Ça ne tient à rien quand on y pense…
Plus je joue à « Subnautica » et plus c’est ce que je me répète…
Or il se trouve que j’y joue à « Subnautica » ! Et pas qu’un peu !
Au moment où je rédige cette critique j’approche des 80 heures et (je l’espère) de la fin... Et 80 heures durant lesquelles mon avis sur ce jeu a trèèès régulièrement évolué ! (...Et par qu'un peu !)
De vraies montagnes russes pour le coup !
Et à chaque fois ça ne tenait qu’à ça : à ce « petit quelque chose qui fait que… »
D’un côté ces petits quelques-choses qui faisaient de « Subnautica » un jeu clairement au-dessus du lot ; un jeu souvent efficace, parfois même brillant…
…Mais avec de l’autre côté ces autres petits quelques-choses – ces petits riens – qui ramenaient ce titre sur le plancher des vaches, pour ne pas dire dans les abysses…
(Ho ho…)


Dès le menu j’ai déjà senti le chaud et froid de soufflé sur ma future partie.
D’un côté c’est sobre : ne s’affiche à l'écran que cette surface de l’océan qu’on va devoir explorer. (Un très bel effet d’eau par ailleurs…)
…Et puis au-dessus de ça un titre dégueulasse. Orange et bleu ciel. Pourquoi autant de laideur ? Pourquoi une telle faute de goût ?
…Mystère.
Pas grave. Je ne me suis pas arrêté à ce détail (qui n’en était pourtant pas vraiment un…) j’ai appuyé sur « Options » comme indiqué pour lancer la partie et là a alors commencé un temps de chargement…
…Un long temps de chargement, je tiens à préciser.

…Un trèèèèèèèèèèèèès long temps de chargement.
De deux à trois minutes ! Vraiment !
Alors vous allez me dire que c’est normal : il faut bien que le jeu s’installe. Que je chipote…
Mais non ! J’insiste ! Il s’agit bien d’un temps de chargement ! Le même temps de chargement qu’on se bouffera À CHAQUE DÉBUT DE PARTIE !
Et attention plus on avance dans le jeu et plus il y a à charger ! Et donc plus les temps s’allooooooongent !
Ralalah ! Mais ma parole ce jeu il faut vraiment le mériter ! Surtout que, pour le coup, le fond d’écran est toujours le même. Une image pas trop moche mais pas très belle non plus. Une image en tout cas dont on a tout le temps d’observer les imperfections tant on la voit souvent…
...Et puis voila que parfois (souvent) des bugs sonores et visuels viennent se greffer à l’ensemble, ce qui participe déjà à crisper l’anus avant une partie.


Parce que oui – et c’est le premier gros problème de ce jeu – il est putain d’instable.
En quatre-vingt heures de jeu j’ai dû connaitre plus d’une trentaine de crashs.
Des crashs qui obligent du coup à refaire certaines tâches pénibles…
Des crashs qui m’égarent dans ce qui doit être refait ou pas…
Des crashs qui m’obligent du coup à sauvegarder régulièrement…
Mais des sauvegardes qui freezent parfois le jeu pendant de très longues secondes…
Des sauvegardes qui font d’ailleurs même parfois crasher le jeu !
Et il faut qu’en plus s’ajoutent à ça des textures qui s’affichent parfois très tardivement et qui occasionnent des accidents facheux… Des textures qui peuvent aussi se charger trop tard et nous font sortir du jeu ! (A tel point qu’il faille quitter la partie et la rechaaaarger à nouveau.)
…Et le tout étant agrémenté de toute une flopée d’autres petits bugs d’affichages et d’animations qui n’ont certes ce coup-ci pas d’incidence sur le jeu en tant que tel mais qui rappellent régulièrement qu’on joue à un titre bugué à tous les étages et qui peut nous claquer entre les doigts à chaque instant…


Ralalah… C’est terrible mais si tu retires déjà tous ces bugs tu n’as plus le même jeu ! (Et j’ai fait les mises à jour hein… Et on parle quand même d’un jeu qui a plus d’un an. Je précise au cas où…)
Pourtant c’est vrai qu’à bien tout prendre il y a bien plus de choses qui marchent dans « Subnautica » (et qui sont très réussies plastiquement parlant !) que d’autres qui ne marchent pas, mais l’absence de confort que ces bugs génèrent est tellement pénalisante au cours d’une partie qu’il est vraiment difficile de les occulter…
…Surtout quand on joue en mode « survie ».


