Super Mario Bros. Wonder
7.8
Super Mario Bros. Wonder

Jeu de Nintendo EPD et Nintendo (2023Nintendo Switch)

C’était mon évidence de 2023. Et cela dès le premier jour. Dès le 1er janvier.

2023, ça allait être l’année où Nintendo mettrait tout le monde à l’amende avec le nouvel épisode tant attendu de sa saga phare.

C’était écrit. Ç’en était même à tel point que je me disais qu’au moins, pour cette année-là, je n’aurais sûrement pas à me fouler pour désigner mon GOTY.

Car oui, c’est exactement ce que je pensais durant toute l’année 2023, jusqu’à ce que j’y joue…

…à Tears of the Kingdom.


Bah ouais ! Je parlais bien du dernier Zelda !

Non mais, vous vous attendiez à quoi ? Vous croyiez vraiment que je m’étais émoustillé pendant des mois durant, juste pour un Mario 2D ?

…Genre, il y a vraiment des gens qui – encore en 2023 – étaient capables de se chauffer à l’annonce d’un Mario 2D ?!


Pour être honnête, ce Super Mario Bros. Wonder, je n’en ai appris l’existence qu’au moment de sa sortie, qui plus est sur un panneau publicitaire. Et je me souviens très bien de ma première réaction quand j’ai vu ces citations de presse dithyrambiques inscrites au-dessus de cette transformation en Mario éléphant. Cette réaction elle a tenu, en gros, en un seul mot de quatre lettres. Et ce mot ce fut : « pfff. »

En même temps, comment y croire ?

On était alors en octobre, je ne ne m’étais alors toujours pas remis de l’incroyable déconvenue que fut Tears of the Kingdom ; déconvenue qui avait d’ailleurs réveillé l’aigreur de ce scandaleux portage que fut Skyward Sword HD ; tout ça en me faisant même remonter jusqu’à la déception mesurée (mais réelle) que fut Metroid Dread

A ce moment-là, tout me hurlait à quel point Nintendo était en train de lessiver ses plus prestigieuses licences sans aucun scrupule. Et moi, il aurait fallu que je m’enthousiasme pour un costume d’éléphant dégueulasse au sein d’une déclinaison les moins convaincantes de ce siècle, à savoir les plateformeurs 2D ?!

Non mais oh !


Et pourtant…


Me concernant, il a fallu que je le voie tourner chez un pote pour que, soudain, la curiosité me prenne.

Mais… Mais c’est que ça a l’air dynamique, chatoyant, technique et regorgeant de bonnes idées ce truc ! Mais – par Saint Hayao ! – c’est que ça aurait même l’air d’être un jeu sympa !

Or, effectivement, maintenant que j’ai craqué, que je me le suis acheté et que j’y ai passé quelques dizaines d’heures dessus, je peux désormais vous le confirmer : ce Super Mario Bros. Wonder est sympa. Vraiment très sympa même…

…Au point même qu’à un Cocoon près, il aurait très bien pu être ce GOTY qui semblait initialement promis au dernier Zelda.

Et j’avoue que ça me surprendrait presque cet enthousiasme que j’ai pu avoir à l’égard de ce Super Mario Bros. Wonder, car sitôt cherche-t-on à analyser un temps soit peu ce qu’est factuellement la proposition ludique offerte par ce jeu – et surtout sitôt cherche-t-on à lister sur quelles forces le titre s’appuie pour transfigurer cette proposition – qu’on se retrouve très rapidement bien embêté.


Déjà, niveau proposition, difficile de dire que Wonder débarque dans le game en renversant la table. C’est même tout le contraire.

Que du classique, voire même carrément du archi-classique.

