Du NÉANT !

Le jeu vidéo commence à être vieux. Pour preuve, il y a aujourd’hui et pour la première fois deux générations de joueurs. Les kikoolol/Kevins nés avec une psone dans les mains. A la recherche de la HD, du grand spectacle, des jeux assistés et des classements en ligne. Et puis il y a les vieux cons, les c’était-mieux-avant, ayant fait leurs débuts avec une Nes ou une Atari 2600. Ce genre de joueur pleure aujourd’hui la déchéance de Final Fantasy, attend toujours Shenmue 3, rêve d’une dreamcast 2 et d’un nouveau sonic en 2D. Jamais sorti des jupes à maman, il rêve de retrouver l’étincelle de son enfance au travers des vieux hits de ses 10 ans.

Il se souvient de l’époque où il jouait à Sonic the Hedgehog 2 avec son grand frère. Vous le trouviez très attentionné, mais en réalité il se paluchait tout seul pendant que vous, jeune et insouciant, vous dirigiez Tails, disparaissiez de l’écran les trois quarts du temps et mourriez broyé par le scrolling. Mais c’était l’époque du rêve, et quand votre frangin lattait Robotnick à la fin, vous aviez la sensation d’y avoir participé, vous vous jetiez dans ses bras, les larmes aux yeux face aux petits zoziaux enfin libérés de leur emprise robotique.

C’est beau. Et aujourd’hui la magie a disparu : il vous faut payer votre loyer, aller pointer à la sécurité sociale, remplir de la paperasse administrative, et pas même une donzelle pour vous réconforter au lit. Le vieux geek croit que seul un retour de l’étincelle de l’enfance peut le sauver du marasme, un bon vieux jeu à l’ancienne, ce qui en fait le troll le plus gras et le plus con quand on fustige les titres qui le firent rêver. Aussi la rédaction se prépare au tollé en retour, confrontée à la dernière blague de la firme Sega. « Sega n’est pas mort !» clame les conservateurs, « l’âge d’or reviendra ! ». Mais Sega produit les minables de Platinum Games, décorateurs d’intérieur qui oublient souvent d’inclure un gameplay dans leurs jeux. Sega vend son cul à ces racles-merde de Nintendo, et Sonic s’en va faire du ski avec son ancien rival Mario. Après avoir enterré Golden axe, Yakuza, Virtua Tennis sur next-gen, Sega a décidé de frapper fort : sortir un nouveau Sonic !

Oh, on nous souffle dans l’oreillette que ce fut déjà le cas. Sonic 4 vous dites ? Rires dans la salle. Ecoutez, on va faire comme s’il n’avait jamais existé, pour donner une chance au reboot tant attendu.

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Alors, Sonic Generations va-t-il sortir Sega du marasme ? Une nouvelle console de salon va-t-elle être annoncée, avec comme line-up Streets of rage IV, landstalker : return of Nigel, Ecco The Dolphin : beyond the waves et Gunstar Heroes II ? Ne rêve pas, petit fanboy frustré.

Le jeu débute par une cinématique d’intro moisie. Passons, nous avons décidé d’être indulgents cette fois-ci, nous jugerons simplement le point essentiel : le gameplay. Le jeu est beau, il ne claque pas graphiquement, mais le level-design est incontestablement une réussite. Les niveaux sont immersifs, les vieilles musiques savent titiller le point sensible du vieux gamer. Il faut un certain temps pour sortir de cette magie artificielle, et comprendre que la gonze qui porte le costume de blanche-neige à Disneyland se tape le caissier à la fermeture du parc, fume de la beuh et se saoule au whisky Jack Daniels.

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Il n’y a que neuf mondes, pour un total de dix-huit stages. Vous voyez bien que Sega tient ses promesses : ils vous ont promis un Sonic old school, vous aurez droit à une durée de vie old school, et malheureusement c’est bien là le seul point fidèle aux Sonic originaux. Chaque monde se divise en deux niveaux, l’un en 2D « à l’ancienne », le suivant en 3D. Pour ne pas trop bousculer le vieux fan, nous analyserons en premier lieu les phases en 3D.