Oui… Le mode « survie ».
Je crois qu’il est temps que je vous en parle…
Parce que – voyez-vous – au moment de lancer une partie de « Subnautica », le menu nous propose plusieurs modes de jeu.
Mode « survie » pour ceux qui veulent vraiment se mettre en immersion, avec gestion de l’oxygène, de la santé, de la faim et de la soif…
Mode « libre », qui retire la gestion de la faim et de la soif.
Et un mode « créatif » qui retire en plus la santé et l’oxygène.
(Je ne parle pas sciemment du mode « extrême » – qui efface immédiatement la sauvegarde sitôt on meurt dans le jeu – qui a beau partir d’un bon sentiment mais, sur PS4, est totalement rendu caduc en raison des bugs à outrances évoqués plus haut. Dommage…)


Face à ces modes, j’avoue que mon choix a été vite fait.
Je ne sais pas vous mais moi, quand je vois ça, je me dis que ce serait quand même con de jouer à un jeu d’exploration sous-marine s’il n’y a pas de gestion de l’oxygène…
…Et tant qu’on y est – quite à vouloir jouer l’aventure à fond – autant gérer avec ça la nourriture et l’eau !
A « Minecraft » j’avais joué en mode survie et je ne l’avais pas regretté ! Sans ce mode-là je n’aurais jamais été contraint d’aller chasser en pleine nuit, je ne me serais jamais lancé dans l’agriculture, dans l’irrigation, toussa toussa…
Donc comme je voulais qu’aucune qualité de ce jeu m’échappe, j’ai fièrement lancé le mode « survie » !
(Ha ! Ha ! Mais queeeeeel con !)


Ah ça ! Le mode survie il se rappelle très rapidement à toi !
Tout le temps en fait.
A peine la partie est-elle lancée qu’en même pas dix minutes, le mode survie te plonge dans la plus glaciale des Bérézina !
Pourtant elle était chouette cette intro !
Ah ça ! Elle avait su me mettre dedans tout de suite !
Dès les premières images on se voit en train de grimper en catastrophe dans une capsule de survie spatiale – en FPS ! – s’arnacher en urgence et BAAAAM !
Explosion du vaisseau dans lequel on était.
On n’en a pas vu grand-chose. Mais justement, cela participe à la force d’immersion.
La chute a déjà commencé sous les hurlements des alarmes.
C’est le chaos. La capsule vibre de partout. Une plaque métallique se détache d’ailleurs dangereusement. Et vlan ! Elle nous assomme.
Réveil dans une soute en flammes. Un extincteur à nos pieds.
Des consignes s’affichent pour interragir avec l’objet.
L’incendie est rapidement maitrisé. Une procédure d’aide d’urgence est alors automatiquement lancée.
« Allez prendre votre Personal Digital Assistant et consultez les directives d’urgence. »
Quand on sait que ce PDA est amené à devenir notre interface durant tout le jeu, c’est assez habile de nous conduire à prendre contact avec lui ainsi.
C’est très immersif. Très intuitif.
Ah non mais vraiment cette intro elle est vraiment IM-PEC-CABLE.
Classique mais bien pensée. Maitrisant ses effets.
Du grand art…
…Et puis soudain, le mode « survie » se rappelle à nous.