Histoire prétexte à base de Mario et ses amis qui démarquent dans un nouveau royaume chatoyant disposant de super-items de puissance que Bowser va accaparer. Découpage en niveaux, eux-mêmes découpés en mondes, lesquels se finissent par le sempiternel château. Thématique singulière à chaque monde, impliquant une approche à chaque fois renouvelée du plateforming : nage sous-marine, plateformes bondissantes, systèmes de bascule ou de vases communicants, principes de voltige, niveaux à interrupteurs, etc.

Ç’en serait presque du gigantesque foutage de gueule de la part de Nintendo tellement la firme kyotoïte semble vouloir afficher ici – et cela de manière fort ostensible – sa démarche de déclinaison à peine superficielle.

« Allez, on est gentil. Regardez cette fois-ci, on n’est pas dans le Royaume champignon, mais dans le Royaume des fleurs ! Vous n’avez plus à collecter des étoiles mais… des graines de puissance ! Et puis ça, ce ne sont pas des Toads mais des Pouplins ! Et un Pouplin ça n’a rien à voir avec un Toad, hein ! Ça subit tout le temps. Ça a peur de tout. Ce n’est sur la carte que pour refiler des items ou vendre des trucs. On s’est même retenus de mettre des défis avec Captain Pouplin qui accomplit des puzzle games… (C’est qu’on ne voulait pas trop perdre les gens en étant trop originaux non plus, vous comprenez…) »

Franchement, ç’en serait presque drôle tellement c’est abusé.


Et du côté des forces du titre, c’est un peu la même chose.

Surprise ! Ça répond au doigt et à l’œil… (Ajouter ici un émoticône s’efforçant de simuler de l’étonnement.)

Oh mais dites donc… On retrouve toute la gamme super complète de mouvements de Mario. Mais c’est formidable… (Ajouter ici un émoticône s’efforçant de simuler de l’ébahissement.)

Rah et puis sinon, quelle variété de niveaux ma p’tite dame… On n’a jamais vraiment à faire aux mêmes types de défis, c’est fou… (Ajouter ici un émoticône s’efforçant de simuler l’enthousiasme.)

Alors certes, personne ne crachera sur de telles qualités – surtout qu’on ne les retrouvait pas forcément dans les derniers épisodes 2D de la saga – mais reconnaissons au moins qu’on ne cite là que de l’évidence.

Parce que bon, moi je veux bien qu’on s’émoustille sur la qualité de réalisation de ce Mario à base de « olala ! Ce Mario, mais qu’est-ce qu’il est abouti techniquement ! », sauf que ça reste quand même quelque chose de logique tant Nintendo ponce ce format depuis quarante ans et qu’il ne s’est pas privé de nous en pondre une belle palanquée durant ces quatre dernières décennies.


D’ailleurs elle serait sûrement là ma première grosse surprise avec ce Super Mario Bros. Wonder : comment expliquer que, chez moi, ce titre n’ait généré aucune lassitude au regard de la proposition éculée qu’il propose ?

C’est qu’on s’en est bouffé du Mario 2D ces derniers temps ! Et c’est peu dire si les derniers épisodes puaient déjà la formule usée jusqu’à l’os !

Seulement voilà, il faut quand même bien avouer que, pour cet épisode Wonder, on sent que Nintendo a voulu mettre les plats dans les grands.

Parce que, contrairement aux épisodes précédents qui donnaient l’impression de simplement capitaliser sur les forces de la licence, on ressent ici une profonde volonté d’approfondissement et surtout d’optimisation.


Alors certes, on retrouve toujours le principe des costumes de Mario qui lui apportent certaines spécificités, mais là où Wonder pousse plus loin le concept, c’est qu’au lieu de simplement se contenter d’un nouveau costume, un peu comme Super Mario 3D World s’était paresseusement arrêté à un nouveau costume de chat, cet épisode a décidé d’y associer une deuxième dimension en mesure de jouer sur les capacités de notre charmant plombier : les badges.

