Un monde ouvert avec des radiations et de la vodka
Call of Pripyat est le troisième titre d’une série se déroulant dans la zone irradiée autour de la centrale de Chernobyl, victime d’une seconde explosion (fictive). Dans cet enfer calciné, écorché et brisé par les radiations, vous incarnez un agent des services secrets ukrainiens. Évoluant parmi les mutants, les fanatiques et des chasseurs d’artefacts, votre mission sera d’enquêter sur le crash de plusieurs hélicoptères dans la Zone.
Call of Pripyat est le premier jeu de la série sur lequel je me suis lancé, et j’étais complètement paumé et découragé après mon premier essai, ne sachant pas vraiment vers quoi me diriger, ni comment survivre. Pourtant, à l’heure où tout le monde s’amuse à fabriquer des portefeuilles en peau de zèbre sur FarCry3, j’ai décidé de retenter le coup, et cette fois, le charme de la Zone a opéré.
CoP nous lâche directement dans la nature, avec un équipement réduit au strict minimum, quelques instructions, et un HUD un peu obscur. Ici, pas de trombone Office 97 pour nous signaler qu’il nous reste un point de talent à attribuer, ou d’énorme texte au milieu de l’écran nous prévenant qu’il faut appuyer sur R pour recharger et, enfin, pas le moindre liseré jaune autour des objets récoltables. On n’est plus franchement habitués à aller faire un tour dans les options du jeu pour découvrir les raccourcis clavier et ce qu’ils peuvent activer avant de jouer, ou à ouvrir l’inventaire pour lire les descriptions de nos objets de base, mais ce simple effort fait toute la différence.
Vous arrivez donc dans une plaine, l’arme à la main et équipé d’une boussole, d’une minicarte et d’un PDA, et un petit groupe de stalkers vous accoste. C’est l’occasion de découvrir le système de dialogue, plutôt riche et possédant quelques répliques « dynamiques ». Entendez par-là que vous pouvez demander à un stalker où il se rend, et l’accompagner. Très vite, on se rend compte que le monde, découpé en trois énormes zones, est « vivant », dans le sens où des stalkers, mercenaires, bandits ou mutants s’y déplacent, se rendent dans les anomalies pour trouver des artefacts, campent et s’affrontent, les vainqueurs allant même jusqu’à piller les cadavres (on voit alors leur inventaire s’agrandir dans l’interface de troc). Aider l’un ou l’autre camp pendant une fusillade ou soigner les blessés vous fournira des alliés. De même, lorsqu’une émission approche (un phénomène mortel spécifique à la Zone), tout le monde cherche, tout comme vous, à s’abriter dans l’endroit le plus proche, qu’il s’agisse d’un tunnel pas très engageant ou d’un bâtiment sinistre infesté de zombies (qui utilisent encore leurs armes, c’est d’ailleurs assez marrant à voir).
Bon, qu’on se le dise, CoP n’a pas la même portée qu’un RPG comme Mount&Blade ou New Vegas, puisqu’il n’y a pas de réelle guerre de factions, mais contrairement à New Vegas, les personnages ne sont pas posés et quasi statiques sur la carte : ils se déplacent, et c’est simplement génial du point de vue de l’immersion. On ne sait jamais vraiment à quoi s’attendre en se déplaçant dans la Zone, et à cela s’ajoutent des décors apocalyptiques, déprimants et extrêmement réalistes. La modélisation des personnages n’est toutefois pas franchement convaincante, les animations de ces derniers faisant parfois penser à du FPS Creator, et les herbes hautes étant même un cran en-dessous de celles du premier FarCry. Pourtant, on voit qu’une grande attention a été portée aux décors, à cette ville-fantôme et aux marais bouillonnants qui l’entourent, ainsi qu’aux effets météorologiques (surtout les orages !). La gestion des lumières et des ombres dans l’ensemble est du plus bel effet, encore aujourd’hui : la lampe frontale ne porte pas très loin, elle est suffisamment puissante pour couvrir quelques mètres. En contrepartie, il est souvent préférable de l’éteindre avant d’appuyer sur la détente, pour éviter de perdre la silhouette de sa cible de vue, ou tout simplement pour éviter de se faire repérer.
Bref, revenons à nos stalkers. En discutant un peu, ils nous parlent d’un endroit appelé la Skavosk, un cargo échoué où on laisse les flingues de côté pour discuter, vendre ses artefacts ou descendre de la vodka. La découverte de ce QG sera également l’occasion de ramasser ses premières missions, de fraterniser avec le vendeur et le réparateur du coin, et avec quelques autres stalkers expérimentés en traque de mutants. Je vous laisse découvrir la suite, ce serait dommage de vous gâcher la surprise. Sachez simplement que les missions sont intéressantes et variées, même s’il y a parfois un peu de fedex, et s’intègrent bien au scénario principal. Escorte, traque, exploration ou embuscade, ou même chasse à l’artefact, il y a de quoi faire.
J’ai rapidement mentionné le troc, mais il n’y a pas grand-chose à dire dessus. Par contre, l’inventaire à cases est un peu chiant à utiliser et il faut parfois s’y prendre à deux fois avant d’attraper un objet au double-clic. Malgré tout, on ne peut pas porter tout ce que l’on veut, et il faudra faire des choix en termes de poids et d’encombrement, même si la marge est tout de même bien large (je me trimballais un fusil à pompe, un fusil de chasse, deux fusils d’assauts et deux fusils de précision à la fin du jeu). Et puisque j’en parle, l’équipement est lui aussi varié : une demi-douzaine d’armures (faut-il choisir entre protection pare-balles ou résistance thermique ou aux radiations, entre armure légère ou armure encombrante ?) et une cinquantaine d’armes que l’on pourra faire modifier (après avoir récupéré les outils adéquats) et faire réparer. Les artefacts seront un bonus, permettant par exemple de profiter d’une régénération de santé ou une protection supplémentaire contre une irradiation régulière, ou de se faire suffisamment de brouzoufs pour racheter la Skavosk.
En effet, si l’argent est plutôt bien géré en début de jeu, on se retrouve assez vite plein aux as pour peu que l’on récupère des artefacts puissants rapidement, ou que l’on soit suffisamment apprécié des différentes « factions » pour se voir offrir des ristournes ou du matos. De façon générale, je trouve que la courbe de difficulté de CoP est assez brutale au début pour finalement rester constante, voire régresser à mesure que l’on accumule artefacts, armures améliorées et réflexes. Les adversaires armés restent toutefois dangereux, et il n’est pas rare de frôler la mort en quelques secondes en étant pris par surprise dans un bâtiment, mais ils ne sont en général malheureusement pas très malins et restent sur place, ou passent là où on les attend. Les mutants sont presque moins idiots et vous encerclent et tentent de vous frapper sur les flancs.
Pour conclure, je dirais qu’en dehors de quelques éléments qui auraient nécessité un peu de polish (l’inventaire, l’IA, les textures de la dernière zone qui ont parfois beaucoup de mal à se charger...), j’ai passé un excellent moment sur Call of Pripyat, et j’en redemande. En prenant mon temps et en essayant de tout faire (il me restait à priori une mission et deux kits à récupérer), j’y ai quand même passé une trentaine d’heures. Je n’aurais jamais cru apprécier à ce point un jeu développé par un studio d’Europe de l’Est, mais on sent que le jeu a été réalisé par des passionnés, et même si le jeu a dû recevoir pas mal de patchs depuis sa sortie, je ne l’ai jamais vu planter. Si comme moi, vous n’aviez pas accroché la première fois, retentez le coup, ce serait dommage de passer à côté d’un titre pareil.