« Vous êtes en déshydratation. Buvez de l’eau.
– …Quoi ? …Attends. Ça fait même pas cinq minutes que je suis dans la partie et que je parcours les parpaings de tutoriel à lire… Et ça m’a déshydraté ? …Bon. J’ai une bouteille d’eau dans le kit de survie, donc buvons et retournons dans la lecture massive de ce dictionna...
– Apport calorique nécessaire. Nourrissez-vous.
– Eh beh… On va dire que ce sont les conséquences de l’évacuation… Bon, qu’est-ce que j’ai dans ma besace ? Deux barres nutritives fournies. OK. Bouffons-les ! …Alors où en étais-je ?
– Vous êtes en déshydratation. Buvez de l’eau.
– Putain t’es sérieux ?! Ça fait seulement deux minutes que j’ai b… Ah non. En fait ça fait dix minutes que je suis le nez dans ce PDA à lire et lire encore… Enfin bon, quand même ! Allez… Où est cette deuxième bouteille d’eau… Ah merde ! J’en ai pas ! Qu’est-ce que je fais ?! Ah oui ! J’ai lu dans le PDA que le fabricateur de la capsule de survie pouvait distiller de l’eau ! Alors vite ! J’ai pas envie de mourir parce que j’ai été trop lent à lire la notice du jeu ! Ce serait quand même con ! »
Je ferme le PDA. Je vais vers le fabricateur. Je l’actionne.
Je patine un peu au milieu de l’interface confuse.
Là, je découvre que cette gigantesque imprimante 3D capable de me fabriquer tout seul une pile à partir d’un seul bout de cuivre et de deux champignons fluorescents est infoutu de distiller de l’eau potable à partir de l’eau de mer dont je suis envahi.
Non. Il faut un poisson très spécial visiblement. Le « pochon ».


OK.
Bon.
Ça marche.
On va faire ça.
Un pochon donc.
Facile facile.
Pas de raison de stresser.
C’est le tuto. Tout va bien se passer…
J’ouvre le sas, n’ai même pas le temps de profiter du décor, explore les quelques mètres de profondeurs à la recherche d’un foutu pochon.
« Oxygène.
– Putain je n’ai que trente secondes d’oxygène ! Vite je remonte !
– Vous êtes en déshydratation critique. Buvez de l’eau de toute urgence.
– RaaAAAAAaaaah ! Alors vite je replonge ! Des pochons, des pochons, des pochons ! Ah là ! Y’en a un ! »
Je nage. Je découvre la physique du jeu. S’approcher du poisson est compliqué, surtout que cette saloperie détale très vite à mon approche !
J’en chie. J’en chie mais je suis à deux doigts d’y arriver.
« Oxygène.
– Putaaaaaaain ! Je remonte.
– Votre niveau calorique est critique. Nourr…
– TA GUEULE ! Je replonge. »
Ralalah mais je vais l’avoir ce pochon de merde !
Là ! Celui-là ! Oh oui celui-là il ne va pas m’échapper !
Je fonce. Je fonce. Je suis à sa hauteur.
« X pour attraper » m’indique alors l’écran.
« OK ! X… Pas de problème ! »

Ah mais sauf que si. Problème en fait.
Große problem même.


Je vous avais dit que je jouais sur PS4 ?
…Sur PS4 on se déplace avec le pouce sur le joystick gauche. On oriente la mire d’action avec le joystick droit. Et ensuite, donc, il faut appuyer sur le X…
Mais avec quoi ? …
…Bah avec le pif je suppose ?
Non mais les gars de chez Unknown Worlds…
…Vous ne nous auriez pas fait un portage un peu à l’arrache là ?
Le jeu qui plante. Les textures qui peinent à s’afficher. Les touches qui ne sont pas optimisées…
Ralalah…
« Des petits quelques-choses » je vous disais…
Là c’est quand même du gros truc qui tache, on ne va se mentir non plus…


Ma première heure de jeu ne s’est limitée qu’à ça.
Plonger. Capturer péniblement un poisson. Le ramener. Le transformer. Boire.
…Puis replonger. Aller chercher péniblement un autre poisson – ce coup-ci pour le bouffer. Le choper. Le transformer. Bouffer.
Puis replonger. Reboire. Replonger à nouveau. Rebouffer…
Vu que les cycles jour/nuit durent un quart d’heure et que le jeu considère qu’on doit bien boire deux bouteilles par jour et bouffer tout autant de poisson, on ne passe d’abord son temps QU’À ÇA.

