure !
En fait ça ne sert plus à rien de passer d'un personnage à un autre ! Les ajustements sont tellement multiples et subtils que ça rend l'exploration des mash-up fastidueuse et - on ne va pas se mentir - pratiquement anecdotique.


Alors je peux encore entendre l'argument qui considérait à dire que cet opus "8 Deluxe" a choisi cette orientation afin de permettre à chacun de jouer avec un personnage qu'il aime sans avoir à se préoccuper de ses caractéristiques techniques (franchement pourquoi pas) mais dans ce cas qu'on fasse un effort dans le choix des persos proposés !
Parce que l'air de rien - ça aussi ça joue sur le plaisir d'un championnat - l'identité des participants d'une course n'a rien d'anodin.


Moi je me souviens que dans le premier "Mario Kart" j'avais mes ennemis attitrés !
Jouant toujours avec Yoshi, il se trouvait qu'en conséquence Koopa et Donkey Kong Jr. étaient mes Nemesis !
Le premier avait plus d'adhérence que moi dans les virages et le second me faisait rebondir à l'autre bout du circuit quand je m'y frottais : ça développait forcément un esprit de rivalité.
De la rivalité contre des personnages fictifs : oui. Mais c'est ça aussi l'esprit du jeu vidéo !


Là, dans cet épisode "8 Deluxe", quand je regarde mes adversaires j'ai davantage l'impression de participer à la nimp' parade qu'à une course de "Mario Kart".
Quoi ? J'ai perdu le championnat parce que je me suis fait gratté sur la ligne par... Bébé Harmony ?! (de quel épisode elle sort celle-là ?)
Comment ?! Je suis tombé dans le vide de cette foutue route Arc-en-ciel parce que j'ai été poussé par... "Garçon Ikling" ?!
Non mais attends ! Je me suis fait pourrir la course par un perso qui n'a même pas de prénom ?!
Et lui c'est qui là ?! "Villageois" ?! Mais qu'est-ce qu'il fout là lui ?! C'est juste un putain de figurant !!


Non mais sur ce point merde quoi !
Alors on n'a pas la Princesse Zelda d'un côté mais en revanche on nous gratifie de l'autre de trois versions différentes de Peach ?!
Non mais vous êtes sérieux ?!
Et d'ailleurs c'est quoi ce personnage de "Peach chat" ?
C'est quoi sa particularité à part d'être le personnage de "Peach" avec un putain de costume de chaaaaaat ?!!!!
Vous ne pouviez pas créer des costumes pour chaque persos plutôt que de faire des doublons aussi cons ?!
En plus ça aurait permis d'éviter que sur la même course on se retrouve avec un duel entre deux personnages identiques !
Eh oh ! Baby Mario qui tire la bourre à Mario adulte sur un même circuit ça choque personne ?!
En mode multi : d'accord ! Mais en mode solo : un peu d'effort quoi !
Respectez-vous quand même un peu chez Nintendo !


Mais en même temps, je pense que cette dérive elle s'explique du fait qu'il apparaît comme assez manifeste que, d'épisode en épisode, les "Mario Kart" se focalisent bien plus sur le multi plutôt que sur le solo.
Alors soit, je reconnais que le multi c'est 70 voire 80% du fun qu'on retire d'un "Mario Kart"... Mais pour moi ce n'est pas une raison pour délaisser l'expérience solo, surtout quand ça n'impacte (quasiment) en rien l'expérience multi.


D'ailleurs je conclurai là-dessus, parce que je pense que c'est cet esprit qui explique tout le reste : "Mario Kart" s'est irrémédiablement "FIFAtisé".
Quand je dis ça, je ne fais pas référence au fait qu'un épisode ressemble à s'y méprendre au précédent - bien sûr que non - je questionne plutôt ce rapport au contenu qui est désormais en mode "tout en main".
Avant les championnats ça se débloquait et les personnages ça se débloquait aussi.
Même les cylindrées supérieures ça se débloquait !
En d'autre mot un épisode de "Mario Kart" ça se parcourait, ça se gagnait, ça se méritait...
Là, comme dans "FIFA" il faut que tout soit jouable dans l'instant.
C'est l'idée que si quelqu'un vient de s'acheter le dernier épisode un après-midi pour y jouer le soir avec des copains, il faut qu'on puisse se faire des Real-Bayern dès le premier match pour ne frustrer personne.
Aujourd'hui un "Mario Kart" ne se mérite plus.
Comme "FIFA" c'est juste du contenu... Du contenu accessible à qui le veut quand il veut.


