Super Mario World
8.3
Super Mario World

Jeu de Nintendo EAD, SRD et Nintendo (1990Super Nintendo)

Ah, Super Mario World. Le grand-frère favori de la famille des Mario 2D. Le jeu vidéo le plus speedruné. Le jeu de plate-forme le plus joué, le plus aimé. Le mythe qui sonna naissance aux très nombreux bâtards (non péjoratif) de rom hacks. Le chapitre de la saga qui donna leurs noms aux méchants iconiques par son ending inoubliable (les Bob-ombs, Wigglers...) Le plus beau des frères, celui qui a réussit à apprivoiser Yoshi, celui ayant le plus de secrets, le plus mémorable des terrains de jeu. L'île aux 96 sorties, jonchée de rocs, collines, plaines parfumées au beignet et cavernes à la vanille, à la forêt bouffeuse de neurones et pleine de secrets... Et pourtant, aucun membre de cette fratrie en deux dimensions n'a réussit à conquérir la princesse (allez, Super Mario Bros. 2 ne compte pas, puisqu'il a été "adopté" et calqué sur Doki Doki Panic). Mais à défaut de n'avoir obtenu qu'un misérable baiser sur le pif et non le coeur de la cruche en rose, Mario conquit celui des joueurs. Il a laissé une cicatrice d'amour si profonde qui donna à World cette aura mythique.


Rien ne s'est perdu par le temps. J'ai toujours vu cette épopée du plombier par le prisme du bouton B. La touche élémentaire du saut. Jumpman fut son nom de baptême, ne l'oubliez pas. World est spécial, n'étant pourtant que la quatrième aventure du champivore. Son truc, sa signature se trouve dans cette sensation si plaisante que transmet la pression de la touche de saut. Super Mario World est selon moi, la quintessence du saut et par extension, de la plate-forme. Un saut extrêmement précis, guidé par la force du pouce et de l'inclinaison de la croix couplé au rythme de la course de Mario. L'on me dira que tout Mario repose sur cette mécanique. Je réponds "joues-y, saute sur les Koopas, enchaîne avec une course suivie d'un spin jump et retourne aux autres épisodes pré-16 bits". Jamais Mario n'a été aussi maniable. Super Mario Bros. 3 a instauré la P-speed, le seuil de vitesse de course du plombier qui accélère la plate-forme. Mario 3 fut plus flottant, plus à l'aise dans les pixels aériens. World et son feeling son l'antithèse du troisième épisode. La gravité, chaque saut de Mario la ressent. Non pas qu'il est lourd, mais plus direct, plus en phase avec la manette et son joueur. Le bouquet? L'apparition d'un nouveau saut, selon moi aussi important que le légendaire triple saut: le spin jump. Les pics et autres scies coupeuses de plombier peuvent se cacher hors screen. Ce bond en vrille aurait pu figurer dans un Smash Bros. tant son potentiel de jeu pimente les rencontres avec les obstacles (non, ce n'est pas le down air!) Mario rebondira sur chaque lame, fléaux, Hériss et se propulsera à des hauteurs semblables aux sauts à pleine vitesse. De nombreux créateurs de Super Mario Maker se sont reposés sur cette mécanique pour créer une montagne de stages impossibles à conquérir sans le rebond du spin. Attention toutefois à la lave, éternelle grande vilaine des jeux de plate-forme.


L'aîné Mario Bros. 3 a été très généreux envers le petit World, léguant la P-speed, mais aussi un ersatz de la Super Feuille qui fera de Mario le nouveau maître de l'air: la Plume. Au premier abord, elle sait distribuer des claques tout comme la queue de l'ancienne transformation du plombier. Son véritable potentiel s'activera à la vitesse de pointe du personnage. Il s'envolera alors et jouera encore une fois avec cette gravité worldienne. Soit pour flotter et traverser le stage comme un pet, ou bien pour retomber avec fracas au sol pour nettoyer l'écran de vermines. Oh, et le spin jump couplé à la plume donne des merveilles. Et comme le veut la tradition, les Fleurs de Feu pousseront toujours sur les blocs jaunes et l'Étoile d'invincibilité sera toujours autant destructrice que bien cachée. Oublions le petit nouveau power-up du P-ballon, juste bon à traverser 2 morceaux de stages et 1 entier sur les 96 du titre. Super Mario Maker 2 en a fait un bien meilleur usage. Parlons du nouveau venu, ce dragon valant une armée à lui tout seul.