Car oui, avec les badges, il y a moyen d’associer une autre capacité indépendamment de celle du costume. Et là où c’est malin, c’est que la combinaison entre les deux n’est pas régie par les mêmes règles : le badge, on le choisit au début du niveau et on ne pourra pas en changer tout du long (à moins de mourir ou de le recommencer du début) ; par contre, le costume, on peut le changer pendant le niveau, mais ça va dépendre des items qu’on trouve sur place, voire de ce qu’on s’est mis en réserve…


Parce que oui, maintenant, à l’image de ce qui avait été mis en place aux temps du premier Super Mario World – et qui avait été depuis oublié jusqu’au récent Bowser’s Fury – on peut se mettre un petit bonus de côté. Et l’air de rien, ça introduit rapidement une petite dimension stratégique cette combinaison-là.

Les défis et les collectibles dans un niveau étant multiples, cela pousse celui qui veut les accomplir jusqu’au bout à considérer l’ensemble des possibilités susceptibles de s’offrir à lui.

Parfois on est dans un niveau clairement pensé pour favoriser l’usage de la fleur de feu, donc on pourrait être tenté, sitôt un bloc nous délivre ce type d’item, de le prendre afin de s’en garder une en réserve si, par malheur, on venait à se faire toucher.

Mais seulement voilà, la possibilité existe aussi que dans un niveau totalement axé sur les boules de feu, on puisse ponctuellement se retrouver avec un endroit où le costume d’éléphant pourrait s’avérer pertinent. Du coup, je la prends cette fleur, ou je la laisse filer pour conserver dans ma réserve mon costume d’éléphant ?

…Et même chose pour les badges au fond. Est-ce que je préfère m’offrir un petit bonus sur le fait de planer, de rebondir sur les parois, de nager plus vite, de sauter plus haut, d’aimanter les pièces, d’avoir des plateformes de cubes supplémentaires pour aider mon exploration ?

Oh ça oui, je l’avoue : cette habile combinaison entre badges et costumes rafraichit clairement l’approche qu’on pouvait avoir jusqu’alors d’un Mario 2D classique, et c’est appréciable…

…Et c’est d’autant plus appréciable sitôt considère-t-on l’énergie insufflé dans ce titre.


Rah ça ! Ça ne parait pas au premier abord, mais qu’est-ce que ce jeu est dynamique !

Que ce soit dans la transition entre les niveaux que dans les niveaux eux-mêmes, les choses se font vite. C’est très dense. On est très facilement amené à louper un truc, mais sans pour autant que ce soit si dérangeant que ça dans la mesure où les choses peuvent se refaire très rapidement.

En cela, Wonder incite à faire et à refaire. Et on le refait d’autant plus spontanément qu’on sait que ça ne va pas nous prendre trop de temps. En conséquence, on peut se retrouver parfois affaire une demi-douzaine de fois le même niveau, et cela dans un souci de recherche ou de complétude, ce qui peut nous amener, sans nous en rendre compte, à peaufiner notre habilité et à optimiser notre parcours grâce à des enchainements qu’on ne se serait pas permis de faire lors de nos premières runs.

L’air de rien, ce dynamisme incite le joueur à pas mal s’engager et à tenter, que ce soit en changeant de badges ou en prenant davantage de risques, ce qui fait que la formule se révèle très efficace parce que vachement cohérente.


Efficace, la formule l’est d’autant plus qu’à côté de ça, elle sait se montrer particulièrement fluide.

Parce que si, à un moment donné, un défi ne nous motive pas trop, alors ce n’est pas grave : la carte est ouverte et on peut dans ce cas aller se confronter à un niveau plus posé. Car pour le coup, Wonder a l’intelligence d’annoncer à l’avance le niveau de difficulté de chacun de ses niveaux, donc libre à nous de modeler notre aventure selon notre envie de l’instant.

