Superfrog HD
3.9
Superfrog HD

Jeu de TickTock Games et Team17 (2013PS Vita)

Depuis un bon moment déjà, Team 17 semble bien décidé à faire n'importe quoi... D'un côté, la série Worms, qui ne réussit plus à intéresser grand-monde malgré des titres abusés et des promesses toujours plus ronflantes (Worms Reloaded, Worms Revolution, Worms Ultimate Mayhem : qui y a passé du temps, sincèrement ?). De l'autre, des remakes d'anciennes gloires moyennement bien senties, qui ont pas mal de publicité mais finissent rapidement oubliés dans des Humble Bundle dont personne ne veut. Après la très moyenne prestation (épisodique) d'Alien Breed, c'est Superfrog qui fait son retour. Et, franchement, on veut bien que ce soit l'intention qui compte, que Superfrog ait été sympathique en son temps, qu'il n'y a pas de raison que seuls les jeux les plus célèbres aient droit à des remakes - après tout, ressortir une telle licence peut aussi être l'occasion de la faire découvrir au plus grand nombre. Mais Superfrog n'a rien à faire au vingt-et-unième siècle. Même (surtout ?) ceux qui ne l'ont pas connu avant s'ennuieront ferme, voire pesteront contre ce jeu de plates-formes complètement à côté de la plaque. Superfrog est d'abord l'héritier d'une certaine tradition "homemade", du temps où les développeurs faisaient leurs jeux un peu n'importe comment, prenaient un personnage, des décors, créaient des niveaux qu'ils ne faisaient tester à personne et foutaient des bonus partout pour qu'on ne veuille plus s'arrêter. Même si, quelque part, il n'est pas complètement hors contexte avec ses collectibles par milliers, qui rappellent assez certains AAA d'aujourd'hui, une sorte d'Assassin's Creed en 2D où on aurait remplacé les tableaux par des pommes, les parchemins par des cerises, les hiéroglyphes par des bananes, les plumes par des couronnes... Dans Superfrog HD, on passe sa vie à ramasser des trucs qui font des petits bruits sympa avant d'aller jusqu'à la sortie du niveau. Si on quitte la zone sans avoir tout récupéré, ce qui est généralement très facile, on se fait taper sur les doigts avec un impitoyable score d'une seule étoile, vous voyez le genre ? Alors on farfouille partout, il y a plein de passages secrets à base de faux murs qui se dévoilent quand on se frotte à eux, des embranchements un peu partout, au final chaque niveau est construit comme un gigantesque labyrinthe construit sans aucune logique.

On a essayé de choper le score maximal pour certains niveaux, notamment les plus faciles. Quelquefois, en traçant un niveau très rapidement et en ayant bien découvert tous les passages secrets, on chope un score d'une seule étoile. D'autres fois, en lambinant, en mourant lamentablement et en évitant les bonus, on en obtient quatre, cinq. Bon, on n'a rien compris. Pas grave : jouons le jeu quand même, essayons de choper un maximum de bidules scintillants pour tous les niveaux. Il y a six mondes, basés sur des thèmes cliché (la forêt, le cirque, le château hanté, la neige...) utilisés avec une absence d'à-propos sidérante. On aurait pu penser que les développeurs de Tick Tock (sous-traitants sur le projet) se seraient un minimum foulés pour insuffler à Superfrog une personnalité un tant soit peu contemporaine, pertinente, améliorer grâce à la technologie et au savoir-faire d'aujourd'hui les carences les plus criantes de l'original. On peut se brosser. Les décors sont affreusement vides, grands et inutilement labyrinthiques. Les mondes ne se différencient entre eux que par l'emploi d'une charte graphique différente et pourtant uniformément laide. Le plus glauque d'entre eux est certainement le monde du cirque, qu'on ne ressent que par l'audio (le flonflon de clown habituel en musique d'ambiance), dont les décors sont composés de... murs de planches tagués, devant lesquels, quelquefois, traîne un ballon multicolore qui n'est même pas interactif. Même les ennemis sont hors de propos : ce sont des petits vers de terre dans tous les niveaux, auxquels s'additionnent rarement des méchants ayant exactement le même comportement mais skinnés par rapport au thème du monde (quelques fantômes déprimés dans le monde du château hanté, bravo).

