Rarement, dans ma vie de joueur, j'ai connu pareille déception, un tel sentiment de foutage de gueule, de quoi donner envie de faire un attentat vengeur au sein des locaux d'un éditeur.
"Sonic the Hedgehog 4" était LE jeu attendu depuis plus de 15 ans par les fans de la première heure, après le sans faute Sonic 1/ Sonic2/ Sonic CD/ Sonic3+Knuckles (qui constitue à mes yeux le meilleur ensemble de jeux de plates formes 2D jamais conçu). Inutile de préciser que se rater était rigoureusement interdit.
Pourtant, ce Sonic 4 sentait déjà mauvais avant même que l'on puisse y jouer. Un titre avec un tel prestige aurait du sortir en version matérialisée avec un contenu très complet et riche, et non en téléchargement sous forme de petits épisodes rachitiques (et onéreux, qui plus est). De plus, alors que la Sonic Team aurait logiquement du se charger de la conception à 100%, c'est Dimps (studio ayant participé aux épisodes GBA et DS, opus loin d'être mauvais mais s'étant progressivement éloignés du feeling des premiers Sonic) qui s'est attelé au gros du projet. Nombre de fans craignaient déjà le pire.
Et les craintes étaient, hélas, presque entièrement justifiées, car ce nouveau Sonic est médiocre et surtout, tristement fade et convenu. À commencer par l'aspect visuel, pourtant la partie la moins critiquée de cet opus. Certes, la HD est agréable à l’œil, la sensation de vitesse est bonne et le hérisson suffisamment expressif. Cela ne suffit pas à faire oublier que le titre reprend dans sa quasi totalité, avec un manque navrant d'inspiration, des environnements et adversaires de Sonic 1 et 2. Les hallucinants niveaux psychédéliques de Sonic CD, malgré leur toute petite résolution, roulent sans sourciller sur l'esthétique de ce Sonic 4, preuve, s'il était encore nécessaire de le préciser, que la HD ne fait pas tout.
La tétralogie originelle se distinguait, à chaque nouveau cru, par de nouveaux éléments de gameplay/design (nouveaux personnages, bonus stages, items, mécanismes, etc...) des environnements différents et étonnants (même la traditionnelle île de premier niveau évoluait à chaque volet), des effets visuels toujours plus fous et spectaculaires. Sonic était synonyme d'avant garde. Sonic, c'était tout simplement la vitrine de Sega, le héraut du "blast processing" qui laissait des bleus à la concurrence à chacune de ses itérations.
Avec Sonic 4, on prend les choses à l'envers. Car un (très) grand bond en arrière est effectué, le titre se contentant du minimum syndical : le challenge est faible, le jeu est trop court même pour 13/15 euros, les niveaux bonus sont une mauvaise resucée de Sonic 1, les boss sont des copier-coller des anciens volets, la bande son est "juste" sympathique, il n'y aucun personnage secondaire et peu de bonus. Difficile d'être indulgent face à ce qui nous est proposé, même si l'ensemble reste au dessus des plus mauvaises productions du genre. Vouloir jouer la carte "nostalgie" et minimiser au maximum cette prise de risque est un échec : le résultat est atrocement fade.
On pourra rétorquer que, distillées ça et là, se trouvent de petites nouveautés (comme la lampe torche ou le wagon dans le troisième niveau), mais leur impact reste anecdotique. Finalement, le "vrai" changement par rapport aux illustres ancêtres réside dans le fameux "lock" des cibles, qui, s'il se prêtait bien au rythme fou d'un Sonic Rush parait ici peu adapté, Sonic 4 se voulant old school (les ennemis sont si facilement défaits qu'ils ne présentent plus aucun danger).
Rajoutons la physique étrange du hérisson qui s'arrête net en plein vol si on ne maintient pas la direction lors de toute la durée des sauts, et on se retrouve avec un hybride difforme, bien inférieur aux premiers volets, vite terminé et surtout vite rangé au placard.
Le talent ne manque pourtant pas chez Sega : la perle qu'est Sonic Generations en est une preuve indiscutable.
Alors pourquoi, pourquoi avoir confié le seul, l'unique, le précieux Sonic 4 à Dimps (co-développeur, avec la Sonic Team), surtout pour accoucher d'un jeu aussi triste ? 15 ans. 15 longues années d'attente pour une espèce de remake mal goupillé et mal fini de Sonic 1, alors qu'on était légitimement en droit d'exiger, au minimum, un bon titre de plates-formes...
À titre personnel, je ne débourserai même pas les 1200 points nécessaires à l'achat de l'épisode 2, malgré le fait qu'il paraisse légèrement supérieur et plus ambitieux. Si la troisième partie (prévue pour juin 2014) est abandonnée en cours de route, je n'en serai même pas étonné étant donné le peu d'importance que semble avoir le projet pour Sega. En parlant de dates, si les délais sont respectés, le jeu aura nécessité plus de 5 années de développement. Tout est dit : à croire que les concepteurs ont bossé sur le jeu pendant leurs pauses clope.
Pour conclure, je rappellerai que pour quatre fois moins d'argent, on peut s'offrir un très bon portage du très bon Sonic CD, jeu Ô combien plus complet et ambitieux, tandis que les perles de la Megadrive sont présentes dans plusieurs compils Sega aujourd'hui disponibles un bouchée de pain en occasion.
Non, définitivement non. Impossible, malgré tout l'amour que je porte au hérisson, de recommander ce Sonic 4. Et c'est affreusement triste.