Gott Ist Tot
Dieu est mort. C’est du moins ce qu’affirmait Nietzsche de façon métaphorique pour illustrer la perte d’influence de la pensée religieuse et sa part moins prépondérante dans nos sociétés. Mais dans...
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le 30 mai 2022
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Dieu est mort. C’est du moins ce qu’affirmait Nietzsche de façon métaphorique pour illustrer la perte d’influence de la pensée religieuse et sa part moins prépondérante dans nos sociétés. Mais dans Shin Megami Tensei V Dieu est mort au sens le plus littéral de son expression laissant derrière lui un trône vacant. C’est dans ce contexte transitoire que vous, simple lycéen devenu un mi-dieu devrait décider par vos choix de la forme du nouveau monde et de son courant de pensée dominant. Et comme le veux la tradition de la série, c’est Tokyo qui sera le théâtre de cette lutte entre diverses visions idéologique, les fameux Loi / Chaos / Neutre. Dis comme ça on pourrait être tenté de penser que Loi = Bien, Chaos = Mal et Neutre = entre 2. Une vision binaire à laquelle le jeu vidéo, voir même toute la société du divertissement, nous a accoutumé via des récits simplistes et dénuée de nuances. Mais dans la saga Shin Megami Tensei les choses ne sont pas si simples…
Autant être transparent avec vous, je suis un grand fan de la saga d’Atlus. Je ne me livre pas à la gueguerre qui voudrait que l’on choisisse son camp entre SMT et Persona. J’aime les 2 séries pour des raisons différentes. Un coup d’œil dans le rétro et je me fais un constat amusant : J’ai découvert chacune des sagas via leur 3éme épisode, d’abord SMT 3 en 2005 puis Persona 3 en 2008… Avec Atlus la patience est une vertu car vous imaginez bien que si j’ai fait SMT 3 en 2005 et que le 5 sort en 2021 c’est qu’on ne croule pas sous les épisodes principaux de la saga démoniaque du JRPG. Heureusement les spin of à foison et les épisodes de Persona ont su rythmer les années, mais tout de même un nouvel épisode canonique, ça fait quelque chose. Il fallait au moins ça pour me sortir de ma torpeur et me mettre le coup de pied aux fesses nécessaire pour reprendre la plume et écrire en lettre de sang mon avis sur cette nouvelle offrande après 2 parties complétées.
Peut être êtes vous un grand fan de SMT et vous vous demandez si cet épisode atteins vos standards et incarne un épisode digne de son illustre nom ? Peut être êtes vous un récent joueur de Persona 5 avide de découvrir la branche principale qui a donné naissance à ces Phantom Thieves que vous affectionnez tant ? Peut être ne savez vous-même pas ce que vous foutez sur ma critique ? Bienvenue en tous les cas et essayons d’aborder un peu tout ça ensemble le temps de cette lecture que vous semblez m’accorder.
Je vous ai pitché le jeu un peu plus haut dans mon premier encart et qui sait, peut être que ça vous a donné envie, ce qui est fort bien car je vais pouvoir aborder directement un sujet épineux. Ce SMTV n’est pas de ces JRPG qui mettent en avant leur scénario et leurs personnages. La trame est plutôt minimaliste, décousue et l’évolution de certains personnages est même, disons le franchement, complètement ratée. Si vous aimez les JRPG pour vous perdre dans de grandes épopées, vous risquez d’être déçu. Il est même amusant de constater à quel point SMT et Persona sont aux antipodes sur le coté verbeux (Même si SMT IV avait fait un bel effort en terme de narration). Vous pourrez passer de nombreuses heures à jouer sans que l’histoire n’évolue réellement. Pire, le symbolisme inhérent à la saga est très en retrait. Son histoire ne sera clairement pas le moteur qui vous fera avancer. N’ayons pas peur des mots : C’est un échec total tant dans son scénario, autant dans sa manière de le raconter que dans la construction de ses personnages. Ce n’est pas tant le choix de l’épure et de l’économie de mots qui est problématique. Apres tout SMT III évoquait beaucoup en disant peu. C’est que le jeu semble ne rien raconter de pertinent, il ne suscite que peu de questionnements, d’implications… Même les personnages ayant normalement pour but d’incarner une voie, une idéologie, sont vide et changent radicalement de personnalités à la fin sans explications crédibles.