Niveau scénarisation, il est généralement facile de flinguer un jeu de plates-formes ; mais Superfrog fait vraiment tout pour se recevoir des claques. L'introduction affreuse, les transitions ignobles entre les niveaux, ponctués d'un texte que même le mot "nul" ne saurait qualifier assez sévèrement, font tout simplement pitié. Grand moment de solitude quand, après avoir fini un monde, un écran apparaît qui dit (à peu de choses près) : "vous avez gagné, mais vous avez trouvé une machine à voyager dans le temps, et vous êtes maintenant dans un château". Rires gênés. Niveau maniabilité, le titre a également été pensé et produit avec les pieds, ce qui ne gâche rien. Superfrog se contrôle quelquefois comme un mauvais Mario, quelquefois encore comme un mauvais Sonic, selon l'humeur du level designer, qui peut changer d'un instant à l'autre et sans prévenir. On récupère donc, régulièrement, des bonus de vitesses qui font filer Superfrog à cent à l'heure : super, jusqu'à ce que, soigneusement dissimulé par un bonus (l'acte est donc 100% volontaire de la part des développeurs), soit dissimulé une toute petite pique tuant instantanément la grenouille. Les sauts ont également énormément d'amplitude et d'inertie ; ce serait sans doute très intéressant s'ils avaient une quelconque utilité dans le gameplay, étant donné que la plupart des niveaux, tout en étant étalés sur une grande superficie, sont constitués de couloirs étroits où les plates-formes sont très rapprochées les unes des autres. On passera donc poliment sur le bonus permettant de planer, probablement utile dans une version du jeu qui n'existe que dans la tête du lead game designer. Le meilleur, c'est qu'aussi prétendument avantageux soient les pouvoirs de Superfrog (voler, tirer sur des ennemis), ils ne permettent quasiment jamais de se sortir d'un mauvais pas. La plupart du temps, on se cogne contre le plafond avant de retomber lamentablement sur un pixel de pique ou on tire en vain sur un minuscule (on insiste : minuscule) ver de terre placé à l'endroit le plus bâtard, qui est quasiment indifférenciable, dans sa forme, sa couleur et son animation, des innombrables bonus qui l'entourent.

Quand on finit un niveau, même en ayant eu l'impression d'avoir réussi, ce n'est pas une récompense : le score de fin souvent minable et l'absence de plaisir qu'on prend à récupérer des bonus (omniprésents jusqu'à l'excès) finissent par agacer. Les mondes ne changent en rien la façon de jouer, ce qui laisse parfaitement indifférent quand on passe de l'un à l'autre. Le boss récurrent, une sorcière dépourvue d'autre pattern que de foncer sur la grenouille une fois tous les trois quarts d'heure, est tellement facile à battre et peu impressionnant que ses apparitions en viennent à faire pitié - maltraiter une vieille dame sans défense, pourquoi faire ? Et puis, bon sang, que ces graphismes soit-disant HD sont vides, ternes, tristes, impersonnels... même l'omniprésence de bonus scintillants échouent à leur donner vie ! On pourrait se rabattre sur le grand ajout de cette version, un éditeur de niveau il est vrai assez complet, qui permet dans l'absolu de faire le niveau que l'on souhaite, avec à disposition tous les assets du jeu, du pixel de base au "pinceau" permettant d'ajouter des plates-formes ou groupes de plates-formes prédéfinis. On pense un peu, dans l'exécution, à Rayman Designer. Sur Vita, contrairement à ce qu'on aurait pu penser, ce mode n'a pas sauté, et répond même présent avec les mêmes fonctions que versions PC et consoles de salon. En théorie, il devrait être possible de créer des niveaux intelligents tirant réellement parti de la maniabilité de Superfrog. Seul souci, la petitesse des plates-formes de base rend tout aussi fastidieuse la conception de niveaux réellement personnalisés, à moins d'y passer littéralement des heures. On se rabat sur quoi, alors ? Ben : sur LittleBig Planet, en fait. Thanks for playing.
boulingrin87
3
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le 17 avr. 2014

Critique lue 351 fois

Seb C.

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