Ah qu’il est agréable ce mode « survie » !
Ah merci !
Et pourtant, avec un peu de recul, j’ai fini par trouver ça chouette cette manière de faire.
Pire, j’ai même commencé à adorer.
…Et quand je vous disais que le talent de ce jeu tenait à des petits quelques-choses et bah clairement ça peut renvoyer à des choix comme ça.


Mettre la pression sur le joueur comme ça, dès le départ, c’est quand même culotté.
Très culotté même.
La première heure, ça a été de l’aliénation pure.
(Dans mon cas, ça a même été trois heures puisque j’ai préféré recommencer ma partie après ma première mort et le jeu a planté sur ma seconde session.)
Tout ça pour dire que ça a été dur. Que ça a été éprouvant. Que je ne respirais pas. Que je ne voyais pas comment j’allais m’en sortir.
…Eh franchement. C’est pas malin ça ?
Un jeu d’apnée… Dans lequel on ne se sent plus respirer ?
Il n’y a vraiment aucun sarcasme là-dedans. Vraiment je trouve ça plus qu’habile !
…Parce que sitôt tu commences à gagner en dextérité sur le chopage de poisson (et l’air de rien ça a fait son boulot de tuto) que tout de suite on a envie d’exploiter ce temps gagné pour chercher une solution pour rompre le cycle.
On cherche les matériaux nécessaires pour se fabriquer un masque ; pour se faire une bouteille de plongée…
On part alors à la collecte aux matériaux entre deux poissons. On trouve rapidement parce que c’est bien foutu.
On revient à la capsule. On fabrique lesdits objets. Et soudain…
…Soudain on respire.
Commence alors un nouveau jeu.


Puisqu’on va pouvoir passer plus de temps sous l’eau maintenant, on va pouvoir chercher autre chose. Nourrir de nouveaux objectifs.
La radio est pétée pour appeler au secours.
Les matériaux manquent pour améliorer nos palmes.
Un couteau pourrait aussi se montrer utile pour récolter ce qui manque…
Toute la philosophie du jeu se dévoile alors.
Un jeu d’upgrade et d’exploration permanentes.
Toute nouvelle exploration permet de trouver de nouveaux matériaux. Les nouveaux matériaux permettent de nouvelles upgrades. Les nouvelles upgrades vont pouvoir nous permettre d’explorer de nouvelles zones un peu plus lointaines et un peu plus profondes…
Et si dit comme ça, ça pourrait paraître redondant et pas très sexy, eh bien dans les faits pas tant que ça… Et même la plupart du temps ça peut même se révéler captivant et fascinant.
Fascinant parce que justement, ce « Subnautica » est pétri de ces petits quelques-choses ; j’entends par là ces grandes idées et ces petites touches malignes qui savent de mon point de vue totalement faire mouche…
…Des quelques-choses qui le placent parfois très proche des grands chefs d’œuvre du genre.


Pour commencer, difficile de ne pas saluer la qualité du level design.
« Subnautica » fait le choix très osé de ne pas doter le joueur de carte. (Logique au fond au regard de la situation.)
Du coup il faut apprendre à observer. Prendre ses repères.
Or les repères s’imposent vite d’eux-mêmes.
On sent que « Breath of the Wild » est passé par là.
A la surface, notre capsule de survie et l’épave écrasée de notre vaisseau tracent un axe de référence. A partir de là il est toujours possible de remonter régulièrement à la surface pour se localiser par rapport à cet axe.
Au fond, les endroits se ressemblent suffisamment sans se ressembler pour autant.
En effet, les espaces sont clairement découpés en « biomes » à la végétation distincte afin qu’on repère les principales zones du jeu. Ces zones sont d’ailleurs souvent disposés en cercles concentriques autour de la capsule afin qu’on se fasse une idée de la distance parcourue, mais d’un autre côté ces cercles ne sont jamais parfaits et selon la direction choisie, il y aura toujours une singularité dans le biome qui fera qu’on saura où on se trouve exactement.
Et non seulement ça participe à notre orientation, mais en plus de ça, ça contribue à notre identification du lieu, et donc à son imprégnation.