Yosh, traduction littérale de "ok! / on s'y met!" en japonais, est un nom tout trouvé pour la monture du plombier. On rajoute un petit "i" au bout pour respecter le kana "shi" (bien que ce son est très souvent omis selon le mot et le débit du locuteur) et l'on obtiens le désormais célèbre dragon Yoshi. ... ou dinosaure? Jetez un coup d'œil aux croquis de Miyamoto durant sa conception!


https://guidesmedia.ign.com/visualhistory/yoshi/1.jpg


Quoique, il crache du feu, est capable de voler, son Final Smash "Super Dragon" de Smash Bros. Brawl vient accentuer le débat... Mais World se déroule sur Dinosaur Island! M'enfin, il est autant draconique et saurien que caméléon avec sa langue et ses multiples couleurs. Quoiqu'il en soit, le brave Yoshi est de loin l'ultime "power-up" de la série Mario Bros. en 2D (comment ça l'étoile?).


En selle, Mario est bénit d'un seconde, voire d'un troisième (si champignon ou autre transformation il y a) "coup à prendre". Mieux, le Yoshi apeuré après contact avec l'ennemi est rattrapable! Encore mieux: la touche du spin jump peut sauver Mario in-extremis à quelques frames du gouffre! Toujours mieux: ce saut hors du Yoshi est gigantesque lorsqu'il est couplé à celui du Yoshi! Ce n'est pas fini! Les pics, le dinosaure s'en bas les boules. Ses chaussures produisent un effet semblable au spin jump sur les scies et autres joyeusetés pleines de piquants. Et sa langue! Pratiquement omnivore, parfois plus carni que omni, il est capable de gober du Goomba en passant par le Wigglers. Certains Thwomps et Bill Dozers résisteront à sa langue, mais le secret du Yoshi réside dans son ennemi naturel: le Koopa. Selon la couleur de la carapace de sa victime, le dragon devient toujours plus puissant avec de nouveaux pouvoirs. Le Koopa rouge transformera Yoshi en véritable dragon cracheur de feu, le bleu le fera voler à volonté (pratiquement tout stage devient skipable, hors stages en profondeur et aquatiques) et le jaune provoquera une secousse d'un rayon de 2 Marios autour du Yoshi. Le power-up suprême je vous dis.


Causons mappemonde et de ses moults secrets. Bien que le jeu met en scène un Yoshi tout juste pondu par Nintendo, Dinosaur Island n'est pas l'Île des Yoshi de l'opus suivant (Yoshi's Island). Une carte plus terre à terre et souvent en profondeur comparé à la haute montagne du second jeu. Le terrain de World a, semble-t-il, été conçu par une dev team affamée. La Plaine Beignet, le Dôme Vanille, Pont Fromage et le caché Lac Soda... En terme de design et de secrets, aucun autre Mario en deux dimensions n'a pu s'en rapprocher. Allez, Super Mario Bros. 3 pour la forme. Mais même le plus garni des pays de cet épisode se fait dépasser par les kilomètres carrés remplis de points d'intérêt de Dinosaur Island. Chaque stage poussera Mario d'un pas en avant jusqu'à la Vallée de Bowser. Linéaire sans l'être vraiment, un pro saura finir l'aventure en moins d'une heure en empruntant les passages secrets. Les détours sont nombreux, en particulier sur les niveaux "rouges". Le level-design n'est jamais lourdeau, jamais bien difficile. Même les détestés passages aquatiques ont fait l'exploit d'être bons! Une crevasse suspicieuse, l'écran qui semble s'étendre plus loin que la ligne d'arrivée, les blocs "!" menant à des hauteurs étranges... La clé est la clé! Cet item doit retrouver sa serrure, tandis qu'un tuyau mènera vers d'autres horizons. Parfois, un long vol plané d'un Mario Cape pourra traverser de peu les dessous d'un portail de fin pour arriver à un second portail plus loin. Et l'abusé Yoshi pourra même étendre sa langue pour atteindre des objets derrière les murs! Sans parler des maisons hantées, véritables extraterrestres de level-design aux sorties ingénieuses. Une fois les pieds posés aux châteaux forts, le stage devient plus agressif. Jonchés d'ennemis et d'obstacles couverts de pics, leurs boss sont tout sauf coriaces. Trois coup de bottes et le château s'écroule, ouvrant la voie au monde suivant lui aussi sorti d'un plateau de dessert.