En définitive - et à bien tout prendre - c'est pour toutes ces raisons là que, pour ma part, cet opus reste derrière un bon vieux "Double Dash".
OK "Double Dash" était moins souple et subtil dans sa conduite en raison des limites techniques de son époque, mais au moins on avait des chronos.
Au moins on avait des personnages gagnables.
Au moins on avait une répartition claire des compétences et des véhicules.
Au moins on pouvait gérer l'ordre d'utilisation de ses doubles bonus.
Et au moins on avait un grand chelem.
Que des choses qui ne sont plus présentes dans ce "Mario Kart 8 Deluxe".
...Que des choses que je regrette amèrement.


Alors voilà : je ne boude pas mon plaisir - encore une fois indéniable - avec ce "Mario Kart 8 Deluxe" mais je me permets néanmoins de questionner la voie que prend cette saga.
Culture de l'immédiateté. Du moment court. De la collectionnite et du superflu...
Certes j'aurais envie de dire que ça n'attaque en rien l'ADN de cette saga...
Mais quoi que...
S'attaquer au chrono dans un jeu de course, est-ce que ce n'est justement pas déjà prendre le risque d'une future sortie de piste ?

Critique lue 831 fois

8
6

D'autres avis sur Mario Kart 8 Deluxe

Mario Kart 8 Deluxe
Ckai
7

20% skill 80% item

En attendant un Mario Kart totalement neuf, Nintendo réchauffe son plat envoyé sur Wii U en modifiant quelques épices de sa recette. Au menu, tous les modes et coupes des dlcs intégrés directement à...

Par

le 21 juin 2017

12 j'aime

15

Mario Kart 8 Deluxe
lhomme-grenouille
9

Le meilleur Mario Kart ? Vraiment ?

On est en mars 2021 et ça doit faire maintenant quatre ans que je suis l'heureux possesseur de ce dernier épisode en date de la célèbre saga de course de karting estampée de l'univers ...

le 4 mars 2021

8 j'aime

6

Mario Kart 8 Deluxe
LinkRoi
8

Un peu de poivre, un peu de sel, hein ? ALLAH AKBAR (FAITE GAFFE, LA BLEUE ARRIVE)

Parlons de Mario Kart 8 : Deluxe ! Scénario / doublage / narration / mise en scène / cinématique Ai-je vraiment besoin d'ajouter quelque chose de plus, non hein :P le jeu ne propose absolument rien...

le 24 sept. 2018

8 j'aime

19

Du même critique

Tenet
lhomme-grenouille
4

L’histoire de l’homme qui avançait en reculant

Il y a quelques semaines de cela je revoyais « Inception » et j’écrivais ceci : « A bien tout prendre, pour moi, il n’y a qu’un seul vrai problème à cet « Inception » (mais de taille) : c’est la...

le 27 août 2020

238 j'aime

80

Ad Astra
lhomme-grenouille
5

Fade Astra

Et en voilà un de plus. Un auteur supplémentaire qui se risque à explorer l’espace… L’air de rien, en se lançant sur cette voie, James Gray se glisse dans le sillage de grands noms du cinéma tels que...

le 20 sept. 2019

207 j'aime

13

Avatar - La Voie de l'eau
lhomme-grenouille
2

Dans l'océan, personne ne vous entendra bâiller...

Avatar premier du nom c'était il y a treize ans et c'était... passable. On nous l'avait vendu comme l'événement cinématographique, la révolution technique, la renaissance du cinéma en 3D relief, mais...

le 14 déc. 2022

161 j'aime

122