En gros, c’est comme les autres sonic en 3D : c’est super rapide, on enchaîne les loopings, les accélérateurs, les grind sur les rails, la caméra refuse de pivoter d’un demi-poil de couille et Sonic est très peu maniable quand il court. Vous êtes spectateurs de cette débauche visuelle invraisemblable où vous vous retrouvez poursuivi par un camion armé de scies circulaires, ou pris en chasse par un piranha mécanique géant. Vous avez juste à presser le joystick dans la direction indiquée, et si vous vous prenez un obstacle, vous perdrez des rings, mais en réalité il faut vraiment le vouloir pour crever.

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Car voilà le gros point noir de Sonic Générations : la difficulté est presque inexistante. Vous mourrez souvent parce que vous n’avez pas suivi le chemin dynamique et scrypté du niveau, ou parce que Sonic répond bizarrement aux commandes, la faute à une inertie des sauts dignes d’un jeu de plates-formes raté sur psone.
Le décor des niveaux est tellement bien fignolé qu’on se laisse avoir au début. Le jeu procure une sensation de maîtrise au joueur, mais bien entendu l’ensemble est complètement cheaté. Passé la moitié du jeu, c’est-à-dire au bout d’une heure, on comprend que le jeu stagne dans sa non-difficulté et finalement l’ennui s’installe. Sega n’a toujours pas trouvée la formule pour lier fun, challenge et maniabilité dans ses Sonic 3D.

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Heureusement, le jeu se rattrape avec ses versions en 2D me direz-vous, Sega nous a prouvé par le passé qu’ils maîtrisaient ce genre-là. Et non, « essaye encore ! » comme dit Dora l’exploratrice. Ces phases-là se sont inspirées du dynamisme des Sonic modernes. En clair, il y a aussi des morceaux du niveau où vous n’avez qu’à admirer les retournements de caméra de fou et le décor défilant en arrière-plan. Un comble pour un Sonic dit à l’ancienne. Il y a heureusement davantage de plates-formes pure, de sauts au millimètre, et même quelquefois la mort ne tient qu’à un fil. Malheureusement, Sega n’a plus aucun talent et ces moments sont trop rares, là où ils étaient réguliers et maîtrisés sur Megadrive et Mega CD.

La maniabilité est à nouveau revue à la baisse. Même quand on s’est accommodé du système de sauts, il demeure trop mou, et Sonic n’est pas assez réactif. Ceci dit, encore une fois, on arrive au bout sans trop de peine, le rang S s’affichant fièrement pour le peu de sueur exigée. Le jeu est comme je l'ai dit trop permissif, Sonic parvient à la fin du niveau on ne sait trop comment. Trop pris par la vitesse pour prendre le meilleur passage si on ne connait pas sa position à l'avance, pas de quoi cependant y laisser des plumes vu qu'il y a TOUJOURS un moyen de se rattraper.

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Parlons à présent des défis, censés relever la durée de vie. Il y en pas mal, il y en a même beaucoup, j’avancerai même qu’il y en a trop. Soucieux de faire du remplissage et d’exploiter jusqu’au trognon les neuf misérables environnements du jeu, Sega accumule les quêtes débiles et inintéressantes. Certaines sont plutôt réussis, je pense notamment à un passage où Tails doit nous porter pour traverser le niveau en volant, ou lorsqu’il faut enchaîner les capsules d’invincibilité pour traverser des champs de piques. D’autres sont plutôt anecdotiques. Un contre la montre face à un Sonic fantôme, pourquoi pas.

