New York, ce soir-là, était malade plus que jamais. Les lampadaires déversaient leur pâle lumière, la circulation toujours aussi furieuse, les rues toujours aussi délabrées. Tandis que je contemplais tout ce beau merdier depuis le balcon, j’entendis un cri. Celui de ma femme. Puis des coups de feu. Courant dans les escaliers, je bondis dans la chambre du p’tit : le landau était renversé, une mare de sang s’étalait sur le sol… Bienvenue en enfer, Max.
« Max Payne » sorti en 2001 sur PC est l’archétype du jeu d’action abouti à tous les niveaux. Remedy a eu l’ambition avec ce jeu de développer la déchéance d’un détective haut en couleur, tout d’abord à travers des gunfight dynamiques qui constituent l’essentiel du gameplay, mais aussi avec quelques cinématiques, et beaucoup de moments de narrations sous forme de cases de bande dessinées. Le scénario n’est en premier lieu pas terriblement original (Max Payne est pour résumer un croisement entre Mad Max et l’inspecteur Harry) mais parfaitement efficace, et c’est précisément ce qu’on attend d’un récit de ce style. Ces 10 heures de jeu laissent donc une grande place aux scènes d’actions, modernisée ici par des ralenties à la fois esthétisés (se jeter sur une porte au ralenti pour surprendre les ennemis qui sont derrières, rien de plus jouissif !) et pratiques pour arriver à bout des nombreux gangsters. Ces ralenties proviennent tout droit du film Matrix, comme le souligne un clin d’œil sympathique dans la dernière partie (nous rappelant à quel point les références explicites marchent mieux dans le jeu vidéo qu’au cinéma). La difficulté est par ailleurs parfaitement dosée : si les ennemis meurent assez facilement, ils nous tuent aussi très vite, de manière à rendre le joueur prudent (merci la sauvegarde instantanée) sans rendre le tout frustrant. Et pour un joueur aussi peu aguerri que moi, dieu sait qu’il est difficile d’arriver à me contenter sans me faire abandonner.
Mais ce qui fait le sel de Max Payne, sa personnalité et son cachet indémodable, c’est sa mise en scène. Elle rend tout d’abord un hommage explicite à différentes œuvres et genres, à commencer par les films noirs pour l’esthétique très sombre du jeu (qui a toujours lieu de nuit) ses décors, mais surtout dans ces moments de narration en cases de bandes dessinées évoqués plus haut. Ponctués par la voix-off de Payne, l’écriture de ces scènes est très soignées, imposant des remarques sarcastiques, des descriptions presque poétiques et autres répliques qui tuent de la part du détective. Mais si cet élément permet de s’attacher au personnage, l’évocation de ses rêves à quelques reprises durant le jeu permet carrément d’aborder sa psychologie, profonde et torturée, mystérieuse et déroutante. Ces moments plus oniriques et intimistes renforcent la maturité du titre, n’hésitant pas à évoquer la mort du fils de Max frontalement et même de manière surréaliste.
Assez court pour ne pas devenir répétitif, assez long pour ne pas laisser sur sa faim, ce « Max Payne » était un incontournable de l’époque, et l’est encore aujourd’hui. Son ambiance, sa narration, ses scènes d’actions comme son aspect plus intimiste le font traverser les années sans vieillir d’un poil.
Et sans vouloir finir sur une note négative, (ça ne concerne pas le contenu du jeu directement) je dois dire que le portage Steam de ce jeu est révoltant ! Il faut déjà télécharger un patch ici pour passer le bug qui empêche de passer le premier niveau, et la bande-son des cinématiques et de la voix-off de Max ne marchent pas la plupart du temps. J'ai peut-être évité une VF pas terrible, mais tout de même ! Il y a aussi un patch pour ce problème, mais je n'ai pas réussi à l'installer...