Parce qu’en plus de ça, « Subnautica » a un certain talent pour nous forcer à explorer ses lieux et à alimenter régulièrement notre curiosité.
D’abord ce sera une cavité particulièrement profonde.
Ensuite ce seront des morceaux d’épave autour desquels les découvertes de matériaux nouveaux trainent parfois, ouvrant ainsi à de nouvelles possibilités de jeu parfois totalement inattendues…
Et voilà qu’en plus de ça, une fois la radio réparée, des appels à l’aide sont envoyés par d’autres capsules.
S’y rendre, c’est découvrir de nouvelles zones… Et bien évidemment le jeu n’a pas réparti ces capsules par hasard et dans n’importe quel ordre…
Et voilà qu’en plus de cela, certains lieux d’intérêts sont disposés sur le trajet, renforçant ainsi le sentiment de découverte et de surprise.
Là, franchement, sur cet aspect-là, « Subnautica » tape vraiment très fort. Parce que l’air de rien le jeu nous guide mais tout en nous laissant l’impression qu’on a découvert les choses par nous-mêmes…
ÇA, c’est une vraie narration au sein d’un openworld !
Prenez-en de la graine Rockstar…
Prenez-en de la graine Ubisoft…


Bon après ce n’est pas toujours parfait non plus hein…
C’est comme s’il fallait qu’il y ait toujours un petit quelque chose de négatif pour venir compenser un petit quelque chose de positif.
Là par exemple, il est déjà arrivé que je tombe par hasard sur une capsule bien avant que la narration m’invite à la découvrir…
…Du coup, quand on entend l’appel radio avec des gens qui nous disent qu’ils sont en danger et qu’ils vont tenter une sortie en espérant que tout se passera bien, eh bah l’effet d’immersion tombe à l’eau parce que ladite capsule d'où ils appellent vous en venez…
…Et elle était déjà éventrée de toute part.


Mais bon…
Malgré tout les grandes lignes de la narration fonctionnent vraiment bien.
Des évènements narrativement efficaces sont disposés assez régulièrement dans la trame narrative.
Des fois ils nous invitent à être au bon endroit au bon moment – et même si dans l’absolu ça ne change pas grand-chose à la trame – l’évènement est vécu différemment selon qu’on y soit ou qu’on n’y soit pas.
De même il y a un vrai talent à laisser certains instants ou certains lieux se raconter par eux-mêmes, sans qu’on ait jamais à passer par du texte ou de la cinématique.
On déduit l’histoire. On l’assemble soi-même. Et on se trompe parfois.
Pour le coup on est encore dans la lignée d’un « Breath of the Wild » sur ce coup-ci, voire même parfois dans le même couloir que l’excellent « Outer Wilds ».
En cela « Subnautica » participe à creuser un sillon vidéo-ludique dont je suis particulièrement friand et il est parvenu – à plusieurs reprises – à me scotcher et à me prendre au dépourvu.
Ah ça… J’avoue que durant certaines sessions de jeu, je me suis surpris à jouer un peu plus longtemps que prévu juste parce que j’étais happé par l’instant…
…Ce qui ne m’a pas empêché pour autant de connaître parfois dans la foulée de vraies douches froides.


Parce qu’à côté de ses grandes forces en termes de narration et de liberté laissée, « Subnautica » traine aussi avec lui les défauts de ses qualités.
Et si parfois je suis resté à plusieurs reprises accroc, d’autres fois – et assez régulièrement – j’ai aussi connu de longs moments de lassitude et d’ennui.
Combien d’heures perdues à explorer un biome sans rien y trouver de probant ?
Combien de blocages liés à une ressource indispensable mais introuvable ?
Et puis surtout combien d’aller-retours inutiles parce qu’on n’a plus d’eau ni de bouffe et qu’il va bien falloir regagner un fabricateur pour survivre.
Alors certes ça rajoute un enjeu non-négligeable et assez intéressant… Mais c’est parfois vraiment pénible et décourageant.