Par contre si tu aime la bidouille et bricoler dans les menus les statistiques de ta team ça tombe plutôt bien car Shin Megami Tensei V restera avant tout un jeu à systèmes.
Comme toujours, le jeu repose sur des combats au tour par tour via le fabuleux « Press Turn », cette mécanique qui vous octroie des actions supplémentaires si vous exploitez la faiblesse élémentaire d’un ennemi. Mais comme le veux la coutume, chaque épisode a sa petite variante, sa petite mécanique qui lui est propre. Ici on aura par exemple les techniques Magatsushi, des techniques spéciales servant de joker à utiliser au bon moment pour rabattre les cartes. La technique initiale est celle qui garantit des coups critiques pendant un tour. Il y a fort à parier que ce sera celle que vous utiliserez jusqu’au bout tant son avantage est précieux entre dégâts colossaux et tours gagnés. Il est dommage qu’Atlus n’ai pas réussi à rendre les autres pouvoirs plus attractif pour donner envie de varier les stratégies.
Si chaque démon a ses spécificités élémentaires au niveau force et faiblesse, le jeu propose toutefois de complètement remodeler à la fois le Nahobino mais aussi ses démons. Pour cela, vous trouverez / achèterez parfois des « essences démoniaques » qui permettent de changer les affinités élémentaires d’un personnage ou de lui débloquer des compétences de cette essence. Par exemple, vous affrontez un démon spécialisé dans le feu mais un démon de votre team est sensible à cet élément. Vérifiez alors si vous ne possédez pas une essence qui le rendra fort face à cet élément ou alors utilisez une essence pour donner un sort de glace à un de vos meilleurs démons. Vous pourrez même trouver des objets qui augmentent de +1 l’affinité élémentaire d’un démon. Car chaque élément peut être plus ou moins maitrisé allant de -9 à +9. Une valeur négative baissant l’efficacité des sorts associés à cet élément et augmentant également son cout en MP. L’inverse est tout aussi valable avec une valeur positive : Cout en MP réduit et efficacité augmentée.
Un système de combat prodigieux et touffus (le press turn meilleur système de tour par tour ça ne bouge pas) mais aux nouveautés parfois timides et dispensables.
On retrouve également les négociations avec les démons, toujours aussi grand guignolesque et à la traduction impeccable. Si vous venez de Persona et que celui-ci est votre premier SMT vous serez peut être surpris de voir que ces négociations sont moins garanties que dans le spin of. Au total c’est prêt de 220 démons qui peuplent l’univers, entre visage bien connus, nouveaux venus et redesign d’anciens.
Au niveau de l’exploration, les équipes ont fait des choix plutôt judicieux et cela passe notamment par une forme d’ouverture mais aussi d’ergonomie. Les cartes du jeu laissent libre cours à la curiosité via des grandes zones à fouiller. Nous ne sommes pas face à un open world, loin de la, mais le tout est assez vaste pour procurer des sensations plaisantes quand on aime tout passer au peigne fin. Des sensations qui, dans une moindre (dé)mesure m’ont ramené à un certain Xenoblade et ses mobs de level 70 qui parcourent les premières maps. (Une philosophie elle-même empruntée aux MMORPG plus communément appelés MEUPORG par les journaleux de France Télévision). Le tout baigne dans une ambiance urbex post apo dans laquelle les démons sont désormais visibles directement permettant de mieux doser la fréquence des combats. Quand on a connu SMT III et ses combats aléatoires tous les deux pas, c’est une vraie bénédiction de pouvoir maitriser son rythme.
Il y a pas mal de petites choses à faire dans ces vastes environnements, notamment la collecte de point de gloires qui permettent de débloquer des effets passifs assez vitaux comme augmenter son stock de démons max, favoriser l’augmentation de la jauge de spéciale, j’en passe et des bien meilleurs. Il y a aussi la quête des Miman, des petits démons rouges cachées dans tout le jeu (200). Chaque paquet de 5 Miman trouvé vous octroie une récompense auprès du marchand du jeu accessible à chaque point de sauvegarde. Tient d’ailleurs le jeu propose le fast travel entre chaque point de save, pratique et constituant un ajout supplémentaire en terme de quality of life.
