Avec ses mélodies dignes d’un menu de navigation Wii (U) et ses larmichettes de télétubbies, Pikmin ne doit pas plaire à grand monde au premier regard, et ce, depuis le premier opus. Et pourtant, il s’agit sans nul doute d’un « natural survival » parfait, fortement accessible mais suffisamment exigeant pour créer un enjeu et surtout une tension indéniable. Pourquoi « Natural » ? Tout simplement car c’est vraiment le type de jeu qui nous place face à la chose la plus incontrôlable et terrible qui soit : Mère Nature. Et Dieu sait (ou d’autres peut-être, je n’ai pas cherché) qu’elle est sadique la mama. Ainsi, de prime abord, plusieurs notions sous-jacentes ressortent de cette (désormais) trilogie créée par l’esprit fertile de Shigeru Miyamoto. D’un côté, la cruauté de la Nature (envers elle-même), de l’autre, la cruauté de l’homme et son habitude à détruire ce qu’il a et à « utiliser », parfois à tort, ceux qui lui tendent la main. Quitte à les envoyer dans le feu.
En même temps, qu’il s’agisse des Pikmins ou des natifs de la planète Koppaï, une grand naïveté véhicule à travers le soft. Les mauvaises langues parleront d’un style caractéristique... ou plutôt redondant de la firme de Kyôto. D’autres parlerons d’un mix entre de la poésie, de la simplicité et un plaisir immédiat. Le contraste donne néanmoins une aura délicieuse à l’ensemble.
Au niveau du gameplay, les innovations sont minimes mais particulièrement visibles. L’objectif des protagonistes reste assez proche des précédents opus puisque l’idée et de revenir fissa vers leur planète natale. La principale qualité de Pikmin est de fonctionner selon un système de flux tendu. Tendu à cause des besoins alimentaires primaires des petits aventuriers, tendu à cause de l’éphémérité (malgré leur nombre) des Pikmins et surtout tendu car une journée... c'est ultra court et que la nuit, il vaut mieux ne pas rester dehors au risque de se faire atomiser. Ainsi, même si le jeu n’est pas très difficile en soi, les choses peuvent vite dégringoler. Un Pikmin se noie, un Pikmin se fait croquer, un Pikmin se perd. Ainsi, votre salut se partage entre leur relative fragilité et leur attribut dont vous êtes temporairement bénéficiaires (électrique, roche, hydrofuge, volant) : foutu paradoxe, n’est-ce pas ? Pourtant, c’est ce qui fait tout le sel du projet Pikmin.
Comme dans les précédents opus, il faudra se focaliser sur un total de cent Pikmin, au maximum. Comme chacun à ses facultés, il faut créer un équilibre qui variera d'une situation à l'autre. De plus, ici, trois personnages (il y en avait un dans le premier, et deux dans le second volet) permettent de gérer certains déplacements. Composé d'un univers vraiment riche, on a cette fameuse tendance à valdinguer ici et là parce que c'est sympa et ça sera utile. Cependant, une grande rigueur sera de mise afin de ne pas gaspiller son temps. Un détail : les boss, originaux, effrayants et goulus, seront la récompense (ou non) d'un troupeau de Pikmins bien pensé. Comme de nombreux insectes, il faudra s'attendre à perdre beaucoup de compagnons, mais qu'importe, c'est la survie du groupe qui prime. Oui, c'est injuste, mais c'est comme ça.
D'un point de vue pratique et technique, Pikmin profite de son passage à la HD et c'est rudement joli, précis et coloré. Le champ profond volontairement flouté donne une touche "macro", accentuant cette tendance de l'infiniment petit mais, encore une fois, de fragilité et d'insignifiance. Sur le plan musical, mon bon sens me pousse à gommer quelque peu le stéréotype par lequel j'ai commencé cet avis. On retrouve à la composition, un petit collectif habitué de chez Nintendo. Finalement, l'ambiance musicale de Pikmin 3 est soignée, adaptée, naturelle et apaisante. Enfin, Pikmin 3 demande un certain investissement. Si la narration se suit gentiment, plein d'éléments sont à découvrir (et surtout quelques rebondissements finaux fort sympathiques). Et l'on remarque que niveau level design, Nintendo s'y connait toujours autant.
Si la mal aimée (ou plutôt mal comprise) Wii U n'a pas un catalogue colossal, les gamers que vous êtes se doivent d'insérer au plus vite cette nouvelle galette sauce nature de Nintendo. On aura beau critiquer Nintendo pour la redondance de ses licences, mais il s'agit encore, à l'heure actuelle, d'un des seuls éditeurs qui arrivent toujours à créer de vrais enjeux ludiques en partant d'une idée à l'apparence merdique et à proposer, in fine, un produit ultra léché, original, précis et amusant. Respect.
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