…Et ça fait vraiment chier des défauts comme ça parce que tu sens que les développeurs les ont perçus, ont cherché des solutions – les ont même trouvées – mais les ont étonnament mal appliquées.
Quelques exemples…


Le scanner pour commencer.
Parfait pour trouver ce qu’on cherche et ainsi nous faire passer à autre chose… Mais le HUD est tellement surchargé à ce moment-là, ne hiérarchisant pas les distances, que ce scanner n’est pas toujours – jamais – pratique à utiliser.
Le distilleur d’eau de mer ensuite !
Ah ça je l’attendais ce truc pour ne plus partir à la pèche au pochon !
Seulement une fois obtenu, il ne fabrique des bouteilles qu’une fois tous les huit ans ; une fréquence bien trop faible pour nous soulager de cette tâche des plus ingrates. Et s’il finit au bout d’un moment par être suppléé par une « combinaison de distille » bien plus efficace, cette dernière n’arrive que bien trop tard dans le jeu,
Et puis on pourrait enfin parler des téléporteurs.
Grande idée. Evidente. Pratique…
Seulement voilà ils sont peu accessibles. Mal placés. Mal connectés. Inutiles d’ailleurs…


Autant de bonnes idées mal exploitées, presque laissées à la trappe.


Et c’est dingue, parce que ce jeu avait vraiment tout pour devenir un grand, mais à chaque fois il a semblé buter sur le plus simple.
Prenez le cas de ces constructions de bases marines par exemple.
Pour ma part je trouve que c’est la principale bonne idée du jeu ; celle qui fait que l’immersion s’est avérée si forte chez moi.
Car j’évoquais plus haut la sensation de progression que pouvait générer la conquête étape par étape de ressources et d’espaces, mais dans l’absolu c’est bien par l’investissement du lieu – et donc du jeu – par ses propres constructions que la sensation d’immersion se fait la plus grande ; rapprochant dès lors ce titre d’un autre modèle qui m’a beaucoup parlé ces dernières années : « Minecraft ».
Seulement voilà, là où – une fois de plus – Unknown Worlds parviennent d’un côté à s’inspirer astucieusement des meilleurs pour renforcer l’efficacité de leurs mécaniques de jeu, de l’autre ils se plantent sur des petits détails d’autant plus rageants qu’ils semblaient grandement évitables.


Le premier problème tient en la jonction des modules.
A de trop nombreuses reprises un assemblage qui paraissait simple est affiché dans la pratique comme impossible.
Il suffit qu’à l’intérieur une poubelle ou une armoire ait été entreposée trop près d’un mur pour que la construction soit rendue caduque.
A d’autres moments c’est la distance entre les deux modules qui pose problème. Et puis d’autre fois c’est lié au fait qu’on ne puisse pas accéder au module par toutes les parties.
Il faut un certain temps avant d’intégrer toutes les contraintes posées par le jeu. Or le problème c’est que ces dernières ne sont pas toutes explicitées (et c’est un euphémisme, on en reparlera) et qu’elles conduisent parfois à refaire de lourds aménagements juste parce qu’on n’avait pas anticipé certaines impossibilités que le jeu s’était bien gardé de nous dire et qui, passablement, s'avèrent avec le recul totalement ridicules.