Et puis il faut dire qu’à côté des niveaux linéaires classiques, il y a aussi des niveaux défis, des niveaux de recherche, des niveaux d’énigme, des niveaux de validation de compétence pour acquérir de nouveaux badges…

Bref cette fluidité apporte un confort très revigorant, mais un confort qui n’exclut pas pour autant l’existence d’enjeux.


C’est que, fort heureusement, Wonder a su éviter ce piège qui consiste à trop mettre à l’aise le joueur, au point qu’il ne soit plus vraiment en situation d’être challengé.

Pour ce faire, Nintendo a su fort habilement structurer son titre en strates d’engagement judicieusement articulées entre elles, générant ainsi un effet d’appel pour tout joueur cherchant à pousser un temps soit peu le jeu.


Pour ma part, ça s’est manifesté sitôt j’ai voulu commencer à compléter des niveaux à 100%. Et l’air de rien, le jeu parvient à t’inciter à le faire assez mécaniquement. Par exemple, en ce qui me concerne – et vous allez voir, c’est tout con – mais le simple fait qu’on m’ait invité à ouvrir la carte qu’après les premiers niveaux d’introduction, ça a déclenché chez moi un petit engrenage d’engagement tout bête.

Parce qu’en ouvrant la carte, j’ai forcément vu les fiches informationnelles des niveaux que j’avais déjà faits, et le jeu mettait bien en évidence le fait qu’à certains endroits, je n’avais pas validé tous les défis affichés. Il laisse bien apparaitre le trou apparent avec les petits pointillés qui te disent : « il y a ici cette pièce violette que tu n’as pas chopée, et là ce drapeau de fin de niveau que tu n’as pas hissé à son maximum », si bien que ça te titille un peu de les combler ces trous… Malgré tout, libre à nous à nous de préférer continuer notre exploration si on le préfère, et c’est d’ailleurs ce que j’ai fait...

Oui, mais sauf que…


…Sauf qu’en poursuivant le jeu en explorant les niveaux du monde 1, on se rend quand même vite compte que ce n’est pas non plus la mort de compléter un niveau à 100%. Il est même tellement facile de finir un niveau sans se soucier des défis que, face au manque de mérite à le faire, on est vite tenté de faire ce petit effort pour bien tout ratisser et à commencer à se faire challenger un tout petit peu.

En général, au début, il suffit juste de s’y reprendre à seulement deux ou trois fois pour arriver à ses fins. Et puisque – comme je le disais plus haut – le jeu présente ce grand mérite d’être fluide, dynamique et modulable à souhait, on arrive finalement assez rapidement à accumuler ces pastilles vertes qui, sur la carte, nous disent qu’on a retourné un niveau à 100%.

Du coup, la tentation peut facilement nous prendre de compléter tout de suite les pastilles manquantes, surtout qu’avec les petits challenges qu’on s’est imposé, on se sent désormais plus à l’aise avec le jeu, et on se dit que ce ne sont pas les premiers niveaux d’introduction qui vont nous résister… Et c’est ce que je me suis personnellement dit, jusqu’à ce que je cherche à compléter le deuxième niveau introductif. Or, là, que s’est-il passé ? Alors que j’avais bien tout chopé ; qu’il n’y avait plus aucun trou dans la fiche, malgré tout ma pettie pastille verte n’apparaissait pas. Mystère…

Du coup j’ai refait le niveau plusieurs fois, je me suis dit que, peut-être fallait-il accomplir tous les challenges sur une seule run sans mourir, mais non. Là encore, toujours pas de pastille verte. Et là, sans le savoir, je venais de mettre le doigt dans l’engrenage…

…Et constatez quand même comment c’est malin.


Moi, je vois une fiche où tous les challenges sont accomplis mais où la pastille verte n’apparait pas, je me dis que – forcément – il y a un challenge secret qui se cache là-dedans.