Puis le même niveau, avec simplement un pont, quelques caisses par ci par là et un trajet forcé, pour refaire la course contre Amy, Cream ou Tails ; là c’est vraiment du foutage de gueule. Et puis il y a enfin les défis qui atteignent les hauts degrés du non-dynamisme et du non-fun. Comme celui où vous devrez indiquer à Knuckles de creuser pour ramasser des médailles, ou la course bordelique contre Shadow.
Une fois encore, rien de bien coriace pour nos jeunes têtes blondes sans cervelle. Quand j’avais dix ans, je me le suis torché Sonic the Hedgehog et j’ai pas chialé ma mère parce qu’il n’y avait ni sauvegardes ni courses-poursuites de malade avec caméra rotative à 360°. Apparemment, la jeunesse actuelle est conne et fainéante.

Réalisez au moins une de ces épreuves par monde pour débloquer une clé. Au bout de trois environnements, un boss vous attend. Quatre boss seulement en tout, et j’en remercie Sega, tellement le non-jeu de Sonic Generations culmine dans ces moments-là.

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Si vous réalisez les défis, vous obtiendrez des notes de musiques (qu’il faut poursuivre inutilement durant cinq secondes une fois le niveau terminé, hihi). Et ces notes débloquent des trucs trop extra du genre les musiques des anciens sonics, les artworks des niveaux, les fiches des personnages. Pourquoi pas des niveaux bonus, ou des vieux jeux Sonic à déverrouiller, plutôt que ces merdes dont on a fait le tour en cinq minutes ? Ah si, il y a bien un truc intéressant à débloquer.

En achevant les niveaux et les défis, vous gagnez des crédits pour acheter des compétences : pour activer un bouclier au début d’un niveau, perdre moins d’anneaux quand un ennemi vous touche. Des trucs vachement utiles pour rendre encore plus faciles les stages sans doute insurmontables pour cette génération de joueurs biberonnée à Wii Sports. On a vite fait de débloquer tous ces trucs et d’achever le soupçon de challenge, et donc d’intérêt, qui restait au jeu.

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Mais comme je vous le disais, vous pouvez vous procurer une option intéressante, et ce avec ces crédits. Il s’agit là du gros point fort du jeu, vous voyez bien que nous ne sommes pas mauvaise langue, car ce point positif rehausse considérablement la valeur de Sonic Generations.

Vous pouvez débloquer un jeu où l’inertie des sauts est bétonnée, la difficulté progressive et maîtrisée, où vos sens doivent toujours demeurer en alerte, où les pointes de vitesse savent donner du dynamisme à l’ensemble sans occulter la variété et le génie des phases de plates-formes. Pour vous dire, passé les deux tiers du jeu, confronté au néant abyssal du non-challenge et aux cinématiques interactives extrêmement poussives parsemant les niveaux, j’ai décidé d’aligner les défis pour déverrouiller ce jeu et je m’y suis attelé toute une nuit pour le terminer en réunissant les 6 chaos emerald. Une fois de retour à la réalité, j’ai retrouvé des sauts mi-lunaires aux trajectoires aléatoires, un personnage trop rigide durant ses pointes de vitesse, les niveaux achevés sans une goutte de sueur perlant sur le front, et une cinématique de fin d’un anti-climax sans nom.

Sega nous a clairement menti : vous ne sentirez à aucun instant l’essence d’un Sonic à l’ancienne. La firme use sans vergogne du nouvel artifice à la mode : offrir un grand spectacle omniprésent pour combler la misère abyssale d’un gameplay pensé pour des joueurs autistes et paresseux. Tout doit aller très vite, le joueur ne doit SURTOUT PAS se sentir lésé par un challenge consistant. L’essentiel est de procurer des sensations pêchues, dynamiques, sans jamais prendre le risque de ralentir le rythme avec un semblant de difficulté.

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Résumé: Conçu pour plaire à une génération d’attardés allergique à l’effort, Sonic Generations rejoint la masse des jeux vidéos actuels dont l’expérience vidéo-ludique s’accommode du néant.