Dans la même logique, il faut savoir que pour pimenter le jeu de la construction, « Subnautica » intègre aussi des problématiques de solidité globale de la structure.
En gros, plus une base est composée de modules et plus sa structure est susceptible de s’ébrécher et de subir des voies d’eau.
L’indice de solidité augmente ou diminue selon ce qu’on construit. Certains modules rendent l’ensemble plus vulnérable que d’autres.
Par exemple remplacer une paroi par une grande baie vitrée, c’est certes joli, mais ça fait baisser l’indice de solidité.
Construire sa station sur une plateforme plutôt qu’à même le fond marin, ça par contre, ça augmente ce même indice.
Les portes étanches participent aussi à augmenter l’indice, mais les écoutilles, elles, le font baisser.
Il y a donc tout cet enjeu à gérer, celui-ci étant d’autant plus intéressant que la profondeur impacte grandement l’indice.
Franchement, c’est assez simple et limpide comme principe mais ça n’en reste pas moins vraiment impactant sur l’expérience de jeu (surtout lorque la première voie d’eau survient).


…Sauf que – une fois de plus – les règles ne sont pas clairement explicitées.
Les messages expliquant l’impact de chaque élément sur la structure apparaissent trop rapidement, en trop petit, si bien qu’on n’a pas le temps de les lire… Et ça encore c’est dans le cas de figure où ils apparaissent, parce que dans les faits ce n’est pas systématique.
De même il est toujours rageant de constater qu’on se bouffe une voie d’eau alors qu’on a pris la peine de construire sa base au dessus de niveau de la mer !
Voir sa base totalement inondée de l’intérieur alors qu’à l’extérieur le niveau de la mer est bien plus bas est un terrible « tue-l’immersion ».


Même chose quand on constate que l’indice est le même entre une station qui est à un demi-mètre de profondeur et une autre qui est à 99m. Par contre, sitôt construit-on sa base à 101m que l’indice se retrouve décuplé… Pour le coup c’est un peu con je trouve.
Et que dire de ces portes étanches qu’on ne peut pas mettre entre deux modules joints directement entre eux, alors que dans les faits un couloir de cinq mètres les sépare concrètement ?
Et que dire du fait que, passé un certain nombre de modules assemblés, certaines animations finissent par disparaitre ?
…Ainsi passé une demi-douzaine de modules notre avatar ne grimpe plus les échelles ou bien ne ferme plus les portes ou les écoutilles. Notre avatar se retrouve téléporté en une frame d’un étage à un autre, de l’intérieur à l’extérieur…
…Là encore une fois, en termes d’immersion, c’est problématique.
D’ailleurs je pourrais conclure – toujours dans cette idée de problème d’immersion – qu’il y a quand même une étrangeté à voir un jeu prendre très au sérieux le principe de la pression sur la coque d’une base mais d’un autre côté ne voir aucun problème au fait qu’on puisse ouvrir une écoutille latérale donnant sur les profondeurs de l'océan sans que l’intérieur ne soit inondé.
Alors j’entends bien le gain que ça apporte en termes de temps pour le joueur dans sa partie mais bon…
…En termes de crédibilité, un petit sas, ça n’aurait peut-être pas fait de mal non ?


Mais bon, après c’est vrai que tous ces points peuvent apparaitre comme des détails sur le long terme.
Il y a tellement de choses intéressantes à faire dans « Subnautica » – mais aussi tellement d’effets d’immersion réussis – qu’au bout d’un moment, à force d’enchainer les heures de jeu, on finit par accepter tous ces défauts comme des conventions.
…Et on les accepte parce qu’encore une fois – l’un dans l’autre – dans la balance de ces « petites choses qui font que… », celles qui font de « Subnautica » un jeu séduisant et captivant finissent par l’emporter sur celles qui font (aussi) de lui un jeu parfois rageant, répétitif et fastidieux.


Seulement voilà, au moment d’en venir à la conclusion de mon avis sur la question, je me rends compte à quel point la frustration rencontrée est au final à la hauteur du plaisir pris.
Un jeu comme ça aurait mérité beaucoup moins de fausses notes.
Quand on a face à soi une telle atmosphère sonore, quand on a un tel sens de la mise en scène vidéoludique et quand on est capable de ficeler une intrigue qui – au fond – sait ménager de nombreux moments iconiques, on a envie de crier son amour inconditionnel pour ce jeu ; on a envie d’ériger la chose au rang de chef d’œuvre.


