The Last of Us, c’est typiquement le jeu que vous démarrez avec un a priori positif. Ça fait des mois que le plan comm’ a débuté, puis vient la sortie et les critiques unanimes, alors pour peu qu’en plus vous soyez fan des univers post-apocalyptiques, vous vous dites que forcément, c’est fait pour vous.
Vous pourriez dire qu’à force de trop en attendre, c’est aussi le meilleur moyen d’être déçu et pourtant…


Le jeu n’a pas encore commencé que vous comprenez déjà que vous tenez là une œuvre hors norme. En effet, le menu de départ affiche sobrement quelques options, mais il vous met déjà dans l’ambiance, avec cette vue fixe sur une fenêtre, légèrement entrouverte, rideaux flottant doucement au gré du vent. A l’intérieur, le mur est dégradé, laissant deviner que les lieux sont abandonnés depuis longtemps, à l’extérieur, malgré la plante grimpante qui semble proche de pénétrer les lieux, la lumière vive du soleil distille une ambiance apaisée. La musique, elle, est douce, mélancolique, quasi désespérée. On pourrait rester des heures à contempler ce tableau et pourtant, il faudra bien appuyer sur « Start » pour découvrir l’essentiel.


Si vous n’avez pas encore essayé The Last of Us, rassurez-vous, ce test en révélera le moins possible sur l’histoire. Néanmoins, ce n’est pas trop en dire que le début du jeu est absolument fantastique. Les premières minutes, qui se déroulent en 2013 et durant lesquelles vous faites connaissance avec Joël, resteront parmi les plus marquantes de l’Histoire du jeu vidéo, sans parler du fait qu’elles vous permettront de mieux comprendre la personnalité de Joël vingt ans plus tard, c'est-à-dire au moment où prend place la majorité du jeu.
Après un tel début, il faut reconnaître que le soufflet retombe un peu ensuite. On découvre Joël dans un Boston en forme de ville retranchée dans laquelle on a maintenu un semblant de civilisation, même si la vie n’y est pas facile et que l’ordre militaire qui règne n’est pas là pour plaisanter.
Joël, comme beaucoup d’autres, se débrouille pour survivre et s’en sort grâce à des trafics pas toujours très clean. Il est accompagné de Tess avec qui il semble travailler depuis un moment. C’est l’occasion d’ailleurs de souligner un des (nombreux) points forts du jeu : les personnages secondaires sont vraiment travaillés, ils sont charismatiques, portent leur propre histoire et viennent, chacun en ce qui le concerne, marquer le jeu de leur empreinte. Combien de softs, aussi bon soient-ils au demeurant, nous font croiser des seconds couteaux sans intérêt et oubliés cinq minutes après les avoir quittés ?


Au début du jeu, on est également frappé par l’excellence technique du soft. Alors certes, on pourra dire que la patte de Naughty Dog est peut-être trop évidente et que le jeu ressemble trop à la série Uncharted (ce qui n’est pas faux), mais les décors sont vraiment fantastiques. A tel point même que, plus encore que dans Uncharted, vous vous arrêterez volontiers admirer les paysages, comme ça, juste pour le plaisir, ce serait même franchement dommage de ne pas le faire et de foncer tête baissée.
On retrouve d’autres similitudes avec les Uncharted, notamment ces espèces de traits rouges qui apparaissent à l’écran quand vous subissez des dommages ou même le système de fusillade qui est plutôt dynamique. On peut en revanche regretter qu’il ne soit pas possible de glisser ou d’effectuer des roulades car c’est non seulement pénalisant dans les moments chauds et ça plombe un peu le dynamisme de ces situations.


Assez vite, Joël fera la connaissance d’Ellie, adolescente dont il va devoir s’occuper pour une raison qu’on taira ici. Sachez simplement que les deux vont devoir se lancer dans un long road trip à travers les Etats-Unis. Un périple de plusieurs mois, entravé par des routes impraticables, les intempéries et surtout par les dangers liés à la présence des infectés mais plus encore par celle d’autres survivants. A l’instar de l’idée véhiculée dans le comics The Walking Dead, on comprend vite dans The Last of Us que le pire ennemi de l’homme, c’est souvent l’homme lui-même.