Cette sucrerie s'étend même jusqu'aux oreilles du joueur. Koji Kondo, le mythique compositeur de Nintendo a encore pondu l'une de ses meilleures compositions. Entre l'Overworld inoubliable, les fonds marins qui bercent même les poissons in-game, l'oppressif thème des forteresses et j'en passe... Kondo n'a pourtant fait qu'une chose toute simple mais maîtrisée à son plein potentiel: la réinterprétation du leitmotiv d'Overworld. Pour faire une analogie plus moderne, il s'agit d'un procédé qu'a aussi utilisé Toby Fox pour la soundtrack d'Undertale. Les thèmes souterrains et des manoirs hantés semblent totalement se détacher du reste? En réalité, une oreille aiguisée pourra déceler les patterns d'Overworld. Le compositeur n'a fait que reprendre cette piste précise et l'atmosphère si particulière de cette île aux coins parfois colorés et pleins de vie, et parfois abandonnés aux fantômes.


Je vais vous donner un anecdote. Par chance, je rédige ce pavé en 2021, soit 30 ans après la sortie du jeu original. Ces trois décennies ont vu naître de nombreuses légendes sur le passif de Nintendo, l'entreprise désormais numéro un du Japon. Entre temps, de nombreuses générations de fans sont nées. Et certains d'entre eux ont fait la découverte d'un secret enfoui depuis l'époque Super Nintendo, par PURE CHANCE. Octobre 2020. Un immense faille dans les systèmes de la boîte nippone a lâché dans la nature un tas de données confidentielles. Cette affaire porte le nom de "Nintendo Gigaleak". Certains d'entre vous ont, par exemple entendu l'épilogue à l'affaire "L is real" de Super Mario 64. Et effectivement, Luigi fut présent dans les données du jeu selon ces fuites. Ce genre de mystères vidéoludiques a été résolu après des dizaines d'années à spéculer. Ces données valant de l'or pour tout passionné de jeu vidéo ont aussi atteint World.


Rappelez-vous, la Nintendo Playstation. Ce projet du fin fond des abysses de l'histoire de Nintendo. Avant de se lancer dans la 3D, l'entreprise de Tokyo s'est rapproché de Sony afin d'enfanter une machine tournant au disque et graphiquement surpuissante. Le destin en a voulu autrement. Parmi ces données flottant sur Internet, l'une d'entre elles a attiré l'attention des amoureux de soundtracks du jeu vidéo: la musique de Super Mario World est en réalité compressée à l'extrême, faute à sa puce sonore. Qu'est-ce que donneraient ces données alors décompressées et, si le passé en fut différent, portées sur une machine au son meilleur? La Nintendo Playstation par hasard? Cela donnerait ceci:


https://www.youtube.com/watch?v=uycW17LIpxk


En reprenant les samples originales marquées dans les données dispersées dans le monde, des fans ont lancés le projet des pistes sonores dites "restored". Je vous conseille d'y jeter un œil. Certains thèmes sont absolument ahurissant tant ils diffèrent des originaux. Encore une preuve du grand talent de Koji Kondo qui, même limité par le hardware de la console, a pu composer l'un des opus magnum de la saga Mario.