Alors j’y retourne. Je repasse tout au peigne fin. Une fois. Deux fois. Je me dis que – Nintendo oblige – ça doit être à la fois évident et à la fois contre-intuitif. Pas loupé. En fouillant bien – bim ! – je tombe sur une sortie secrète. Or, qui dit sortie secrète, dit apparition d’un nouveau sentier qui conduit vers un nouveau niveau. Et bien évidemment, au sortir de ce niveau, il y a toute une nouvelle zone qui s’ouvre à nous ; une zone constituée de stages généralement plus corsés, puis au bout de la zone, si on a bien tout fait, le jeu nous ouvre un accès à un monde spécial qui n’est composé que de niveaux particulièrement balèzes.

Bien évidemment, difficile de ne pas griller qu’il y a six entrées dans ce monde spécial, six entrées pour autant de mondes qui composent ce jeu. A partir de là, l’envie de retourner cette foutue carte m’a tenaillé au corps comme au bon vieux temps du tout premier Super Mario World.

Bref, autant le dire : Nintendo, sur ce coup-là, vous avez vraiment su gérer comme des chefs. Vous m’avez ferré bien comme il fallait…


Alors oui, indéniablement, si ce Super Mario Bros. Wonder peut séduire à ce point des joueurs qui, comme moi, sont adeptes de plateformeurs, c’est bien évidemment parce que s’exprime dans ce jeu un incroyable savoir-faire ; une expérience pluri-décennale que peu de studios dans le monde peuvent leur opposer...

Et pourtant – alors que je me rapproche doucement mais sûrement de la conclusion de ce billet – je me rends compte qu’en disant ça, j’ai sûrement dit le plus gros mais sans pour autant avoir dit l’essentiel.

Parce que, certes, si ce Super Mario Bros. Wonder n’avait pas cumulé toutes ces qualités que je viens de vous énumérer par le menu, il y aurait fort à parier que toute sa formule en aurait pâti, et qu’il ne serait pas le jeu solide dont je suis train de vous tresser les louanges. Néanmoins, force m’est aussi de constater qu’il m’est déjà arrivé de retrouver ces mêmes qualités chez d’autres plateformeurs, mais sans que ceux-ci ne parviennent pour autant à susciter le même engouement.


Dans mon cas, je pourrais par exemple vous évoquer mon rapport avec Donkey Kong Country : Tropical Freeze.

Sur le papier, le jeu de Retro Studios coche toutes les cases qu’on vient ici de citer : gameplay irréprochable, niveaux variés, grande diversité dans les mécaniques proposées, dynamisme global de l’ensemble, challenge progressif et adaptatif selon les profils de joueurs, niveaux cachés, etc.

…Et pourtant, en ce qui me concerne, j’avoue que Donkey Kong Country : Tropical Freeze, ça m’a parlé sans me parler. Dans le cas du jeu de Retro Studios, la lassitude a fini par l’emporter, là où elle ne m’a jamais atteint dans le plateformeur façonné par la firme kyotoïte. Et même si je pense que cette différence de ressenti repose aussi en partie sur le fait que Wonder s’appuie sur une formule plus subtile que Tropical Freeze, il n’empêche que, pour moi, ce n’est pas ça qui a été déterminant dans ma différence d’approche entre les deux titres.

Non, avec un peu de recul, je pense que ce qui a surtout joué – et ça peut-être vous surprendre – c’est dans la manière dont Nintendo a su traiter son titre selon une logique de décalage.


Elle est là, pour moi, la grande force de ce titre.

Oui, comme je le disais en introduction, Mario est une saga connue. Ses codes sont installés. Quant à son univers, il fait désormais partie des murs, quand bien même est-il constitué de royaume champignon, de tuyauteries anarchiques et de plantes piranha sortant de partout…

Alors certes, c’est une force de disposer d’une identité aussi forte ; laquelle vous dispense d’avoir à gagner les cœurs des joueurs. C’est sûr que c’est tout de suite plus simple quand on a déjà la réputation d’être un Saint patron dans son domaine. Mais c’est aussi une faiblesse pour peu qu’on ne sache pas reproduire l’exaltation des premières fois ; cette jouissance de notre premier contact avec la saga.