Et si les rapports entre nos héros sont plutôt glacials au début, les événements qu’ils vont vivre vont les renforcer progressivement. Et comme par magie, vous, derrière votre écran allez aussi progressivement vous attacher à eux, sans y prêter garde. Vous finirez par partager leurs joies, leurs peurs et leurs peines et par vous soucier réellement de ce qui leur arrive. Car disons le, rarement des personnages de jeux vidéo auront dégagé autant de personnalité, autant d’humanité…On peinerait presque à penser qu’ils n’existent pas pour de vrai.


Si de par la profondeur des personnages et la qualité du scénario, on est tenté de parler de The Last of Us davantage comme un film que comme un jeu, il nous faut quand même aborder les questions inhérentes à tout jeu vidéo.
Tout d’abord, la prise en main est tout ce qu’il y a de plus agréable. Classique sur le fond, il y a quelques petites innovations bien trouvées, comme le fait qu’il faille un certain temps pour changer d’arme, pour confectionner une bombe artisanale ou un pansement, alors que dans le même temps, le jeu ne se met pas en pause et que vous pouvez être attaqué si vous n’avez pas pris le soin de vous planquer. Tout cela va dans le sens voulu par Naughty Dog de développer un survival digne de ce nom. La difficulté (paramétrable) n’est pas excessive en « normal » mais le jeu ne vous offre jamais pléthore de munitions ou de kits de soins et il faudra donc fouiller méticuleusement toutes les pièces et lieux traversés afin de collecter tout élément qui vous permettrait de bricoler une arme ou un objet utile.
Sans être poussé à l’extrême (vous pouvez encaisser plusieurs balles, y compris de gros calibre, avant de mourir), l’aspect survival est donc bien développé, en revanche on y associera pas le mot horror puisque le soft, bien que réellement stressant par moment, est rarement effrayant. On n’est pas dans Silent Hill.
En parlant d’ambiance, là aussi, le titre de Naugthy Dog est extrêmement soigné. Les musiques sont aussi discrètes que somptueuses et le doublage français est impeccable.


Non décidément, hormis ce qui a déjà été évoqué plus haut, on trouve bien peu à redire de négatif sur ce jeu. On soulignera quand même une IA relativement moyenne. Si vos compagnons d’infortune agissent généralement de manière cohérente (il est d’ailleurs amusant de regarder leur réaction quand vous attendez sans rien faire), les ennemis, surtout humains ne sont pas toujours très malins. Il est en effet assez navrant de se planquer et de voir un de vos coéquipiers se mettre totalement à découvert sans que cela ne suscite la moindre réaction de vos adversaires. Il y a donc surement encore une petite marge de progression sur ce point.
D’une manière générale, cela ne saurait cependant avoir un réel impact sur le plaisir de jeu.


The Last of Us n’invente certes pas grand-chose sur le fond, les mauvaises langues pourraient même dire qu’il s’agit seulement d’un Uncharted post-apocalyptique. Ce serait bien réducteur néanmoins car non seulement le jeu est nettement moins scripté, mais il propose surtout une aventure d’une intensité rarement atteinte et nul doute qu’une fois arrivé à la fin (comptez une quinzaine d’heures pour cela), vous resterez un long moment à réfléchir à la conclusion, avec peut-être pour seul regret de ne pas avoir pu exercer une quelconque influence sur ce dénouement.


Vous l’aurez compris, on pourrait s’étaler bien longtemps sur The Last of Us. Certes, il n’est pas exempt de tout défaut (mais quel jeu l’est ?) et n’est pas particulièrement original, mais l’ensemble suscite un tel émerveillement qu’on voit difficilement à qui on pourrait le déconseiller.
On tient là rien de moins qu’un des cinq meilleurs titres de la PS3, et surement même un des meilleurs titres de l’Histoire du jeu vidéo, toute plate-forme confondue.


[Test initialement posté sur France Retrogaming le 04/03/2014]

billyjoe
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Jeux vidéo et Les meilleurs jeux de la PlayStation 3 (PS3)

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le 24 mars 2019

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Billy Joe

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