L'héritage de World est incroyable. Les fans y participent encore en l'an 2020 et le feront pour les temps à venir. Super Mario World a le game design d'un jeu intemporel. Une infinité de hacks en témoignent. Contrairement aux autres épisodes 2D du plombier, celui-ci est le seul a autant déchainer les passions des dizaines d'années plus tard (Super Mario 64 étant le Mario 3D ayant le plus de rom hacks). Trop nombreux pour tous vous les citer, il y a pourtant un petit trio que je dois nommer par respect à leurs créateurs que je considère comme de potentiels level-designer de génie. Invictus, comment ne pas le nommer. Difficile et pourtant si génial. Chaque stage mettant en scène une nouvelle idée, un concept parfois inconnu de l'original Mario World (tel que le lien entre le bas et le haut de l'écran, ou encore des niveaux en chute libre ingénieux...). Et évidemment, avec un collection de superbes musiques soigneusement choisies par ces fans bercés à la Super Nintendo. Super Riff World est lui aussi un intense plateformer que je recommande chaudement. Enfin, Mario's Meat Mystery. Un sacré délire qui part loin, vraiment loin tant dans son idée, dans son atmosphère et ses musiques qui ont finies dans mes playlists. Mario World repassera par là, jamais vraiment mort et toujours aimé. Et peu nombreux sont les titres à fédérer des amateurs pour créer leurs propres jeux. Le roi est mort, vive le roi!


Bon, fini les sucreries et mots mielleux. Super Mario World, aussi glorieux soit-il, ne m'a pas poussé à cliquer sur la dixième étoile sur la fiche du jeu. Tout y est portant. Tout, sauf la manette. J'aime ce pad coloré plus que tout (et je détesterai celui de la N64 plus que tout). Évolution naturelle de la manette NES, plus compacte et adaptée aux courbes des mains, c'est l'utilisation des touches latérales que je pointe avec mon doigt d'honneur. J'en ai aussi parlé pour Zelda: A Link o the Past. L et R sont ce que la 3D est à la Nintendo 3DS. Un simple gadget qui a pourtant tout pour améliorer l'expérience en jeu! Cet avis s'est d'autant plus affirmé depuis que j'ai joué aux versions Game Boy Advance de certains jeux Super Nintendo. World version Advance a tout fait pour me faire détester l'original. Pourtant doté d'une colorimétrie qui fait littéralement pâlir la version Game Boy Advance, d'une meilleure puce sonore qui fait honneur à Kondo et aux réverbération des stages souterrains, Super Mario World SNES perd un gros point sur le gameplay. Le plus gros hic étant le spin jump, placé sur la touche A. Essayez donc de courir (Y), le pouce prêt à sauter au moindre obstacle sur le bouton B. Et soudain, un Thwomp / Piranha. Il faut donc relâcher la touche de course pour appuyer sur le B du spin jump. Quelle galère! La version Advance donne une tarte humiliante à son grand-père en changeant le mapping du saut en vrille. Bon, la disparitions des touches Y et X y sont pour quelque chose, mais le confort est sans pareil. Et le système de sauvegarde! Cette relique du passé, forçant le joueur à finir un château ou un manoir, fut l'unique méthode de sauvegarde des données! Pire, une fois Bowser atomisé, le savestate du jeu se fera uniquement en repassant par le portail de fin des manoirs! Chose que corrigera la portable de Nintendo. Inutile donc de vous donner ma note pour la version Advance, vous vous en doutez bien ͡~ ͜ʖ ͡°)


Super Mario World est l'adolescence de la licence, pas loin d'un adulte précoce qui a trop vite et trop bien développé ses mécaniques. Maniable, amusant, jamais à court d'idées et intarissable dans la mémoire des joueurs. Toujours vu comme le pinacle de la plate-forme 2D d'antan et d'aujourd'hui, World continuera à prospérer si non pas grâce aux nombreux easter eggs de Nintendo, ce sera par des fans toujours attachés à cette île chatoyante aux mélodies intemporelles. Ne pas avoir joué à Mario World, c'est ne pas avoir joué au meilleur jeu de plate-forme. C'est avoir un trou noir béant dans sa culture de joueur passionné de la manette. Heureusement, la légende ne s'est pas arrêtée là. Mario n'a fait que s'améliorer, surtout à cette époque bénie. Et quelques années plus tard, Nintendo finira par encore se surpasser...

Créée

le 4 mars 2021

Critique lue 173 fois

2 j'aime

Mottainai

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