There's a new kid in town, voilà ce qu'on a tous pensé à l'arrivée de Sam Fisher dans le jeu d'infiltration. Splinter Cell fit une entrée fracassante qui pour certains lavait l'affront d'un Metal Gear Solid 2 trop hermétique. Si le temps a pas mal fait son affaire et réhabilité ce second volet (ambitieux et visionnaire), il n'en reste pas moins qu'une brèche s'ouvrait au sein du genre et Ubisoft s'est habilement glissé dedans. La réussite de ce nouveau titre tenait à son évidence, une immersion par l'approche sensorielle. Pénétrer une zone ennemie devait se faire à pas de souris, en évitant de se faire entendre...et voir. Un principe qui s'appliquait de manière littérale, les ombres et lumières jouant un rôle primordial dans l'avancée de son héros. D'un coup d'un seul, une saga vidéoludique est née, avec sa patte et sa signature (les fameuses lunettes de vision nocturne). Si je m'arrête aujourd'hui sur Chaos Theory - unanimement considéré comme le meilleur - c'est parce qu'il est idéal pour vanter les grandes forces de cette franchise mais également pour pointer les faiblesses présentes depuis le tout début.

Sur le plan de la jouabilité seule, le titre n'a pas vieilli des masses. Manœuvrer le très acrobatique Sam Fisher est un délice. Le prise en main se fait à vitesse grand V, et c'est toujours aussi plaisant de soigner son intrusion. Il est fortement recommandé de masquer ses traces, en évitant de tirer un peu vite ou de laisser un corps derrière soi. Surtout que Splinter Cell ne brille pas lors de ses gunfights, expéditifs et pratiquement injouables. Alors où se planquer ? L'obscurité, évidemment. À dire vrai, Chaos Theory pousse le concept d'ombre et de clarté dans ses retranchements. On apprécie d'autant la variété des terrains explorés (phare, base, banque, penthouse sécurisé, demeure gardée de très près) puisqu'ils posent chacun de nouveaux défis. En revanche, le niveau de difficulté sera variable. Globalement, la plupart des missions sont de très bonne facture. Je retiendrai surtout les escapades du côté de Séoul et des bains publics à Tokyo, les deux proposant un level design très différent et garnis de menaces (gardes, mines et drones). Les autres sont de qualité mais dont l'exploration se fait de manière plus automatique. L'IA des ennemis est également sujet à fluctuation : un instant capables de nous discerner à 20 mètres et l'instant d'après infichus de nous voir à 15 cm dans une obscurité relative, c'est parfois très surprenant. Une dizaine d'heures suffit à en venir à bout mais chaque zone s'accompagne de petits défis supplémentaires histoire d'améliorer le score final (télécharger de faux e-mails, poser des mouchards etc...). Et ensuite ? C'est là qu'est l'os.

N'ayons pas peur des mots, tout le reste n'a pour ainsi dire aucun intérêt. Vous me direz qu'on est là pour jouer et c'est tout. Vrai, mais c'est tout de suite plus engageant quand on se sent personnellement investi dans ce qui se passe. Ce qui est très difficile dans la saga Splinter Cell, qui se contente de recycler les mêmes histoires comme un vulgaire épisode de série qu'on regarde d'un œil sinon pas du tout (type Les Experts Miami). J'en suis même arrivé à zapper les cinématiques, assez moches d'ailleurs même pour les standards de l'époque, tant l'intrigue et le semblant d'enjeu me semblaient anachroniques. N'en parlons pas pour les personnages secondaires, parfaitement insipides. Sam Fisher ajoute un peu de chair même s'il faut se rendre à l'évidence, il n'a ni la présence ni la personnalité d'un Snake ou d'un agent 47. Le malaise, c'est que les jeux manquent d'âme tout simplement. Et donc ? Eh bien, quelques mois auparavant, Kojima assénait Metal Gear Solid 3 avec un nouveau challenge (la jungle) et un tas de nouveautés rayon gameplay sans parler de l'histoire en béton. Un an plus tard, Hitman livrerait son volet le plus emblématique avec Blood Money. Vingt ans plus tard, les deux concurrents ont ajouté quelques références absolues dans le genre. Splinter Cell n'a malheureusement pas su en faire autant, Chaos Theory ayant manifestement atteint un point de non retour. Les tentatives suivantes ont choisi une voie "actioner" pantouflarde. Le dernier opus en date, Blacklist a tenté de revenir vers les fondamentaux mais apparemment ça n'intéressait plus grand monde. La preuve que si, pour durer il vaut mieux avoir une âme.

ConFuCkamuS
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le 4 févr. 2025

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