On ne fera pas l’impasse sur les sempiternelles quêtes secondaires à base d’obtention d’objets et d’éliminations diverses et variées. Certaine proposent des défis assez relevé d’ailleurs, dans la pure tradition SMT.
Les donjons du jeu…. Ah les donjons du jeu… On tient la le deuxième échec manifeste de ce SMT V. Ils sont d’une nullité assez affligeante. Le jeu en comporte finalement peu puisqu’il a fait le choix des zones ouvertes (heureusement), mais les quelques moments nous imposants des environnements cloisonnés sont d’un ennui assez abyssal. Il n’y a aucune inspiration en termes de structure, de level design ou de mécanismes. De bêtes couloirs agencés comme un puzzle que l’on trouverait à l’arrière d’une boite de céréale. A coté du labyrinthe d’Amala de SMT III qui, même s’il pouvait être éprouvant pour certains, avait un vrai level design et des idées… On a qu’une hate, en finir avec ces donjons éco+ et retourner au monde semi ouvert.
Synthétisons tout cela pour toi la, oui toi qui a scrollé jusqu’à la conclusion parce que ma critique est trop longue à ton gout. Ce SMT V est un très bon épisode de la saga en termes de gameplay mais il perd au passage une forme d’âme et de profondeur qui est pour beaucoup de fans l’essence même de ce qu’est Shin Megami Tensei. D’autant plus dommage qu’au final le jeu est vraiment solide avec ses mécaniques n’ayant plus rien à prouver, son bestiaire divin et son ambiance unique soutenue par une OST vraiment singulière et (à mon sens) marquante. Sa structure ouverte est une franche réussite parvenant à maintenir l’envie d’avancer malgré une trame en retrait. Comprenez bien que le titre de cette conclusion n’est pas une vraie question. Il ne faut pas nécessairement choisir entre gameplay et scénario, et dans le meilleur des mondes les deux aspects peuvent cohabiter dans l’excellence, mais SMT V ne vous offrira qu’une seule de ces deux facettes. Un JRPG dont les systèmes tournent tel de l’horlogerie suisse, dont l’ambiance et le monster design font mouche. Mais c’est aussi un JRPG qui sonne creux et qui ne vous racontera rien de marquant, aucun personnage n’habitera vos pensées pour les années à venir et il n’aura jamais l’aura mystique et fascinante de ses prédécesseurs... Je recommanderai bien plus volontiers SMT III mais sachez que c’est une expérience plus archaïques et plus arides encore. D’ailleurs j’ai écrit une petite bafouille sur cet épisode au combien important dans mon parcours de joueur. Je vous met le lien juste apres. (AUTO PROMO ! AUTO PROMO ! ET ALORS QU’EST-CE QUE TU VAS FAIRE HEIN ?!)
https://www.senscritique.com/jeuvideo/Shin_Megami_Tensei_III_Nocturne_HD_Remaster/critique/243391374
En vieillissant, j’ai tendance à jouer aux jeux pour le plaisir ludique, moi qui ne trouve que très rarement matière à m’émerveiller sur les histoires qu’ils me racontent (OK Boomer). Et c’est probablement pour cela que j’ai abouti à une note assez généreuse pour ce SMT V qui comporte des défauts qui risquent d’être assez gênants pour une bonne partie du public. La « juste note » aurait probablement été 7 mais que voulez vous, j’y ai pris bien trop de plaisir pour lui accorder la même note que nombres de JRPG plus conventionnels. Surtout en l’ayant fait 2 fois d’affilée… C'est un 8 donc. Mais un 8 tres personnel qui ne sera pas forcément le votre selon vos attentes.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Journal d'un dévoreur de J-RPG, Les Joo-Hwan Awards 2021, Mon Top 100 Jeu Vidéo et Le JJJ (Journal Jeu vidéo de Joo-Hwan)
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le 30 mai 2022
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