Et c’est là qu’il joue un rôle essentiel cet art du décalage dont Nintendo fait ici montre.

Il faut à la fois respecter le canon tout en surprenant les gens. Et l’air de rien, ce Super Mario Bros. Wonder c’est exactement ce qu’il fait, en n’oubliant jamais de nous surprendre.


A peine commence-t-on le jeu et qu’on découvre ses nouveautés mécaniques que voilà qu’on se retrouve pris dans une parade de fleurs piranhas en train de chanter ; qu’on se fait emporter par un troupeau de pseudo-buffles écrasant tout sur leur passage ; qu’on est envoyé dans les airs à devoir rebondir d’ennemis en ennemis…

Or, tout ce que je viens de citer, à chaque fois, c'est amené par le même élément : la fleur de puissance qui, sitôt la saisit-on, transforme totalement le niveau.

Ce type de fleur, il y en a une par niveau ; c’est-à-dire que, malgré le nombre pléthorique de niveaux, à chaque fois qu’on entre dans l’un d’eux, on a cette promesse qu’à un moment donné, tout va être rebattu de manière totalement inattendue.

Des fois, l’obtention de la fleur déclenche un challenge particulièrement nerveux alors qu’on était jusqu’alors dans un niveau pépère, et parfois pas. Parfois il y a juste zéro danger et l’événement déclenché est simplement une vaste farce… Et puis, parfois, on pense que c’était une vaste farce, et on se rend compte que, finalement, un collectible nous a échappé lors de l’événement.

Cette fleur de puissance, c’est tout con, mais c’est vraiment l’épice qui vient relever tout le plat et qui lui donne toute sa singularité.

C’est l’élément qui scelle le fait que cet épisode dispose d’une indiscutable identité.


Et tout ça, pour moi, ça ne relève clairement pas de l’accident.

Nintendo est tellement en démonstration avec cet épisode qu’il est allé jusqu’à transformer son jeu en manifeste pleinement affiché.

Oui, on va te refoutre des royaumes, des personnages et des univers que tu connais déjà, parce que là n’est pas l’ADN de notre chef d’œuvre.

Et non, l’ADN d’un bon Mario ne tient pas qu’à sa technicité, sa variété et son accessibilité… Non, Mario c’est aussi et surtout la réinvention permanente.

C’est être l’ancien qui continue de montrer la voie aux jeunes.

C’est la fraicheur malgré l’âge.

J’irais même jusqu’à dire, c’est l’insouciante maturité de celui qui sait qu’il est indiscutablement le patron.

Le simple fait que ce soit par ce titre que Nintendo semble désormais assumer le caractère pleinement psychédélique de son univers, pour moi, c’est en soi un acte fort.

Personne dans le monde de jeu vidéo n’a l’ancienneté et la notoriété cumulées pour se permettre ce genre de pied de nez et d’autodérision sans que ça puisse être perçu comme une simple farce.


Parce que non, Super Mario Bros. Wonder est loin d’être une farce.

Bien au contraire, il s’impose à mes yeux comme un sacré acte d’autorité et une jouissive démonstration de puissance de la part d’une société qui avait beaucoup à se faire pardonner.

Alors certes, cet épisode n’est pas non plus une sidérante révolution qui mériterait de l’ériger au rang de remarquable chef d’œuvre, mais il rappelle aux forces du genre, et surtout aux forces d’une franchise qui, bien qu’ayant atteinte un âge canonique, semble loin d’être encore essorée.

Alors bravo à Nintendo pour cette belle réaction d’orgueil.

Tout n’est pas pardonné, loin de là,

Mais ce Wonder participe à refermer les plaies,

A la firme kyotoïte de poursuivre donc sur cette voie…

lhomme-grenouille
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le 5 mai 2024

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