Sorti en 2022 et fruit du travail d’un seul homme, Andrew Shouldice, Tunic est un jeu d’action-aventure indépendant qui puise son inspiration dans les classiques du genre, notamment The Legend of Zelda, mais également The Witness (2016). Vous incarnez un petit renard armé d’une épée, plongé dans un monde aussi mystérieux qu’envoûtant, regorgeant de secrets à percer et d’énigmes corsées. Mais ne vous laissez pas tromper par son apparente simplicité. Sous ses airs de jeu mignon et enfantin se cache une expérience retorse, demandant abnégation et réflexion.
Beaucoup de personnes considèrent qu’il s’agit d’un « Dark Souls Like ». Pour ma part, je trouve que c’est une aberration : il s’agit d’un abus de langage. La franchise de From Software a tellement marqué l’industrie du jeu vidéo que dès qu’un jeu est difficile, il devient automatiquement un « Dark Souls Like ». Or, il n’y a aucun point commun entre Dark Souls et Tunic : ni l’univers, ni le gameplay, ni l’ambiance, ni les combats de boss, ni la musique, ni le game design. Rien.
Tunic peut surprendre au départ avec sa direction artistique minimaliste, qui n’est pas sans rappeler la refonte de The Legend of Zelda : Link's Awakening (2019). La vue isométrique, intelligemment exploitée, cache une quantité impressionnante de secrets, certains défiant littéralement l’entendement. Chaque recoin du monde incite à l’exploration et à la découverte, vous poussant sans cesse à réfléchir à ce que vous pourriez avoir manqué. Combien de fois ai-je frotté ma truffe contre les murs pour tenter de trouver un passage dérobé ? Et que dire de la bande-son ? L’électro apaisante qui accompagne votre périple renforce cette atmosphère onirique. Les musiques sont marquantes, douces et envoûtantes.
Sous son gameplay apparemment simple, Tunic révèle une profondeur rarement vu. Le jeu mêle combats, exploration et énigmes, avec une évolution progressive des mécaniques qui n’est pas sans rappeler les premiers Zelda. L’une des meilleures trouvailles du jeu réside dans l’intégration d’un livret d’utilisation, directement inspiré des manuels des jeux rétro. Vous trouvez des pages disséminées dans le monde, chaque nouvelle découverte apportant son lot d’informations cruciales. Comprendre pleinement certaines mécaniques ou éléments narratifs repose souvent sur la lecture attentive de ce guide. C’est un système qui récompense l’investissement personnel : lorsqu’on finit par résoudre une énigme restée obscure pendant des heures, le sentiment de satisfaction est immense.
Malgré toutes ses qualités, le jeu n’est pas exempt de défauts. Certaines énigmes sont si abstraites qu’elles peuvent frustrer. Le manque d’indications claires peut rapidement freiner la progression, et il m’est arrivé de consulter une solution pour avancer. La durée de vie est satisfaisante : j’ai mis environ vingt heures pour en voir le bout. Le titre propose deux ou trois fins. La première est celle sur laquelle nous tombons tous au départ : la fin nulle. Puis, le jeu se dévoile vraiment, et une claque poussée à Mach 3 viendra épouser la forme grassouillette de votre joue porcine. Lorsqu’on comprend dans quoi on met les pieds, après plus d’une dizaine d’heures de jeu, c’est un véritable tournant qui fait passer Tunic du jeu sympathique à exceptionnel.
Sous ces airs de jeu innocent, Tunic est en réalité une œuvre ambitieuse et marquante, qui rend un bel hommage aux grands classiques de chez Nintendo tout en proposant une aventure originale grâce à l’implémentation des pages d’un manuel d’utilisation fictif disséminées à travers le monde. Entre sa direction artistique sublime, son gameplay intelligent et son univers riche, Tunic s'illustre comme l'un des jeux indépendants les plus remarquables de ces dernières années. Il n’y a pas deux jeux comme Tunic aujourd’hui en 2025. Toutefois, son approche exigeante (le fameux côté « Dark Souls Like » mdr) pourrait rebuter certains joueurs, sa longueur aussi. Bref, ceux qui apprécient les défis, les énigmes et les jeux narratifs subtils y trouveront leur compte. Pour les autres, le chemin risque d’être hostile. Je recommande mille fois. Mon GOTY 2025 dès le mois de janvier.