Octopath Traveler
6.9
Octopath Traveler

Jeu de Square Enix, Acquire et Nintendo (2018Nintendo Switch)

Il est des jeux auxquels on pense, que l’on met dans un coin de sa tête, que l’on compte faire plus tard, laissant passer une hype soudaine et parfois injustifiée. Il est de ces jeux que l’on note sur une liste des jeux « à faire », même si l’on sait que l’on risque de s’embarquer sur un vol long courrier, voire très long courrier. C’est avec 5 ans de retard que l’on peut parfois goûter à un jeu, et c’est précisément le cas ici, pour le J-RPG de l’époque, le très clivant Octopath Traveler, premier du nom.

Un parti pris scénaristique et visuel

C’est désormais connu et reconnu, Octopath Traveler jouit d’une mise en forme parfaite pour ce style de jeu. Le studio Square Enix, plus que surfant sur un revival du pixel art qui séduit les joueurs depuis plusieurs années, a su clairement proposer un game changer d’un point de vue visuel, en développant leur moteur HD-2D. Ainsi, la firme nippone a su donner au J-RPG aux allures d’heroic fantasy, un réel vent de fraîcheur en permettant au joueur d’explorer en continu contrées et villages, à l’aide d’une caméra en position isométrique basse, celle-ci se dotant en plus d’un mouvement vertical et horizontal suivant le personnage principal, et ce à tout moment. Fini les voyages à échelle improbable sur des maps vides et irréelles où votre personnage représentait la moitié d’un village ou était aussi grand qu’une montagne. Ici vous serez sans cesse immergé dans le jeu, que ce soit lors d’une arrivée dans un village ou d’une séance de farm. C’est un excellent point pour le jeu, indéniablement. Les décors et de manière générale la direction artistique sont de toute beauté, au point que l’on est constamment sous le charme de tous ces dioramas qui se succèdent sous nos yeux souvent ébahis.

Point de vue histoire et scénario, le jeu a au moins autant d’impopularité que ses décors, eux, ont de louanges. Mais alors c’est quoi le problème avec l’histoire d’Octopath Traveler ? Rassurez-vous, rien de l’histoire ne va être révélé ici, mais il est nécessaire de parler de l’articulation de l’histoire pour savoir dans quoi le joueur va s’embarquer. Le jeu vous propose donc de choisir un personnage principal parmi les 8 protagonistes qu’il compte. Ce personnage constituera en quelque sorte le capitaine de votre escouade, et ne pourra donc être retiré de l’équipe jusqu’à la fin de sa propre histoire, à la différence des trois autres membres qui viendront compléter le groupe d’aventuriers, et que vous pourrez intégrer et retirer à volonté. Ainsi, chaque personnage possède sa propre classe comme par exemple celle du voleur, de la chasseuse ou plus original de la danseuse, ainsi que son histoire, celle-ci s’articulant en 4 chapitres, ce qui vous assure donc une histoire sur 32 chapitres, mais sans réel but commun hélas. Libre à vous d’avancer comme vous le souhaitez, mais une logique en escargot va naturellement se dessiner, vous incitant logiquement à suivre les 8 premières trames scénaristiques des différents héros, puis les 8 suivantes constituant le chapitre 2, etc., les niveaux d’expérience requis pour chaque chapitre suivant augmentant au fur et à mesure de l’histoire sur les zones de la carte. Oubliez donc l’exploration pure ici, le jeu est plus une suite de 8 histoires à suivre au fil des chapitres de chaque personnage. Ces histoires sont, il faut l’admettre, assez inégales en terme d’écriture. Certaines sont mémorables, et d’autres clairement inintéressantes. Vous irez en quête de vengeance le plus souvent, ou chercherez un sens à votre existence parfois. Le parti pris scénaristique est osé car sur 8 histoires de 4 chapitres chacune, le joueur est en droit d’oublier les enjeux à tout moment. Mais les histoires sont souvent simples (et efficaces aussi, quand intéressantes) et un rappel du chapitre précédent est donné à chaque nouveau chapitre débuté.

Et ce grand 8 alors ? Les sensations sont là ?

Le jeu peut effectivement faire penser à cette attraction. Grisant quand on s’y embarque, il n’est pas non plus garanti que 90h de grand 8 réjouissent le plus téméraire des adeptes de parc d’attraction ! Même riche en sensations, le grand huit tourne irrémédiablement… en rond. Et c’est un peu la sensation que l’on a dans Octopath Traveler. On sent que l’on est face à un jeu de grande qualité, pour lequel les développeurs ont fourni un travail minutieux. Oui mais passées la joie et l’admiration sur la direction artistique, on comprend vite que l’on est dans un système très directif et étriqué d’un point de vue scénaristique. Le jeu se résume ainsi à aller d’un village à un autre, parler à tous les pnjs qui les habitent (et il y en a !), et enfin obtenir trois ou quatre informations qui vous enverront systématiquement dans une grotte ou un donjon afin d’éliminer le boss de la zone. Oui, Octopath Traveler est extrêmement répétitif. Mais alors qu’est-ce qui en fait un bon jeu ?

Une immersion bel et bien présente

Oui, le jeu opère de manière cyclique, et oui cela n’est pas très heureux surtout sur une durée longue, voire très longue, mais le jeu reste pourtant un très bon jeu, et on arrive malgré tout à lui pardonner son défaut d’écriture. Premier point très positif, le sytème de combat au tour par tour est hyper complet et pointu, à base de failles à trouver sur les ennemis afin de rompre leur garde et les enchaîner d’attaques puissantes, physiques ou magiques. Chaque personnage bénéficiant évidemment d’une classe et des bénéfices que celle-ci lui confère. Il est très intéressant de savoir que le jeu favorise l’exploration afin de trouver en plus, des grottes permettant de trouver les 8 classes sous forme de pouvoir divin, ainsi que 4 classes bonus cachées ici ou là sur la carte, afin de proposer une seconde classe à chaque personnage, et ainsi rajouter nombreuses cordes stratégiques à son arc lors des combats. Et ce n’est pas négligeable car les boss sont de véritables sacs à PV. Point fort ou faible, à vous de voir ! Sachant que les personnages montent en compétence au fur et à mesure de la progression, cela c’est pas très dérangeant. Petit bémol pour la soit disant réelle fin du jeu néanmoins, dont on ne dira évidemment rien ici, mais qui passera vite pour facultative et rébarbative. Terminer les 8 histoires de nos héros peut largement constituer la vraie fin du jeu. Les quêtes secondaires du jeu constituent quant à elles un point très positif car elles se font naturellement au cours de votre aventure et assez rapidement. Elles ne nécessitent pas non plus d’interminables allers-retours. Visuellement, les effets de lumières des sorts sont très soignés, et les combats peuvent parfois être assimilés à une véritable partie d’échecs. Niveau son, les compositions classiques de Yasunori Nishiki sont juste parfaitement écrites et procurent au moins autant d’enthousiasme que l’aspect visuel du titre.

Conclusion

Octopath Traveler est un très bon jeu aux défauts réels mais curieusement pas trop gênants. Une (ou plutôt 8) aventures qui vous embarqueront dans de somptueux décors mais vous enfermeront dans une boucle de gameplay que vous seul parviendrez à dépasser ou non. Rythmé par des combats et une musique épiques, le jeu est clairement déstabilisant dans la façon de nous raconter les choses. Très verbeux mais toujours bien écrit et souvent mature dans ses dialogues, le jeu n’a de cesse d’alterner entre perfection et redondance. À vous de trancher !

OhDaeSoo
8
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le 29 mai 2023

Critique lue 27 fois

OhDaeSoo

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