Je sais par exemple que – pour ma part – il y a quelques moments de ce jeu qui sont clairement gravés dans mon esprit et qui sont représentatifs d’une immersion qui fut presque absolue.
Dans mon cas, ça pourrait presque se résumer en une image : celle de mon avatar, coincé dans son cyclops en plein cratère, à observer un immense léviathan passer devant le hublot du cockpit.
Je n’avais pas remarqué le monstre en débarquant dans la zone. J’avais immobilisé mon beau sous-marin en plein milieu du cratère et, visiblement, je n’ai dû ma survie qu’au fait que j’avais tout coupé dans l’appareil pour économiser les batteries.
…Mais bon, à ce moment là je n’en savais strictement rien. J’ai juste constaté la présence du monstre immense face à moi.
Et je n’ai pas bougé, retenant ma respiration, dans l’espoir de ne pas être vu et de ne pas voir mon beau sous-marin – fruit de tant d’efforts et de labeur – se faire réduire en pièces par une créature plus grosse que lui.
Cette sensation là, elle n'a clairement été rendue possible QUE parce qu'il y a eu un long travail opéré par le jeu pour que je me sente en permanence vulnérable, mais aussi parce qu'à un moment donné le soin apporté aux rendus des lumières et des sons était au rendez-vous.
Ce genre de moment, il fait clairement partie de ceux qui sont inoubliables.
Un moment propre aux chefs d’œuvre du jeu vidéo…


…Mais c’est un fait acquis pour moi : « Subnautica » n’est pas un chef d’œuvre.
Loin de là.


On n’est pas un chef d’œuvre quand la moitié de ton temps de jeu est consacré à des allers-retours fastidieux ou à des recherches de ressources souvent couronnées d’échec.
On n’est pas un chef d’œuvre quand les règles et les principes du jeu sont aussi inégalement explicitées ; quand l’avancement dans la partie rend le menu de plus en plus pénible à parcourir ; quand l’interface est globalement pensée pour être jouée à la souris et pas à la manette.
Et on n’est pas non plus un chef d’œuvre quand on a une maniabilité aussi mal pensée sur PS4, des bugs d’affichage aussi fréquents sur PS4, des crashs aussi redondants sur PS4… Bref quand on fait un portage sur PS4 aussi foireux tout en le vendant plein pot.
Pour toutes ces raisons, je devrais cracher sur « Subnautica ».
D’ailleurs, pour toutes ces raisons, je ne devrais même pas m’autoriser à lui mettre une note aussi haute.
8/10, c’est très bien payé pour un jeu techniquement aussi honteux…


…Mais bon. Ce n’est pas non plus un hasard si j’ai amorcé cette critique en parlant de ce « petit quelque chose qui fait que… »
Parce qu’à bien tout prendre, c’est surtout ce petit quelque chose qui fait que je pardonne beaucoup.
C’est ce petit quelque chose qui fait que je suis régulièrement revenu vers ce jeu avec le sourire.
C’est ce petit quelque chose qui fait que, dans dix ans, je suis persuadé que je reparlerais encore de temps en temps de ce jeu en disant « au moins dans "Subnautica" il y avait déjà ça à l’époque, et c’était il y a dix ans. »
Donc oui, « Subnautica », malgré tous ses défauts, est un jeu qui a ce petit quelque chose…
Mieux que ça, je pense même qu'au regard de telles qualités, on peut s'autoriser à dire que ce « Subnautica », C'EST quelque chose.

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Ce qui fait la force Subnautica, c'est moins sa proposition ludique que les sensations qu'il procure et qui peuvent être résumé par la toute première situation du jeu: vous venez de sortir de votre...

le 19 oct. 2018

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9

Subnautica et la vallée de l’eau

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le 25 août 2018

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Il y a quelques semaines de cela je revoyais « Inception » et j’écrivais ceci : « A bien tout prendre, pour moi, il n’y a qu’un seul vrai problème à cet « Inception » (mais de taille) : c’est la...

le 27 août 2020

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le 20 sept. 2019

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le 14 déc. 2022

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